« Les preuves recueillies montrent que Mouammar Kadhafi a personnellement ordonné des attaques contre des civils libyens non armés », a-t-il indiqué lors d'une conférence de presse à La Haye.
« Son fils Seif el-Islam est le Premier ministre de facto, Abdallah el-Senoussi est son bras droit et il a personnellement ordonné certaines attaques », a ajouté le magistrat argentin.
Les juges de la CPI doivent désormais décider d'accepter la requête du procureur, de la rejeter ou de demander à son bureau des informations supplémentaires. Le document qui synthétise les détails du dossier a été finalisé le 15 mai par une équipe de cinq membres du bureau du procureur. Il comprend 74 pages dont 5 annexes.
Moreno-Ocampo avait été saisi le 26 février par le Conseil de sécurité des Nations unies, et avait annoncé le 3 mars l'ouverture d'une enquête visant huit personnes au total dont Kaddafi et trois de ses fils. Trente missions dans onze pays ont été menées depuis par le bureau du procureur. Plus de 1 200 documents ont été examinés, dont des vidéos et des photographies, et plus de 50 entretiens ont été menés, dont certains avec des témoins oculaires. Les enquêteurs n'ont toutefois pas entendu de témoins en Libye, afin de ne pas mettre ceux-ci en danger, selon le bureau du procureur.
Pratiquement à la même période, dans une lettre au procureur de la CPI datée du 3 mai, mais publiée le 18 mai sur le site internet de la CPI, le président ivoirien Alassane Ouattara a demandé au procureur de la Cour pénale internationale d’enquêter sur "les crimes les plus graves" commis sur le territoire ivoirien afin que les responsables soient jugées à La Haye.
Pour favoriser la réconciliation, mieux vaut transférer la question des crimes les plus graves à la Cour pénale internationale. C’est le calcul qu’a fait le président ivoirien Alassane Dramane Ouattara, en demandant au procureur du tribunal de La Haye, l’Argentin Luis Moreno-Ocampo, de bien vouloir conduire les enquêtes sur les crimes les plus graves commis en Côte d’Ivoire pendant la crise postélectorale.
« La justice ivoirienne n'est, à ce jour, pas la mieux placée pour connaître des crimes les plus graves commis au cours des derniers mois », reconnaît Alassane Ouattara dans sa lettre au procureur de la CPI. « Toute tentative (de) traduire en justice les plus hauts responsables risquerait de se heurter à des difficultés de tous ordres ».
Alassane Ouattara confirme donc, dans cette missive, son « souhait que (le bureau du procureur) mène en Côte d'Ivoire des enquêtes indépendantes et impartiales sur les crimes les plus graves commis depuis le 28 novembre 2010 sur l'ensemble du territoire ivoirien ». Il dit encore souhaiter que le procureur « fasse en sorte que les personnes portant la responsabilité pénale la plus lourde pour ces crimes soient identifiées, poursuivies et traduites devant la Cour pénale internationale ».
« Je ne ménagerai par ailleurs aucun effort pour réconcilier les Ivoiriens entre eux et clore enfin une décennie de violences et de déchirures », écrit Alassane Ouattara.
« La réconciliation demande que la justice soit rendue, a commenté sa porte-parole Anne Ouloto. Sans vérité ni justice, il n'y a pas de réconciliation. Cela montre que la Côte d'Ivoire est entrée dans une nouvelle ère ».
La Côte d’Ivoire n’est pourtant pas un État partie au Statut de Rome, le traité fondateur de la CPI. Mais, de façon similaire, en 2003, Laurent Gbagbo avait reconnu sa compétence sur les crimes commis après septembre 2002, alors qu’il avait été victime d’une tentative de coup d’État.
Sources : AFP/Jeune Afrique