Le 13 février 2007, un protocole d’accord était signé par l’État de Côte d’Ivoire et la société Trafigura, affréteur du navire Probo Koala qui a déversé plus de 520 m3 de déchets toxiques à Abidjan en août dernier. Par cet accord, la société Trafigura s’engage à verser au gouvernement ivoirien la somme de 100 milliards de Francs CFA (152 millions d’euros) en échange de l’abandon de toute poursuite et, en conséquence, de la libération des deux dirigeants français de Trafigura, incarcérés depuis le 18 septembre 2006 dans la prison d’Abidjan, et du dirigeant de la société Puma Energy, filiale du groupe Trafigura en Côte d’Ivoire.
Cet accord, dans un dossier qui a fait tant de victimes, est parfaitement emblématique, en matière de «crimes environnementaux» reconnus internationalement, du détournement d’une solution judicaire pour une solution transactionnelle qui nie le droit des victimes à l’accès à un tribunal indépendant.
Comment la somme d’argent qui sera versée par Trafigura au gouvernement ivoirien - dédiée selon les termes l’accord à «la réparation des préjudices subis par l’État de Côte d’Ivoire, (...) à l’indemnisation des victimes (...) au remboursement des frais de dépollution (...) et (à la construction d’une) usine de traitement des déchets ménagers dans le District d’Abidjan» - pourrait-elle être considérée comme une juste réparation des préjudices subis par les victimes, alors qu’une telle réparation impliquerait nécessairement que soient établies les responsabilités, une évaluation réelle des préjudices subis, ainsi que des éventuelles conséquences à venir pour l’Homme et pour l’environnement ?
En permettant aux parties signataire de renoncer définitivement à toute poursuite réciproque et en niant leurs responsabilités respectives, non seulement la transaction passée aggrave le climat d’impunité qui règne en cette affaire, mais elle va également à l’encontre des obligations internationales de la Côte d’ivoire de poursuivre et de juger les responsables d’infractions graves telles qu’énoncées notamment dans la Convention de Bâle de 1989 sur le contrôle des mouvements transfrontaliers de déchets dangereux et de leur élimination.
- Pour une analyse critique de l’accord de transaction passé entre l’État de Côte d’Ivoire et la société Trafigura, lire notamment l’article de Jean Marcel LOGBO, «Côte d'Ivoire : Examen critique de l'accord conclu entre l'État de Côte d'Ivoire et les sociétés Trafigura et Puma Energy», Le Patriote (Adbijan), 18 février 2007.
- ARCHIVES MULTIPOL : Catherine MAIA, «Le scandale des déchets toxiques à Abidjan» , MULTIPOL - Réseau d'analyse et d'information sur l'actualité internationale, 18 septembre 2006.
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