Thierry RANDRETSA
Dans son dernier rapport publié le 4 juin,
la Commission d'enquête internationale indépendante sur la Syrie détaille les
crimes de guerre commis par le Gouvernement syrien, ainsi que par les forces
d'opposition, avant d'appeler à un regain diplomatique robuste afin de mettre
un terme à la violence.
« Les crimes de guerre et les crimes contre l'humanité sont une réalité quotidienne en Syrie. Les récits effroyables des pertes en vies humaines marquent nos consciences au fer rouge, alors que la recherche de la justice n'a jamais été aussi impérieuse », indique la Commission dans son rapport soumis le 4 juin au Conseil des droits de l'homme à Genève.
« Les crimes de guerre et les crimes contre l'humanité sont une réalité quotidienne en Syrie. Les récits effroyables des pertes en vies humaines marquent nos consciences au fer rouge, alors que la recherche de la justice n'a jamais été aussi impérieuse », indique la Commission dans son rapport soumis le 4 juin au Conseil des droits de l'homme à Genève.
Formée de Paulo Sergio Pinheiro, qui en
est le Président, de Karen AbuZayd, de Carla Del Ponte et de Vitit Muntarbhorn,
la Commission a été créée, le 23 août 2011, par le Conseil des droits de
l'homme des Nations Unies pour enquêter sur toutes les violations des droits de
l'homme perpétrées en Syrie.
Ce dernier rapport, le quatrième, couvre
la période allant du 15 janvier au 15 mai 2013, et détaille pour la première
fois l'imposition systématique d'états de siège, l'utilisation d'armes
chimiques et les déplacements forcés.
« La Syrie est en chute libre », a dit
M. Pinheiro le 4 juin devant le Conseil. « Personne n'est en train de gagner la
guerre et personne ne la gagnera. La livraison d'armes supplémentaires ne
conduira qu'à plus de civils tués ou blessés ». M. Pinheiro a également rappelé que le
dialogue était le seul moyen de règlement d'un conflit qui a fait plus de
70.000 victimes civiles et déplacé plus de quatre millions de personnes depuis
son commencement en mars 2011. « Nous exhortons les Etats à user de
leur influence auprès des parties au conflit afin de protéger les civils », a-t-il
ajouté, alors que les experts dans leur rapport – lequel se base sur 430
témoignages et autres moyens de preuve - soulignent le coût exorbitant en vies
humaines lié à une circulation accrue d'armes en Syrie.
Si les forces du Gouvernement syrien
ont, selon les experts, commis des « meurtres, des actes de torture, des viols,
des déplacements et des disparitions forcées » dans le cadre d'attaques
systématiques et généralisées contre les populations civiles, les forces de
l'opposition sont également responsables de crimes de guerre et de crimes
contre l'humanité, en particulier des actes de torture, des prises d'otage et
des exécutions extrajudiciaires. « Les violations commises par les
groupes armés anti-gouvernementaux n'ont néanmoins pas la gravité et l'ampleur
des abus commis par les forces du Gouvernement et les milices qui lui sont
fidèles », affirme le rapport.
Selon les experts, il y a en outre des
motifs raisonnables de penser que des produits chimiques ont été utilisés en
tant qu'armes. Si des allégations concernant l'utilisation d'armes chimiques
par les deux parties sont évoquées, la majorité d'entre elles concernent les
troupes du Président syrien Bachar Al-Assad. « Dans quatre attaques – Khan Al-Assal
près d'Alep le 19 mars, à Uteibah près de Damas le 19 mars, dans le quartier de
Cheikh Maksoud à Alep le 13 avril et dans la ville de Sarakeb le 29 avril - il
y a des motifs raisonnables de penser que des quantités limitées de produits
chimiques ont été utilisées », affirme le rapport.
Il n'est toutefois pour l'instant pas
possible, sur la base des éléments de preuve à disposition, de déterminer avec
précision la nature de ces agents chimiques, les systèmes d'utilisation
employés ni ceux qui les ont utilisés, alors que d'autres incidents, toujours
selon ce rapport, font également l'objet d'enquêtes. « Il est en conséquence crucial que se
déploie en Syrie la mission d'établissement des faits chargée de vérifier les
allégations selon lesquelles des armes chimiques auraient été employées dans ce
pays», écrivent les experts.
Cette mission, présidée par le
professeur Ǻke Sellström, est toujours dans l'attente de son déploiement, le
gouvernement syrien, en dépit des appels répétés du Secrétaire général, ne
l'ayant pas encore autorisé. « Une intensification des efforts
diplomatiques est la seule voie pour une solution politique en Syrie. Les
négociations doivent être inclusives, toutes les facettes de la mosaïque
syrienne devant être représentées», conclut la Commission d'enquête dans son
rapport.
