Catherine MAIA
Le 15 mai 2013, l’Assemblée générale de l'ONU a adopté une résolution* sur la transition
politique en Syrie dans laquelle elle salue la création, le 11 novembre 2012 à
Doha, de la Coalition nationale des forces de l’opposition et de la révolution
syriennes, « interlocuteur valable et représentatif nécessaire à toute
transition politique ». La résolution adoptée par 107 voix pour, 12
voix** contre et
59 abstentions sur 180 votants, contient aussi des dispositions sur les
violations des droits de l’homme et sur une situation humanitaire marquée par
80 000 morts, 1,5 million de réfugiés et 4 millions de personnes
déplacées.
Présentant un texte parrainé par « environ un tiers des États
Membres », le représentant du Qatar a défendu une résolution qui appelle
au non-recours à la force et qui ne vise nullement à encourager une
intervention militaire.
La résolution lance « de nouveau » un appel en
faveur d’une transition politique sans exclusive conduite par les Syriens et
menant à l’instauration d’un régime politique démocratique et pluraliste, à la
faveur de l’ouverture d’un dialogue politique entre des interlocuteurs
crédibles. L’Assemblée y salue donc « l’interlocuteur valable et
représentatif nécessaire à toute transition politique » qu’est la
Coalition nationale des forces de l’opposition et de la révolution syriennes,
créée le 12 novembre 2012.
Le représentant de la Syrie n’a pas manqué d’ironiser sur « une
opposition née et nourrie à Doha » et qui est reconnue aujourd’hui comme
représentante légitime du peuple syrien, alors qu’elle est divisée. Cette
reconnaissance explique presqu’à elle seule la position des 12 pays opposants à
la résolution et des 59 abstentionnistes qui ont argué qu’il revient aux
Syriens et aux Syriens seuls de se choisir leurs représentants.
Il est « inacceptable » que la Coalition nationale de
l’opposition soit reconnue comme la seule force de l’opposition car cela
revient à ouvrir la voie à la légitimation de la force, a jugé le représentant
de la Fédération de Russie, opposant au texte. « Et oui, nous
reconnaissons la Coalition comme interlocuteur pour une transition
politique », a rétorqué son homologue de la France qui a dénoncé
« une certaine hypocrisie » consistant à dire d’un côté que
« l’opposition est divisée et incapable de négocier » et de l’autre,
qu’il est dangereux de travailler à créer une organisation
« parapluie » qui réunisse toutes les tendances de l’opposition afin
qu’elle puisse négocier dans le cadre d’une transition politique.
La résolution intervient après l’annonce faite le 7 mai dernier par les
États-Unis et la Fédération de Russie appelant à la tenue au plus vite d’une
conférence internationale sur la Syrie. Plusieurs délégations se sont
dites surprises qu’un vote ait été prévu aujourd’hui alors même que se présente
une « alternative extraordinaire », selon les mots du représentant
vénézuélien. Son homologue de la Syrie s’est montré résigné: « dès
qu’une chance de solution se fait jour, certains États multiplient les initiatives
pour la faire avorter ».
Dans la résolution, l’Assemblée exige que toutes les parties syriennes
collaborent avec le Représentant spécial conjoint de la Ligue des États arabes
et de l’ONU afin de mettre en œuvre rapidement le plan de transition exposé
dans le communiqué final publié par le Groupe d’action pour la Syrie le 30 juin
2012, et demande que le Secrétaire général commence à préparer l’appui et
l’assistance à la transition conduite par les Syriens.
En attendant, l’Assemblée condamne, dans sa résolution, toutes les
violences, « d’où qu’elles viennent », et exige que les autorités
syriennes accordent à la Commission internationale chargée d’enquêter sur les
violations des droits de l’homme un accès immédiat, libre et sans entrave à
toutes les régions du pays.
Elle souligne qu’il faut amener les responsables des violations graves du
droit international humanitaire et des droits de l’homme, à répondre de leurs
actes. Elle encourage le Conseil de sécurité à examiner les mesures qu’il
y aurait lieu de prendre. Une référence plus explicite à la Cour
pénale internationale (CPI) aurait été utile, a commenté le représentant de la
Suisse qui a voté pour la résolution. Il a rappelé que son pays avait
présenté une pétition à ce sujet, le 14 janvier dernier, laquelle avait été
signée par 58 États.
L’Assemblée exige aussi que les autorités syriennes accordent au Secrétaire
général un accès libre et sans entrave dans le cadre de son enquête sur toutes
les allégations d’emploi d’armes chimiques. L’Assemblée condamne
également les tirs des Forces armées syriennes contre les pays voisins.
Avant l’adoption de la résolution, le représentant de la Turquie avait
d’ailleurs prévenu que le vote de chaque délégation sera considéré « soit
comme un signal d’alarme, soit comme un appui cruel au régime syrien ».
Le parti pris en faveur de l’opposition a été vigoureusement dénoncé par
les opposants à la résolution et les abstentionnistes qui ont stigmatisé une
résolution déséquilibrée. À ceux-là, le représentant français a répondu
que le texte condamne bien les violations commises par les deux côtés.
Mais, a-t-il tenu à rappeler, le régime syrien est le premier responsable
car il utilise des armes, « certaines interdites d’ailleurs », contre
des populations civiles.
Les propos du représentant syrien selon lesquels des milliers de
terroristes extrémistes ont été envoyés en Syrie de l’étranger, grâce à l’aide
des services de renseignements de certains États, pour créer un « Khalifat
islamiste et djihadiste » ont suscité une question de son homologue
de l’Arabie saoudite : « Les 90 000 victimes étaient donc
toutes des terroristes? »
L’Assemblée a mis fin à sa journée de travail en écoutant les neuf derniers
orateurs de sa Réunion de haut de niveau sur l’évaluation du Plan d’action
mondial contre la traite des personnes. Elle a aussi entendu un résumé***
des deux tables rondes tenues sur les approches économiques de l’éthique des
relations hommes-femmes, et sur les bonnes pratiques en matière de prévention
de la traite. L’un de ses Vice-Présidents a lu la déclaration de
clôture du Président.
* A/67/L.63
** Se sont abstenus le Bélarus, la
Bolivie, la Chine, Cuba, l’Équateur, la Fédération de Russie, la République
islamique d’Iran, le Nicaragua, la République populaire démocratique de Corée,
la Syrie, le Venezuela et le Zimbabwe
*** Communiqué de presse AG/11369
PRÉVENTION DES CONFLITS ARMÉS
Projet de résolution sur la situation en République arabe syrienne (A/67/L.63)
M. VUK JEREMIĆ, Président de la soixante-septième session de
l’Assemblée générale, a d’emblée affirmé que la Syrie est l’un des
croisements de civilisations les plus important au monde, lequel enrichit
l’héritage de l’humanité depuis des millénaires. Mais aujourd’hui, a-t-il
déploré, sa vitalité et sa grandeur ont pratiquement disparu. Les appels
à la prière des muezzins et le retentissement des cloches des églises ont été
étouffés par le bruit et la fureur des bombes et des tirs de mitraillettes.
