Tandis que la CPI, premier tribunal permanent chargé de juger les crimes de guerre, les crimes contre l'humanité et les génocides, n’est juridiquement compétent pour agir que si une juridiction nationale ne peut ou ne veut pas le faire, le Ministre de la Justice Mohammed Ali al-Mardhi a officiellement déclaré que «la position de principe du Soudan est que cette Cour ne peut avoir aucune compétence lorsqu'il s'agit de juger les Soudanais». Cette incompétence concerne, d’après lui, aussi bien les membres des forces de sécurité que les rebelles de cette région. Cité par le quotidien Akhbar al-Youm, M. Mardhi, a assuré que la justice de son pays avait assez d'«indépendance, d’impartialité ainsi que le désir et la capacité de juger toute personne coupable de crime au Darfour».
Le ministre est actuellement au Darfour pour suivre les enquêtes menées sur des auteurs d'exactions dans cette région. Les autorités assurent toutefois que sa présence est sans rapport avec l'annonce jeudi dernier du procureur de la CPI, Luis Moreno Ocampo, de remettre aux juges son rapport quant à «des éléments de preuve relatifs à des personnes nommées, aux crimes de guerre et aux crimes contre l'humanité commis au Darfour».
Après examen dudit rapport, les juges donneront ou non l'autorisation d'ouvrir une instruction à l'encontre des personnes nommées, et éventuellement d’émettre des mandats d'arrêt internationaux. Luis Moreno-Ocampo enquête depuis juin 2006 sur des accusations de persécutions, tortures, viols et meurtres. Son travail porte sur des faits survenus en 2003 et 2004, période considérée comme la plus violente au Darfour. Son équipe a effectué plus de 70 missions dans 17 pays, a étudié les cas de centaines de victimes potentielles et réalisé une centaine d'entretiens avec des témoins. Selon l'ONU, quelque 200 000 personnes ont péri de la guerre et de ses conséquences et plus de 2 millions ont été déplacées, des chiffres jugés exagérés par le Soudan.