Le représentant syrien à Genève, Faysal
Khabbaz Hamoui, a rejeté ledit rapport en raison de son manque d'objectivité. «
La Commission d'enquête ne dit rien des violations systématiques de la
souveraineté de mon pays commises par des Etats voisins qui apportent un
soutien logistique aux groupes terroristes opérant en Syrie », a-t-il affirmé.
Source : ONU
Summary
The conflict in Syria has
reached new levels of brutality. This report documents for the first time the
systematic imposition of sieges, the use of chemical agents and forcible
displacement. War crimes, crimes against humanity and gross human rights violations
continue apace. Referral to justice remains paramount.
This report covers the period
15 January to 15 May 2013. The findings are based on 430 interviews and other
collected evidence.
Government forces and
affiliated militia have committed murder, torture, rape, forcible displacement,
enforced disappearance and other inhumane acts. Many of these crimes were
perpetrated as part of widespread or systematic attacks against civilian
populations and constitute crimes against humanity. War crimes and gross
violations of international human rights law – including summary execution,
arbitrary arrest and detention, unlawful attack, attacking protected objects,
and pillaging and destruction of property –have also been committed. The
tragedy of Syria’s 4.25 million internally displaced persons is compounded by
recent incidents of IDPs being targeted and forcibly displaced.
Anti-Government armed groups
have also committed war crimes, including murder, sentencing and execution
without due process, torture, hostage - taking and pillage. They continue to
endanger the civilian population by positioning military objectives in civilian
areas. The violations and abuses committed by anti-Government armed groups did
not, however, reach the intensity and scale of those committed by Government
forces and affiliated militia.
There are reasonable grounds
to believe that chemical agents have been used as weapons. The
precise agents, delivery systems or perpetrators could not be identified.
The parties to the conflict
are using dangerous rhetoric that enflames sectarian tensions and risks
inciting mass, indiscriminate violence, particularly against vulnerable
communities
War crimes and crimes against
humanity have become a daily reality in Syria where the harrowing accounts of
victims have seared themselves on our conscience.
There is a human cost to the
increased availability of weapons. Transfers of arms heighten the risk of
violations, leading to more civilian deaths and injuries.
A diplomatic surge is the only
path to a political settlement. Negotiations must be inclusive, and must
represent all facets of Syria’s cultural mosaic.
Résumé
Le conflit en Syrie a franchi un nouveau pallié dans la brutalité. Pour la
première fois, le rapport mentionne l’usage systématique des sièges, l’emploi
d’agents chimiques et des déplacements forcés. Crimes de guerre, crimes contre
l’humanité et violations graves des droits de l’Homme continuent au même
rythme. Le renvoi devant la justice est primordial.
Ce rapport couvre la période du 15 janvier au 15 mai 2013. Les résultats
sont basés sur 430 interviews et d’autres preuves collectées.
Les forces gouvernementales et les milices affiliées ont commis des
meurtres, pratiqué la torture, le viol, les disparitions forcées et d’autres
actes inhumains. Nombre de ces crimes constituent des crimes contre l’humanité.
Les crimes de guerre et les violations graves du droit international des droits
de l’Homme – comprenant des exécutions sommaires, des détentions arbitraires,
des attaques illégales, des attaques contre des objets protégés, le pillage et
la destruction de propriété – ont aussi été commis. La tragédie des 4,25
millions de personnes déplacées internes de Syrie a été aggravée par les
incidents récents de PID ciblées et déplacées de force. Les groupes armés
anti-gouvernementaux ont aussi commis des crimes de guerre, dont des meurtres,
des condamnations et des exécutions sans procès, de la torture, des prises
d’otages et du pillage. Ils continuent à mettre en danger la population civile
en plaçant des objectifs militaires dans des zones civiles. Les violations et
les abus commis par les groupes armés anti-gouvernementaux n’ont, cependant,
pas atteint l’intensité et l’échelle de ceux commis par les forces
gouvernementales et ses milices.
Il y a des motifs raisonnables de croire que des agents chimiques ont été
utilisés comme armes. Les agents précis, le mode de dissémination ainsi que les
auteurs de ces attaques n’ont pas pu être identifiés.
Les Parties au conflit emploient une rhétorique dangereuse qui attisent les
tensions sectaires et risque d’inciter à des violences de masse et
indiscriminée, particulièrement contre les communautés vulnérables.
Crimes de guerre et crimes contre l’humanité sont devenus une réalité
quotidienne en Syrie où le décompte poignant des victimes a marqué durablement
notre conscience.
Il y a un coût humain à la disponibilité accrue des armes. Les transferts
d’armes augmentent les risques de violations, conduisant à plus de morts civils
et de blessés.
Une poussé diplomatique est la seule voie vers un règlement politique. Les
négociations doivent être inclusives et représentées toutes les facettes de la
mosaïque culturelle de la Syrie.
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