M. Jeremić a indiqué qu’au moins 80 000 personnes ont trouvé
la mort depuis le début des hostilités, « pour majorité des
civils ». Près d’un million et demi de personnes ont trouvé refuge
dans les pays voisins et le pays compte plus de quatre millions de personnes
déplacées. En outre, des preuves sur l’utilisation d’armes chimiques
commencent à se faire jour et l’escalade de la violence continue de menacer la
souveraineté et l’intégrité territoriales de la Syrie, s’est-il alarmé.
Le Président de l’Assemblée générale a averti que ce qui se passera en
Syrie dans les semaines et mois à venir aura un impact profond sur la sécurité
et le bien-être de la région dans son ensemble. « Nous ne pouvons
permettre aux ténèbres de se propager, ni au chaos de se propager comme une
épidémie », a plaidé M. Jeremić avant d’appeler les États
Membres à tout faire pour assurer la cessation immédiate des hostilités et
inciter les parties au conflit à prendre part au dialogue.
Il importe, a-t-il estimé, de se servir de l’accord conclu au mois de juin
dernier à Genève, par le Groupe d’action pour la Syrie, et auquel un nouvel
élan a été donné il y a quelques jours à Moscou. Cet accord doit nous
permettre de relancer le processus politique sur le terrain et d’aider les
citoyens syriens à commencer les efforts de réconciliation et à déterminer
librement l’avenir de leur nation.
L’heure est grave pour les Nations Unies, a averti M. Jeremić.
Si nous échouons à mettre un terme à ce qui est en train de devenir la
catastrophe humanitaire la plus terrible de notre temps, la décence exigera de
nous que nous nous demandions, en toute honnêté, « quo vadis Consociatio Nationum? ».
Si nous nous avérons incapables de faire ce qu’il faut pour mettre un terme à
cette tragédie, comment pourrons-nous alors justifier la crédibilité morale de
cette organisation? Il est plus que temps de dire « ça
suffit ». Assez de complaisance, assez d’actes fratricides.
Présentant le projet de résolution, SHEIKH MESHAL HAMAD M.J. AL-THANI(Qatar),
a souligné les répercussions de la crise syrienne sur la paix et la sécurité
internationales. Les Nations Unies ne devraient-elles pas faire face à
cette crise en condamnant les violations commises dans les termes les plus
forts et en demandant qu’elles cessent immédiatement, peu importe qui les
commet? Environ un tiers des États Membres, a rappelé le représentant, se
sont présentés comme coauteurs d’un projet de résolution qui s’enracine dans le
droit international et la Charte des Nations Unies. Ce texte ne fait
qu’illustrer la position de la majorité comme en témoigne le fait que
l’Assemblée générale ait adopté différentes résolutions sur une solution
politique au conflit pour que la Syrie s’ouvre à un système démocratique.
Nous avons appelé au dialogue entre toutes les parties, a insisté le
représentant.
Nous avons, a-t-il poursuivi, demandé que toutes les factions s’unissent,
ce qui a été fait et a permis d’avoir un seul interlocuteur, élément
indispensable à tout dialogue politique. Nous demandons aussi dans cette
résolution que l’ONU joue un rôle complémentaire pour encourager la transition
politique en Syrie. Le texte appuie tous les efforts consentis pour
mettre fin au bain de sang et assurer le respect des Conventions de Genève, a-t-il
dit. Ce texte, a-t-il encore indiqué, couvre les différents aspects de la
crise syrienne et demande la mise en œuvre d’un plan humanitaire. Il
aborde la question des réfugiés et des personnes déplacées. Il parle
de redevabilité et demande au Conseil de sécurité de prendre des
décisions, à cet égard. Le texte n’oublie pas, a souligné le
représentant, de mentionner le rapport faisant état des allégations sur
l’utilisation d’armes chimiques et appuie une enquête à ce sujet. De
nombreux amendements ont été introduits pour répondre à toutes les
préoccupations des coauteurs, a dit le représentant, à propos d’un projet de
résolution qui appelle aussi au non-recours à la force et qui n’a en
aucun cas l’intention d’encourager une intervention militaire.
Déclarations
M. BASHAR JA’AFARI (République arabe syrienne) a apprécié l’analyse
détaillée qu’a faite le Président de l’Assemblée générale. Il s’est dit
surpris par un projet de résolution qui s’inscrit dans le point
« Prévention des conflits armés », tout en le contredisant
totalement. Le texte conduira à une escalade de la crise et ne fera
qu’alimenter la violence en Syrie, en créant un précédent dans les relations
internationales puisqu’il cherche à légitimer la fourniture d’armes à des
groupes terroristes. Le représentant a dénoncé la reconnaissance d’une
faction externe de l’opposition comme « représentante légitime du peuple
syrien », alors qu’elle est divisée et qu’elle ne représente pas toute
l’opposition. Il a stigmatisé « une opposition née et nourrie à
Doha ».
Aujourd’hui, a-t-il voulu dévoiler, dès qu’une chance de solution se fait
jour, le rythme et l’ampleur des attaques terroristes augmentent et les États
qui se reconnaîtront multiplient les initiatives pour faire avorter l’approche
politique. Ce projet de résolution en est un exemple évident, a estimé le
représentant, jugeant qu’il va à contre-courant de l’évolution des choses, en
particulier, à la lumière du récent rapprochement russo-américain.
M. Ja’afari a dénoncé les attentats terroristes commis en Syrie
et le fait que des groupes terroristes actifs déclarent publiquement leur
allégeance à Al-Qaida. Il a affirmé que des milliers de terroristes
extrémistes ont été envoyés en Syrie de l’étranger, grâce à l’aide des services
de renseignements de certains États, pour créer un « Khalifat islamiste
et djihadiste ». Il a aussi dénoncé la contrebande d’armes vers
la Syrie, un fait qui a été prouvé. Le représentant a pointé le doigt sur
les mesures unilatérales financières et économiques qui ne font qu’aggraver les
souffrances du peuple syrien. Il a rappelé les enlèvements de religieux
musulmans et chrétiens et la destruction de la plus ancienne synagogue dans la
région de Damas. Les attaques barbares contre des sites archéologiques
nous rappellent la destruction des statues de Bamiyan en Afghanistan, a-t-il
prévenu.
« Il semblerait que la main des rédacteurs du projet de résolution a
tremblé lorsqu’il s’est agi de condamner ces agissements », a-t-il
ironisé, devant un texte qui ne dit pas une seule fois le mot
« terroriste ». Il est clair que la Coalition nationale
des forces de l’opposition et de la révolution syriennesqui ont reçu un siège à
la Ligue des États arabes et les tentatives d’obtenir de l’Assemblée générale
qu’elle octroie « ce faux statut de représentant » à la Coalition
n’ont pour seul objectif que d’affaiblir les institutions syriennes, a-t-il
dit. C’est là une violation grave du droit international et des Chartes
des Nations Unies et de la Ligue des États arabes.
