6 février 2013

ACTU : Tunisie : l'assassinat de Chokri Belaïd provoque une vague de manifestations anti-Ennahdha

David ROY

L'émotion est vive en Tunisie après l'assassinat par balles de l'opposant d'extrême gauche Chokri Belaïd, le 6 février au matin. Des manifestations ont éclaté partout dans le pays, ainsi que des violences anti-Ennahdha. La question du couvre-feu est posée.

L’assassinat par balles, le 6 février au matin, du secrétaire général du Parti des patriotes démocrates Chokri Belaïd, devant chez lui, met le feu aux poudres en Tunisie. Après les déclarations du frère de l’opposant tunisien, qui a accusé le parti islamiste Ennahdha (au pouvoir) et son chef Rached Ghannouchi d’être directement responsables du crime, des manifestations violentes ont éclaté un peu partout en Tunisie.

Mezzouna, à 75 km au sud-est de Sidi Bouzid (épicentre de la révolution tunisienne), et à Gafsa (centre), des manifestants ont saccagé les d’Ennahdha avant de les incendier, ont rapporté des habitants à l’AFP.

Dans ces mêmes villes, des manifestations pacifiques anti-islamistes étaient en cours à la mi-journée, les participants étant au nombre d’environ 700 à Gafsa et de 2 000 à Sidi Bouzid. Plusieurs centaines de personnes sont également sorties dans les rues de Kasserine, de Béja (nord-ouest) et de Bizerte (nord).

À Tunis, sur l'avenue Habib Bourguiba, haut lieu de la révolte de 2011, une foule de plus en plus importante se réunissait devant le ministère de l'Intérieur. Vers 12h00, elle réunissait déjà quelque 2 000 manifestants.

De son côté, Rached Ghannouchi, a dénoncé l’assassinat de Chokri Belaïd. « Ils [les criminels, NDLR] veulent un bain de sang mais ils ne vont pas réussir », a-t-il déclaré, en rejetant toutes les accusations contre son parti, qu’il qualifie de règlements de compte politique.

Allié à Ennahdha, le président tunisien Moncef Marzouki a quant à lui annulé sa participation au sommet de l'Organisation de la coopération islamique (OCI), au Caire pour rentrer d'urgence à Tunis. « Il rentre en début d'après-midi », a déclaré Ghassen Dridi, un conseiller du chef de l'État joint par téléphone.

La présidence a aussi dénoncé dans un communiqué le meurtre de Belaïd comme «un crime odieux visant à mener le peuple tunisien à la violence» et a appelé à la retenue. la situation est suffisamment inquiétante pour que la question d'un couvre-feu se pose, selon nos sources.

Du côté de l'ONU, la Haut Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme, Navi Pillay, a condamné le jour même l'assassinat de Chokri Belaïd : «J'ai été extrêmement attristée par la nouvelle choquante du meurtre de M. Belaïd », a déclaré Mme Pillay dans un communiqué de presse. «Il était un grand défenseur des droits de l'homme et des valeurs démocratiques et un farouche adversaire de la violence politique, qu'il avait publiquement dénoncée, hier encore, comme une attaque contre le processus démocratique dans le pays».

La Haut Commissaire a rappelé que le crime a été commis dans un contexte de violences politiques croissantes, notamment des attaques contre les locaux et les réunions de partis politiques et le meurtre d'un autre dirigeant politique dans le Sud de la Tunisie en octobre dernier. 

«Je condamne fermement ces actes qui, comme M. Belaïd l'avait lui-même dit très clairement, menacent de porter gravement atteinte à la transition démocratique dans la Tunisie post-révolutionnaire. J'appelle tous les acteurs, tant du gouvernement que de la société civile, à s'unir derrière la campagne de M. Belaïd contre la violence politique. Ceci permettrait, au moins, de lui rendre un hommage digne pour son travail inestimable accompli en tant que militant des droits de l'homme et opposant à la violence».

Navi Pillay a appelé les autorités à prendre des mesures rigoureuses afin d'enquêter sur son meurtre et d'autres crimes apparemment commis pour des raisons politiques et à fournir une meilleure protection aux personnes qui, comme Chokri Belaïd, ont été menacées et sont manifestement en danger.

Sources : ONU/AFP/Jeune Afrique


A VOIR :
  • Le 6 février 2013, le président tunisien Moncef Marzouki a prononcé un discours dans l'hémicycle du Parlement européen de Strasbourg, dans lequel il a décrit le long processus démocratique en cours dans son pays après la Révolution de Jasmin. Son vibrant discours en faveur de la démocratie, après l'assassinat d'un opposant dans son pays, a suscité une vague d'émotion rare au Parlement européen.


1 commentaire :

  1. Bravo pour votre travail, nos connaissance ont toujours besoin de tels articles pour rester en mise à jour avec ce qui nous entoure , … bon courage.

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