Le représentant a noté que si la Coalition est théoriquement composée de
63 membres, elle n’en compte en réalité que 53, parce que ceux qui ont
inventé cette structure ont laissé 10 sièges aux membres laïques de
l’opposition syrienne qui n’ont toujours pas été trouvés, a-t-il, une nouvelle
fois, ironisé. Il s’est donc étonné que certains États qui prétendent
travailler en faveur de la démocratie en Syrie aient eux-mêmes confisqué le
droit de la population syrienne à choisir ses propres représentants. Ces
États sont plutôt en train d’apporter leurs propres amendements à la
démocratie, amendements selon lesquels un pays peut choisir les représentants
et les dirigeants d’un autre pays, sans que la population concernée n’ait à
intervenir.
Nous avons, a rappelé le représentant, souligné le « rôle
destructeur » de la Ligue des États arabes, qui compte un nouveau membre,
la Turquie. La Ligue a manipulé la mission d’observation arabe en Syrie.
Elle a autorisé ses membres à soutenir et financer les groupes
terroristes en Syrie. Son Représentant spécial conjoint, M. Lakhdar Brahimi,
a déclaré lui-même que cette décision, prise littéralement, rend obsolète le
processus de Genève et impossibles les négociations.
Le représentant syrien a dénoncé la corruption alimentée par les
pétrodollars qataris et saoudiens qui sape la crédibilité de la Ligue des États
arabes. Il s’est dit surpris que des pays comme le Qatar et la Turquie,
qui soutiennent l’extrémisme religieux, se hissent à la tête de l’Alliance des
civilisations, et que le régime saoudien, qui recrute des terroristes, se soit
autant impliqué dans la création du Centre des Nations Unies pour la lutte
contre le terrorisme.
Mon gouvernement, a affirmé le représentant, est sérieux et sincère dans sa
volonté d’arriver à un processus de dialogue national mené par les Syriens
eux-mêmes. Les garanties juridiques et de sécurité sont là pour le retour
des forces de l’opposition externe. La grande majorité des Syriens
rejette la violence et le cœur du problème ne réside pas dans les droits de
l’homme, la situation humanitaire ou la démocratie, mais dans les intérêts
politiques, militaires et économiques. Le représentant a demandé que le
projet de résolution soit mis aux voix et exhorté tous les États Membres à
voter contre.
Il a aussi tenu à illustrer « l’ampleur de la corruption dans certains
bureaux de cette Organisation internationale », en mentionnant un courriel
adressé à différentes personnes haut placées de l’ONU, et envoyé de Doha, par
« l’Ambassadeur » de la Coalition au Qatar. Cet
« Ambassadeur » est la même personne qui a commandité l’enlèvement
des membres philippins de la Force des Nations Unies chargée d’observer le
désengagement(FNUOD), a-t-il dit en citant le contenu du courriel. Or,
personne n’a mentionné ce courriel, a-t-il accusé, alors que c’est un élément
lié à la sécurité des membres de la FNUOD.
M. ABDALLAH YAHYA A. AL-MOUALLIMI (Arabie saoudite) a déclaré
que depuis l’adoption de la dernière résolution sur la Syrie en décembre 2012,
le nombre de morts s’est multiplié. Le Gouvernement syrien utilise la
politique de la terre brûlée contre sa propre population. Il massacre
dans les villages et dans les villes, les réfugiés et les déplacés se comptent
en millions et deviennent un lourd fardeau pour les pays voisins. Des
crimes contre l’humanité sont commis comme les viols, les nettoyages ethniques
et la torture. La crise s’est propagée au-delà de la frontière syrienne
et les perspectives de solution pacifiques s’amenuisent à cause du Gouvernement
syrien. Les deux Représentants spéciaux des Nations Unies et de la Ligue
des États arabes ont tous deux pointé la responsabilité du Gouvernement
syrien. Ils ont aussi estimé que les autorités syriennes ne pouvaient faire
partie de la transition politique.
À ceux qui disent que la résolution est déséquilibrée, le représentant a
conseillé d’aller défendre leur position devant les familles des victimes et
l’opposition syrienne. Les déclarations du représentant de la Syrie ne
contribuent pas à trouver une solution au conflit car, a accusé le
représentant, il essaie de détourner l’attention en disant que le conflit est
nourri par le Qatar et l’Arabie saoudite, et que la Syrie ne fait que se
défendre contre les terroristes. Les 90 000 victimes étaient donc
toutes terroristes? s’est emporté le représentant, en reprochant au
représentant syrien de ne pas avoir parlé de vraie transition dans laquelle
l’intérêt du peuple prévaudrait sur tous les autres. Je vous dis que
voter pour la résolution, c’est voter pour la liberté.
Mme ROSEMARY A. DICARLO (États-Unis) a accusé le régime Al-Assad d’avoir
tué des milliers de civils et fomenté une violence durable qui a provoqué une
crise grave, « aux conséquences de plus en plus terribles pour la Syrie et
la région dans son ensemble ». Elle a évoqué le fardeau économique
et les risques sécuritaires qu’encourent les pays voisins qui accueillent
d’importantes communautés de réfugiés. Elle a parlé de l’initiative
lancée le 7 mai dernier par les États-Unis et la Fédération de Russie pour
promouvoir une solution politique et fait savoir que sa délégation est
favorable à la résolution.
M. Y. HALIT ÇEVIK (Turquie) a constaté que les dynamiques internes
du Conseil de sécurité sont telles que l’Assemblée générale est une fois de
plus appelée à agir à sa place. Il a averti qu’un patrimoine humanitaire
immense est en train d’être détruit et a rappelé qu’il y a 10 jours, les États
Membres avaient poussé les Nations Unies à agir mais sans succès.
L’inaction sera-t-elle la solution aux craintes de la communauté
internationale? a fait mine de s’interroger le représentant pour qui le projet
de résolution est un appel à la conscience de cette communauté
internationale. Le vote de chaque délégation sera considéré soit comme un
signal d’alarme, soit comme un appui cruel au régime syrien.
M. ALEXANDER A. PANKIN (Fédération de Russie) a regretté que
l’Assemblée générale soit saisie d’un projet de résolution
« destructeur » sur la Syrie. Il a accusé les coauteurs
d’ignorer les conséquences de ce texte, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du
pays, et de s’être adonnés à une interprétation étroite de la situation en
Syrie. Il est inacceptable, a estimé le représentant, que la Coalition
nationale des forces de l’opposition et de la révolution syriennes soit
reconnue comme la seule force de l’opposition. Cela revient à ouvrir la
voie à la légitimation de la force et à la militarisation de toute la région,
a-t-il tranché.
Il a dénoncé la « tendance unilatérale » qui consiste à rejeter
la responsabilité de ces évènements tragiques sur le Gouvernement syrien.
Il s’est inquiété de ce que l’on ignore l’aide financière et logistique
extérieure aux groupes de l’opposition et les résultats des enquêtes sur les
violations des droits de l’homme perpétrées par ces derniers.
Il a évoqué la présence d’Al-Qaida dans les forces de l’opposition et
s’est dit préoccupé du fait que le projet de résolution présente la situation
comme une guerre entre le Gouvernement et son peuple, « comme si les
groupes terroristes n’étaient responsables de rien ». Ce texte met
en péril les efforts déployés par le Représentant spécial conjoint et
l’initiative lancée par son pays et les États-Unis à Genève, « les seules
bases à partir desquelles une solution à la crise doit être trouvée ».
Le représentant a voulu que la prochaine conférence sur la Syrie soit
représentative et inclue tous les acteurs qui étaient l’année dernière à la
rencontre de Genève. C’est sur le dialogue qu’il faut se fonder pour
trouver une issue à la crise et non pas sur une interprétation étroite de la
situation, a souligné le représentant, avant d’exhorter les délégations à voter
contre ce projet de résolution.
M. LI BAODONG (Chine) a exprimé sa préoccupation face à la violence
contre les civils, estimant que la méthode militaire n’apporterait pas de
solution à la crise. Il a demandé à la communauté internationale de
respecter l’intégrité territoriale de la Syrie et le principe de non-ingérence
dans les affaires internes d’un État. Il s’est opposé à toute
intervention militaire en Syrie et à l’imposition d’un changement de régime par
l’extérieur. La solution politique est la seule voie de sortie, a-t-il
insisté, en exhortant toutes les parties à mettre fin à la violence et à
trouver une solution politique le plus rapidement possible. Concernant le
projet de résolution, il a demandé aux coauteurs de tenir compte de la position
des différentes parties au conflit, tout en disant comprendre le rôle de la
Ligue des États arabes.
M. GÉRARD ARAUD (France) a
renoncé à lire son discours préparé pour se limiter à l’approche « d’un
modeste diplomate ». Soyons pragmatiques et dépassons les
caricatures, devant un pays qui est en train de s’effondrer et qui, avec 80 000
morts, risque d’entraîner toute une région dans la crise, a-t-il dit. Il
a rappelé que c’est en raison du blocage du Conseil de sécurité que les membres
de la Ligue des États arabes, en particulier le Qatar, se présentent à
l’Assemblée générale aujourd’hui, dans « une démarche un peu désespérée du
fait de l’impuissance du Conseil de sécurité ».
À ceux qui jugent le texte déséquilibré,
le représentant a répondu que de nombreux paragraphes condamnent les violations
commises par les deux côtés. « Il aurait également fallu parler du
terrorisme d’État car le terrorisme d’Al-Assad utilise des bombes à
sous-munitions et utilise des missiles balistiques contre des quartiers
civils », a-t-il ajouté. Le régime syrien est le premier responsable
de violations massives des droits de l’homme par l’utilisation d’armes,
certaines interdites d’ailleurs, contre des populations civiles, a-t-il
tranché.
S’agissant de la Coalition nationale
syrienne comme le seul représentant de l’opposition, il a répondu « Et
oui, nous reconnaissons la Coalition comme interlocuteur pour une transition
politique ». Il a dénoncé une certaine hypocrisie consistant à dire
d’un côté que « l’opposition est divisée et incapable de négocier »
et de l’autre qu’il est dangereux de travailler à créer une organisation
« parapluie » qui réunisse toutes les tendances de l’opposition afin
qu’elle puisse négocier dans le cadre d’une transition politique.
Ce texte encourage la solution politique
parce qu’il apporte le soutien de la communauté internationale à la création de
la Coalition nationale syrienne, « de cet interlocuteur dont nous avons besoin »,
« parce que pendant 50 ans le régime de Al-Assad a tué, a torturé et
a emprisonné toutes les oppositions. Parce que cette opposition est
fragmentée, impuissante, nous devons l’aider à travailler ensemble afin de
pouvoir négocier, afin de pouvoir aller à Genève », a plaidé le
représentant.
Il a appelé les délégations à regarder le
texte honnêtement et à reconnaître que, contrairement à ce qui a été dit, le
Représentant permanent du Qatar a mené des consultations avec tous les groupes
géographiques et a essayé de répondre à leurs préoccupations. Le texte
est « modéré » et aidera la Coalition nationale syrienne et les
forces d’opposition syriennes à aller à la négociation, s’est déclaré convaincu
le représentant.
M. JEREMIAH NYAMANE KINGSLEY MAMABOLO(Afrique du Sud) a déclaré
qu’après deux ans de crise, il est regrettable qu’il y ait peu d’espoir que
l’on parvienne à une solution en Syrie. La situation échappe à tout
contrôle et la communauté internationale est plus que jamais divisée.
L’Afrique du Sud, a-t-il dit, condamne le recours aux armes chimiques d’où
qu’il vienne et appelle à des négociations entre toutes les parties. Le
représentant a imputé l’échec du Conseil de sécurité à trouver une solution à
la crise aux États qui ont voulu faire prévaloir des intérêts nationaux.
Aussi, l’Afrique du Sud exhorte-t-elle le Conseil à trouver rapidement une
solution à ce conflit car il n’y a pas de solution militaire à la crise.
L’Afrique du Sud est attachée à la souveraineté et à l’intégrité territoriale
de la Syrie et regrette que l’opposition ne veuille pas négocier.
S’agissant du projet de résolution, il s’est dit déçu devant un texte qui
pourrait aggraver la situation car il appuie clairement une partie au conflit
et risque de pousser le Président Assad à durcir encore sa
position. En deux ans de conflit, a fait observer le représentant,
l’opposition n’a jamais appelé à la fin des opérations militaires. Plutôt
que d’envoyer de l’argent à l’opposition pour qu’elle s’arme, il faudrait plutôt
le consacrer à l’assistance à la population, a-t-il estimé. Le
représentant a ajouté que cette résolution pourrait créer un précédent
dangereux et déploré que certains États pensent pouvoir dicter leur desiderata
à d’autres États. Il a jugé curieux que la résolution soit présentée
aujourd’hui alors même que la Fédération de Russie et les États-Unis ouvrent
une fenêtre aux négociations. L’Afrique du Sud est déçue que l’on ait
rejeté la proposition du Groupe des États d’Afrique qui a demandé le report du vote.
Le processus n’a pas été inclusif et l’Afrique du Sud n’appuiera pas ce projet
qui, par ailleurs, n’a pas non plus tenu compte des propositions de l’Inde et
du Brésil auxquelles elle avait souscrit.
M. MOHAMMAD KHAZAEE (République islamique d’Iran) a estimé que le
texte met à mal tous les efforts déployés jusqu’à présent pour trouver une
issue à la crise syrienne. Il a jugé ironique le fait qu’il ne mentionne
pas les récentes frappes israéliennes en Syrie, « des actes patents
d’agression ». Il s’est inquiété du fait que le texte privilégie la
confrontation plutôt que le dialogue entre les parties. Ce texte, a-t-il
dit, appuie des décisions qui ont été prises à l’extérieur des Nations Unies
ainsi que des cadres et des initiatives qui ne correspondent pas à l’action
pacifique que devrait lancer l’ONU, notamment le Groupe d’action de Genève pour
la Syrie.
Le texte, a encore accusé le représentant, cherche à modifier de manière
illégitime le mandat du Représentant spécial conjoint et représente un précédent
dangereux qui viole les principes les plus élémentaires du droit
international. Certains groupes armés de l’opposition ont des armes
chimiques mais le texte ne reconnait pas de manière explicite la responsabilité
de ces groupes armés qui s’adonnent à des actes de violence atroces. Le
représentant n’a pas adhéré à un texte qui viole l’autorité de l’Assemblée
générale, en faisant explicitement référence aux procédures de la Cour pénale
internationale.
M. SACHA SERGIO LLORENTTY SOLÍZ (Bolivie) a pris exemple sur son
homologue de la France en ne lisant pas son discours mais en soulignant le
nombre impressionnant de morts innocents en Syrie depuis le début de la
crise. Il a rappelé que pas plus tard qu’hier, une vidéo montrait un
dirigeant rebelle arracher le cœur d’un soldat syrien et inviter ses collègues
à le manger. La Bolivie s’oppose à ce projet de résolution, tout d’abord
pour des raisons de forme, a-t-il annoncé. Il a regretté l’absence de
consultations au sens large sur ce texte. Il a aussi remarqué que ce
projet est présenté au moment même où une ouverture s’annonce avec le processus
russo-américain initié récemment. On ne peut pas éteindre un incendie en
mettant de l’huile sur le feu, a-t-il prévenu, en disant craindre que ce projet
n’entrave les efforts de paix en cours.
Le texte manque d’équilibre et démontre un certain parti pris. On n’y
désigne jamais de manière explicite les violations commises par les groupes
d’opposition. Dénonçant les intérêts géopolitiques dans la région, le
représentant a estimé que le texte serait le triomphe de l’ingérence et
militarisme, au détriment du principe de souveraineté et de la solution
politique. Nous voyons aussi, a avoué le représentant, une tentative de
saper l’autorité morale de l’ONU.
M. GUILLERMO ENRIQUE MORENO ZAPATA (Venezuela) a regretté que
l’Assemblée générale soit saisie de ce texte alors qu’il existe déjà une
« alternative extraordinaire » qui est la rencontre prévue à
Genève. Le Venezuela ne peut que voter contre un texte qui fait le pari
de la guerre au lieu de promouvoir la paix. Le texte viole la
souveraineté et l’intégrité territoriale de la Syrie et attribue au
Gouvernement syrien et au Président Al-Assad seuls le climat de violence
et d’instabilité qui prévaut dans le pays. Nous avons un texte, a
poursuivi le représentant, qui ignore les appels au dialogue politique lancés
par le Gouvernement syrien, qui bloque les efforts de médiation du Représentant
spécial conjoint pour la Syrie et qui ignore les actes terroristes perpétrés
par les groupes armés de l’opposition.
Le représentant a averti qu’une reconnaissance éventuelle de la Coalition
nationale des forces de l’opposition et de la révolution syriennes en tant que
représentant légitime du peuple syrien encouragera une
« radicalisation » des « postures déjà extrêmes » des
groupes armés de l’opposition. Il est inacceptable, s’est–il insurgé,
que l’on cherche à accorder une reconnaissance internationale à des auteurs
d’actes terroristes.
Le texte, a-t-il insisté, cherche à disputer au Gouvernement syrien et à son
Représentant auprès des Nations Unies leur légitimité. Le seul
représentant légitime de la population syrienne est le Gouvernement du
Président Al-Assad et la seule transition possible sera celle qui sera
déterminée par le peuple syrien lui-même, a souligné le représentant pour qui
l’adoption de cette résolution reviendrait à justifier l’incitation, depuis
l’étranger, à la violence et au terrorisme.
Il a également estimé que cette résolution cherche à légitimer le droit de
certains États à fournir aux membres de l’opposition les moyens de renverser le
Gouvernement syrien. Il s’agit en fait d’appuyer les flux illégaux
d’armes et le financement du terrorisme, s’est-il inquiété. L’adoption de
cette résolution risque de faire dérailler les efforts du Représentant spécial
conjoint, a-t-il insisté, une nouvelle fois, avant de se féliciter de la tenue
prochaine, à Genève, d’une réunion entre les États-Unis et la Fédération de
Russie, y voyant là un signe positif pour la paix et la stabilité en Syrie.
M. HUSSEIN HANIFF (Malaisie) a dénoncé la paralysie de la communauté
internationale qui aggrave la violence et la crise en Syrie. Il n’y a pas
de solution militaire. Il a appelé toutes les parties à adhérer aux
efforts du Représentant spécial conjoint des Nations Unies et de la Ligue des
États arabes. La Malaisie maintient sa politique de non-ingérence et
estime qu’il existe une chance de trouver une solution. Elle appuie donc
la résolution et se félicite de l’annonce faite par la Fédération de Russie et
les États-Unis de convoquer une conférence internationale pour trouver une
issue au conflit syrien.
M. TUVAKO NATHANIEL MANONGI (République-Unie de Tanzanie) a appelé
les États Membres à engager le Conseil de sécurité à prendre toutes les mesures
nécessaires pour instaurer la paix en Syrie, avertissant que tout échec en la
matière provoquera « une catastrophe d’une amplitude
inimaginable ». Il a exhorté les membres du Conseil de sécurité à
mettre leurs différences de côté et à s’accorder sur la voie à suivre. Il
a également estimé que l’on devait donner une chance aux récents efforts
déployés dans le cadre du Communiqué final de juin 2012 du Groupe d’action pour
la Syrie. Ma délégation ne peut que s’abstenir, a-t-il indiqué.
Explications de vote avant le vote
Le représentant de la République populaire démocratique de Corée a
expliqué que la situation en Syrie devrait être résolue sur le principe de la souveraineté,
un élément fondamental des relations internationales. Le Gouvernement
syrien a été élu de manière démocratique, a-t-il observé, avant d’attirer
l’attention sur les attaques d’Israël qui ont été encouragés par les
États-Unis. Il s’agit là d’une violation grave du droit international et
de la souveraineté de la Syrie et laisser commettre ces graves violations sans
en débattre au Conseil de sécurité a une incidence désastreuse sur la
crédibilité et le mandat de cet organe, a-t-il averti. Il a estimé que la
crise en Syrie doit être résolue par la population syrienne elle-même,
dénonçant encore l’ingérence extérieure. Il a prôné un dialogue politique
inclusif et a annoncé le vote négatif de sa délégation.
Le représentant de l’Uruguay s’est également abstenu, sans pour
autant cacher les graves préoccupations que lui inspire la situation en
Syrie. Il a affirmé que son abstention est un acte de prudence, certains
éléments de la résolution, a-t-il constaté, n’ayant rien à voir avec des préoccupations
humanitaires. Il a également averti du risque que ce texte n’entrave la
voie vers une issue pacifique. La saisine de la justice pénale
internationale s’impose pour mettre un terme à l’impunité et à l’horreur, a
affirmé le représentant, qui a fait savoir que sa délégation avait adressé au
Conseil de sécurité une lettre allant dans ce sens. La Syrie risque de
devenir la pire crise humanitaire de ce début de siècle et il faut un mettre un
terme à cette situation avant que l’opprobre et la honte ne nous submergent.
Pour la représentante du Nicaragua qui a voté contre le
projet de résolution, il s’agit d’un texte partial, déséquilibré qui ne cherche
pas une solution politique et pacifique et qui fait le pari de la guerre.
C’est un texte contre-productif qui fait fi des négociations entre la Fédération
de Russie et les États-Unis à l’issue desquelles ces derniers ont appelé à une
conférence internationale censée jeter les bases d’une solution pacifique
durable en Syrie. La représentante a dénoncé l’absence de transparence
dans les négociations de ce texte qui voudrait pousser les États Membres à
accepter une politique d’agression. Ce texte rejette toute solution
pacifique à la crise, a estimé la représentante, qui a ajouté qu’il prétend
changer le régime en faveur d’intérêts étrangers qui se servent d’une
opposition incapable de s’unir.
Ce texte risque de créer un précédent car il viole la Charte des Nations
Unies qui privilégie la recherche de la paix, de la stabilité et du respect de
la souveraineté des États. Le texte, a tranché la représentante, est une
entrave aux efforts du Représentant spécial conjoint. Il appelle à la
course aux armements et à la guerre. Le Nicaragua s’oppose à l’ingérence
dans les affaires internes des États et aux appels au changement de régime dans
un État Membre. Il faut donner la chance à la paix et rejeter la guerre,
a-t-elle conclu.
Le représentant de l’Indonésie a réitéré sa préoccupation face
au conflit et à ses incidences sur la population. Il a jugé essentiel que
toutes les parties belligérantes respectent les droits de l’homme et le droit
humanitaire. Il est tout aussi essentiel que toutes les parties tentent
de trouver une solution pacifique par un processus dirigé par les Syriens
eux-mêmes. Il s’est félicité de ce que le texte mette l’accent sur
l’accès humanitaire mais a jugé que la reconnaissance d’une représentation de
l’opposition syrienne n’est pas compatible avec le principe selon lequel cette
reconnaissance n’est applicable qu’aux États. Il ne faudrait pas saper
les fondements du droit international et le principe de non-ingérence, a-t-il
prévenu, en appelant l’Assemblée générale et le Conseil de sécurité à rester
unis pour mettre fin immédiatement aux violences en Syrie. Le
représentant a voté l’abstention.
Le représentant de l’Équateur a estimé, à son tour, que le
texte actuel ne fera qu’entraver les efforts pour restaurer la paix en
Syrie. Le projet de résolution ne tient pas suffisamment compte des
responsabilités des parties au conflit et polarise la situation de manière
excessive. Il a dénoncé la politique de deux poids deux mesures d’un
texte qui ignore, a-t-il affirmé, les actes terroristes perpétrés en
Syrie. Ce projet est contraire au Communiqué de Genève et fait fi de l’accord
conclu le 7 mai dernier entre la Fédération de Russie et les États-Unis.
On ne peut pas, a-t-il tranché, institutionnaliser des décisions prises par la
Ligue des États arabes alors que la majorité des États Membres de l’ONU n’en
font pas partie. Il faut éviter que l’Assemblée générale ne se transforme
en « scène de coup d’État international ». L’Équateur a voté
contre le texte.
La représentante de l’Argentine s’est abstenue lors du vote car
elle a dit voir dans la crise syrienne, la responsabilité de certains pays
hégémoniques qui pourraient pourtant exercer leur influence pour la recherche
d’une solution au conflit. Il n’y aura pas de paix si l’on ne respecte
pas la vérité et si les mêmes normes ne sont pas appliquées à toutes les
parties. Face à la catastrophe humanitaire et à la propagation de la
guerre en Syrie, l’Argentine ne peut que souscrire à certaines dispositions de
la résolution. Mais, elle insiste sur le fait que la solution reste et
demeure des négociations inclusives entre toutes les parties prenantes.
La représentante a, à son tour, dénoncé le fait de désigner la Coalition de
l’opposition syrienne comme étant la représentante légitime de l’opposition.
Il appartient au peuple syrien de désigner ses représentants et non à
l’Assemblée générale, a-t-elle tranché. Elle a aussi dénoncé l’absence
d’appel clair à la fin de la militarisation de la guerre et regretté, à son
tour, que ce vote ait lieu au moment même où les États-Unis et la Fédération de
Russie se sont mis d’accord pour une conférence internationale sur la
Syrie.
Le représentant de Cuba a, à son tour, dénoncé le parti
pris du texte. Inciter à une guerre civile et à l’intervention d’une
force étrangère pourrait avoir des conséquences graves pour toute l’humanité,
a-t-il averti. Tous les actes terroristes doivent cesser, a-t-il dit, en
appelant aussi les médias à arrêter de manipuler l’opinion publique avec ses
reportages sur les événements en Syrie. Nous devons une tentative de
saper l’intégrité, la souveraineté et l’indépendance de la Syrie. La
communauté internationale ne doit pas inciter à la violence mais au contraire
favoriser la paix, a-t-il tranché.
« La diplomatie se tait et les armes parlent », s’est écrié le
représentant du Pakistan pour qui la Syrie est une
« bombe à retardement » annonciateur d’un conflit beaucoup plus
large. Il faut agir avec urgence sur le plan diplomatique et trouver une
issue à l’impasse du Conseil de sécurité. Le représentant s’est félicité
de l’initiative lancée par les États-Unis et la Fédération de Russie et a
appelé les parties au conflit à prendre part au dialogue. Il a également
appelé les pays de la région à jouer un rôle important pour sortir le pays du
conflit et réclamé un embargo sur les armes. Le Pakistan a voté pour, a
dit le représentant, tout en indiquant qu’il aurait souhaité un texte plus
équilibré qui prenne davantage en compte la montée du terrorisme en
Syrie. Il s’est par ailleurs opposé à ce que la Cour pénale
internationale soit saisie de la situation en Syrie.
Explications de vote après le vote
La représentante du Brésil a dit appuyer un certain nombre
de messages de la résolution. Elle a souligné la nécessité d’une solution
négociée à la crise dans le cadre du Communiqué de Genève. Les Nations
Unies devraient d’ailleurs s’efforcer de contribuer à la mise en place d’un environnement
favorable à la compréhension entre toutes les parties syriennes et la présente
résolution ne contribue pas à la création d’un tel environnement. En
dépit des négociations, le texte présente des lacunes s’agissant d’éléments que
le Brésil considère utiles pour que le message de l’Assemblée générale ait un
impact sur le terrain. Le fait que le texte ne lance pas d’appels clairs
à la démilitarisation du conflit est injustifiable. L’Assemblée générale
ne doit pas être timide. Elle doit dire clairement qu’il n’y a pas de
solution militaire à la crise.
L’absence d’une telle déclaration affaiblit l’espoir de voir la communauté
internationale mettre un terme à ce conflit par la diplomatie. La
résolution aurait dû également comporter les conclusions de la Commission
internationale indépendante chargée d’enquêter en Syrie qui a attiré
l’attention sur les effets paralysants des sanctions sur la population
syrienne. Elle a aussi recommandé à la communauté internationale de
freiner la prolifération des armes en Syrie. Il n’appartient pas à
l’Assemblée générale de dire qui des parties au conflit est la plus légitime
pour représenter l’opposition syrienne, a tranché la
représentante.
Le représentant de l’Inde s’est inquiété du fait que des Casques
bleus aient été pris récemment pour cible par des groupes rebelles et a exhorté
les parties au conflit à renoncer à la violence. Il a fait savoir que son
gouvernement avait octroyé 2,5 millions de dollars à l’aide humanitaire en
Syrie. Il s’est félicité de l’initiative lancée par la Fédération de
Russie et les États-Unis pour inciter les parties au dialogue et a souligné que
l’avenir de la Syrie doit être défini par les Syriens eux-mêmes qui doivent
aussi juger eux-mêmes les crimes commis au cours du conflit. Il a précisé
que sa délégation s’est abstenue lors du vote.
Le représentant du Chili a voté en faveur de la résolution
sur la situation en Syrie où une crise humanitaire s’ajoute à un conflit
meurtrier. Le Chili condamne les violations massives et systématiques des
droits de l’homme par le Gouvernement et les autres parties au conflit.
Il juge important de condamner la violence et de traduire en justice ses
auteurs. Pour le Chili, la résolution devrait contribuer à la mise en
œuvre effective du Communiqué de Genève qui prévoit notamment un processus
politique conduit par les Syriens eux-mêmes. Il considère aussi qu’il
n’appartient pas à l’Assemblée générale de légitimer la Coalition nationale de
l’opposition. Il faut mettre un terme à la militarisation du conflit,
s’est impatienté le représentant, en prévenant que cette alternative est sans
issue. Il faut des négociations pour trouver une solution au conflit et
le vote de l’Assemblée générale doit contribuer à l’initiative des États-Unis
et de la Fédération Russie de convoquer une conférence internationale sur la
Syrie.
Le représentant de Singapour a condamné l’usage aveugle de
la violence en Syrie qui a causé un grand nombre de morts et de déplacés parmi
la population. La situation en Syrie est très complexe et nous demandons
à toutes les parties de cesser la violence, a-t-il dit. Il a rappelé que
sa délégation avait voté en faveur des deux résolutions précédentes mais que
cette fois-ci elle avait dû s’abstenir pour ne appuyer un texte qui reconnaît
une coalition comme représentant légitime du peuple syrien.
Le représentant du Guatemala a voté en faveur de la
résolution même si, a-t-il avoué, certains de ses éléments étaient une source
de préoccupations pour sa délégation. Il a souligné que son gouvernement
n’a pas reconnu la Coalition nationale en tant que représentant légitime du
peuple syrien. Il a estimé que le texte aurait dû mettre davantage
l’accent sur la démilitarisation du conflit.
Le représentant du Costa Rica a voté en faveur de la
résolution car, a-t-il expliqué, sa délégation juge indispensable d’envoyer un
message clair aux autorités syriennes sur la nécessité de mettre un terme à la
tragédie que connait la Syrie. Il s’est félicité de l’accord conclu entre
les États-Unis et la Fédération de Russie pour tenir une conférence
internationale qui ouvrirait la voie vers une transition pacifique en
Syrie. Le représentant a exhorté les autorités syriennes et l’opposition
armée ainsi que tous les pays directement ou indirectement liés au conflit, à
respecter le droit international humanitaire.
La représentante de la Thaïlande, qui a appuyé la résolution, a
émis des réserves quant à la façon de désigner les représentants du peuple
syrien. Il appartient uniquement au peuple syrien de désigner ses
représentants. La crise en Syrie ne peut être résolue que par la
négociation. Condamnant les actes de violences et les violations des
droits de l’homme dans ce pays, la représentante a voulu que les auteurs de ces
actes et de ces abus n’échappent pas à la
justice.
Le représentant de la Suisse a demandé que le conflit en
Syrie soit réglé par la voie politique, soutenant les efforts diplomatiques
entrepris pour mettre un terme à la violence. Il a soutenu l’initiative
russo-américaine ainsi que la mission du Représentant spécial conjoint.
Dans la même logique, il a salué la création de la Coalition nationale, en
précisant tout de même que cette résolution n’équivaut pas à une
reconnaissance, car la Suisse a pour habitude de reconnaître des États et non
des gouvernements. Le représentant a condamné les violations des droits
de l’homme en Syrie, rappelant que la communauté internationale a la
responsabilité de faire en sorte que ces crimes soient poursuivis si l’État
concerné n’est pas en mesure de le faire ou ne le fait pas. Il a estimé
qu’une référence plus explicite à la Cour pénale internationale aurait été
utile, comme beaucoup l’ont demandé auparavant, notamment la Haut-Commissaire des
Nations Unies aux droits de l’homme. Il a rappelé que son pays avait
présenté une pétition à ce sujet, le 14 janvier dernier, laquelle a été signée
par 58 États.
Le représentant du Pérou a indiqué que sa délégation avait
voté en faveur du texte de la résolution, mais que ce vote ne doit pas être
interprété comme une reconnaissance de la Coalition nationale des forces de
l’opposition et de la révolution syriennes. C’est au peuple syrien que
revient la responsabilité d’accorder cette reconnaissance, a-t-il
tranché.
Le représentant du Paraguay, qui s’est abstenu, a rappelé que
son pays avait pourtant voté en faveur des résolutions précédentes sur la
Syrie. Mais cette fois, le Paraguay n’a a eu d’autres choix que de
s’opposer à l’ingérence dans les affaires internes d’autres États Membres.
Dans son action, l’Assemblée générale doit rester conforme à la Charte des
Nations Unies.
La représentante de la Serbie a appuyé le principe du
règlement pacifique des différends et soutenu la voie d’un dialogue politique
qui serait mené par les Syriens. Elle s’est félicitée de l’annonce faite
par les États-Unis et la Fédération de Russie.
La représentante de la Jamaïque a jugé urgent de trouver
une issue pacifique à la crise et de lancer un processus inclusif à cette
fin. Elle a formulé l’espoir que la conférence internationale sur la
Syrie, qui sera organisée par les États-Unis et la Fédération de Russie,
permettra de tracer la voie. Elle s’est néanmoins inquiétée du fait que
la question de la transition politique telle qu’évoquée dans la résolution ne
soit interprétée comme un appui aux sanctions. Elle a indiqué que
l’abstention de sa délégation ne doit nullement être interprétée comme une
forme de mépris vis-à-vis de la situation qui prévaut en Syrie.
La représentante du Mexique, qui a voté en faveur de la
résolution, a voulu que l’Assemblée générale envoie un message clair au peuple
syrien. Mais le Mexique aurait souhaité que le processus de consultation
soit plus transparent et plus inclusif pour permettre une adoption universelle.
On aurait dû tenir compte des rapports de la Commission internationale
d’enquête sur les violations des droits de l’homme en Syrie. Le Mexique
exige que les auteurs de ces violations soient poursuivis en justice et qu’ils
ne bénéficient d’aucune impunité. Quant à la Coalition nationale, elle a
tranché en ces mots: il appartient au peuple syrien de désigner ses
représentants.
Le représentant de la Colombie a indiqué que sa délégation
avait voté en faveur de cette résolution pour manifester son rejet catégorique
de la violence. Ce n’est que grâce à un dialogue inclusif qu’il sera
possible d’avancer vers une transition politique qui permettra d’instaurer une
véritable démocratie dans le pays, a-t-il noté. La Colombie considère
qu’il revient aux citoyens syriens de déterminer la légitimité de leurs
représentants, a-t-il dit. Il a estimé que la résolution ne peut être
interprétée ni comme une reconnaissance de la Coalition nationale ni comme un
encouragement à l’opposition syrienne.
Le représentant du Liechtenstein s’est félicité de
l’action de l’Assemblée générale, étant donné que le Conseil de sécurité ne
s’est pas montré à la hauteur de ses responsabilités. Il a tout de même
avoué avoir été dérangé par le manque de transparence qui a entouré la
rédaction de ce texte.
Le représentant de Trinité et Tobago a indiqué que son
pays s’est abstenu parce que le texte ne donne pas suffisamment d’assurance sur
la recherche d’une solution pacifique. Il a aussi déploré l’absence de
transparence lors du processus de négociation qui a en fait exclu de nombreux
pays. Il a estimé que les violations des droits de l’homme et les
violences en Syrie sont à mettre à l’actif tant des autorités syriennes que de
l’opposition. On ne peut pas mettre ces actes sur le dos d’une seule des
parties, a justifié le représentant.
Déclarations
Le représentant de l’Union européenne a appuyé une résolution
qui souligne une fois encore l’urgence de trouver une solution politique à la
crise. Il a rappelé la nécessité de respecter la souveraineté et
l’intégrité des pays voisins de la Syrie et a condamné leur violation par des
acteurs étatiques ou non étatiques. L’Union européenne salue et appuie
l’appel conjoint des États-Unis et de la Fédération de Russie de convoquer une
conférence internationale sur la Syrie aussitôt que possible, conformément au
Communiqué de Genève de juin 2012. Amener les deux parties à la table de
négociation est l’unique moyen de faire démarrer le processus politique.
L’Union européenne espère qu’elles saisiront cette occasion et montreront
plus de souplesse pour permettre le début du dialogue et du vrai processus de
paix. L’Union européenne salue le fait que la résolution désigne la
Coalition de l’opposition comme étant un interlocuteur valable. L’Union
reste engagée à appuyer la Coalition dans ses efforts pour être plus inclusive
et plus démocratique et appelle toute l’opposition à respecter les droits de
l’homme, l’inclusivité et la démocratie. Elle réaffirme qu’il n’y
aura pas d’impunité pour ceux qui ont commis des violations et des abus et
reste extrêmement préoccupée par les allégations d’utilisation d’armes
chimiques en Syrie. Il est important que toutes les parties prenantes
coopèrent pleinement aux enquêtes et permettent un accès sans entrave à la
mission d’enquête.
L’observateur du Saint-Siège a souhaité que ceux qui sont
en position de le faire exercent leur influence sur les parties au conflit et
les exhortent à cesser immédiatement le bain de sang et les violations des
droits de l’homme. Il a plaidé pour l’implication de tous les partis
politiques et de toutes les composantes de la société civile, y compris les
représentants des groupes religieux. Le nonce s’est aussi inquiété de la
catastrophe humanitaire en Syrie qui pourrait avoir des répercussions sur la
communauté internationale toute entière. Il a demandé aux parties au
conflit d’assumer leurs obligations en vertu du droit international humanitaire
en garantissant un accès sûr à la population dans le besoin. Il a enfin
exprimé le souhait que tous les Syriens puissent retrouver une coexistence
pacifique et harmonieuse, comme cela a été la marque de la société syrienne
pendant des siècles. Il a également demandé la libération des personnes
kidnappées par les groupes armés, notamment les évêques PaulYazigi de
l’Église grecque orthodoxe et Mar Gregorios Yohanna Ibrahim de
l’Église orthodoxe syriaque.
Le représentant des Bahamas s’est joint à l’appel de la
résolution pour que soit mis fin immédiatement aux violences en Syrie et aux
violations des droits de l’homme. Il s’est félicité de ce que la
résolution réaffirme son appui au Représentant spécial pour la Syrie, à la
Ligue des États arabes et à tous les efforts diplomatiques visant une solution
pacifique. Il a estimé que la résolution donne un appui au peuple de la
Syrie, même si elle aurait pu être plus équilibrée. Un vote favorable ne
veut pas dire qu’on souhaite une ingérence dans les affaires internes d’un
pays, a-t-il précisé.
Reprenant la parole, le représentant de la Syrie a
regrettée l’adoption d’une résolution « préjudiciable et
déséquilibrée ». Il a remercié les délégations qui s’y sont opposées
et dit avoir entendu dans certaines interventions le vœu de voir se perdurer la
crise en Syrie. Mais, s’est-il réjoui, la communauté internationale
semble saisir de mieux en mieux la complexité de la situation qui prévaut dans
son pays.
Le représentant a, une nouvelle fois, accusé l’Arabie saoudite et la
Turquie de continuer de financer le « terrorisme djihadiste transnational ».
Il a affirmé que les services secrets qataris étaient impliqués dans
l’enlèvement d’un bataillon de Casques bleus philippins en Syrie et que des
membres du Secrétariat de l’ONU étaient au courant de ces faits. Il a
qualifié d’étrange le fait que le Secrétariat remercie le Qatar pour sa
participation à la libération de ces personnes. Comment un pays peut-il
avoir une influence aussi considérable sur des groupes terroristes s’il n’est
pas considérablement impliqué auprès de ces groupes? a relevé le représentant.
Il a dénoncé les erreurs de la déclaration de l’Arabie saoudite et accusé
la France d’avoir empêché le Conseil de sécurité de publier les nombreux
communiqués rédigés pour condamner publiquement les attaques terroristes en
Syrie et la tentative d’assassinat dont a été l’objet le Premier Ministre
syrien. Le représentant a fait observer que 3 000 agents des services de
renseignement avaient été mobilisés pour cette tentative. Si la lutte
contre le terrorisme est légale en France, elle l’est également ailleurs, a
rétorqué le représentant, en dénonçant « l’hypocrisie française ».
Source : ONU
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