12 septembre 2013

ACTU : Un rapport de l’ONU accuse de crimes les forces gouvernementales syriennes et l'opposition armée

Thierry RANDRETSA

Une commission d'enquête mandatée par l'Organisation des Nations Unies sur les atteintes aux droits de l'Homme en Syrie dénonce, dans un rapport rendu public le 11 septembre, des "crimes contre l'humanité" commis par les forces gouvernementales et des "crimes de guerre" perpétrés par l'opposition armée.
L'enquête porte sur une période allant du 15 mai au 15 juillet 2013. Le rapport n'aborde donc pas l'attaque chimique survenu le 21 août 2013 dans les faubourgs de Damas, et qui est au cœur des discussions internationales sur l'éventualité de frappes militaires.

Selon les enquêteurs missionnés par l'ONU, d'un côté, les forces syriennes ont massacré des civils, bombardé des hôpitaux et commis d'autres crimes de guerre pour gagner du terrain. De l'autre, des rebelles et des combattants étrangers venus leur prêter main forte ont également commis des crimes, tels qu'exécutions sommaires, prises d'otages et bombardements de zones civiles, ajoutent-ils.

"Les forces du Gouvernement et de ses partisans ont continué de lancer des attaques généralisées contre la population civile, commettant meurtres, tortures, viols et disparitions forcées constitutifs de crimes contre l'humanité", peut-on lire. Mais "les groupes armés antigouvernementaux ont commis des crimes de guerre, notamment des meurtres, des exécutions sans procédure régulière, des actes de torture, des prises d'otages et des attaques contre des objets protégés". Le rapport mentionne aussi l'utilisation d'enfants soldats par les groupes de l'opposition armée et par les Kurdes.

258 entretiens avec des réfugiés et déserteurs

Une vingtaine d'enquêteurs ont conduit 258 entretiens avec des réfugiés, des déserteurs et d'autres personnes au Proche-Orient et à Genève, par l'intermédiaire du service de téléphonie numérique Skype. Il s'agit du onzième rapport sur ce thème en deux ans, mais les enquêteurs n'ont toujours pas eu accès au territoire syrien malgré des demandes répétées. Le rapport prône une solution politique à la guerre civile en Syrie et appelle les Etats "à cesser les envois d'armes afin de dissiper le risque qu'elles soient utilisées pour commettre des infractions graves au droit international".

"Les auteurs de ces violations et de ces crimes, quel que soit leur bord, ont agi en violation du droit international. [...] Il est impératif de les traduire en justice", ajoute le président de la commission d'enquête, Paulo Pinheiro. Dirigée par quatre juristes internationaux, la commission d'enquête soumettra le 16 septembre ce rapport au Conseil des droits humains des Nations Unies pour qu'il soit ensuite adressé au Conseil de sécurité.

Les armes chimiques en question

La commission mentionne, par ailleurs, sans pouvoir les confirmer, "des allégations [...] concernant l'utilisation d'armes chimiques, principalement par les forces gouvernementales". "Sur la base des éléments de preuve actuellement disponibles, il n'a pas été possible de parvenir à une conclusion quant aux agents chimiques utilisés, leur système vecteur ou les auteurs de ces actes. Les enquêtes se poursuivent", consigne le rapport.

Des inspecteurs de l'ONU se sont rendus en Syrie, dans une zone proche de Damas, pour enquêter sur un éventuel usage d'armes chimiques le 21 août 2013, et y ont rencontré des médecins et des victimes présumées. L'attaque aurait provoqué la mort de plusieurs centaines de personnes. 

Sources : AFP/Reuters/Le Monde




« Syrie : la Commission d'enquête de l'ONU exhorte à une solution politique au conflit », Centre d’actualité de l’ONU, 11 septembre 2013

Les forces gouvernementales syriennes et ses partisans ont continué de lancer des attaques généralisées contre la population civile, commettant meurtres, tortures, viols et disparitions forcées constitutifs de crimes contre l'humanité, conclut le 11 septembre un organisme des droits de l'Homme des Nations Unies, pour lequel il n'existe pas de solution militaire au conflit.

Dans son dernier rapport publié le 11 septembre, la Commission internationale d'enquête sur la Syrie déclare que «l'échec à parvenir à un règlement politique a non seulement permis au conflit de s'aggraver, mais aussi de s'élargir à de nouveaux acteurs et à des crimes jusque-là inimaginables».

Créée en 2011 par le Conseil des droits de l'Homme des Nations Unies, la Commission a pour mandat d'enquêter sur toutes les violations du droit international relatives aux droits humains dans le cadre du conflit en Syrie. Le présent rapport rend compte des enquêtes effectuées entre le 15 mai et le 15 juillet 2013. Ses conclusions se fondent sur 258 entretiens, parmi d'autres éléments de preuve.

La Commission affirme que les forces gouvernementales «ont commis des violations flagrantes des droits de l'Homme et des crimes de guerre tels que la torture, les prises d'otages, les meurtres, les exécutions sans procédure régulière, les viols, les attaques contre des objets protégés et les pillages».

Revenant sur l'offensive lancée contre la ville d'Al-Qusayr, où la Commission a pu établir que 450 personnes avaient été tuées, «les forces gouvernementales se sont conduites sans faire de distinction entre civils combattants». Selon la Commission, il y a également tout lieu de penser que le siège de la région d'Al-Qusayr a été conçu «pour rendre la vie des civils impossible et les contraindre ainsi à s'enfuir».

Les forces pro-gouvernementales ont l'obligation juridique d'autoriser et de faciliter le passage sans entrave de l'aide humanitaire, rappelle la Commission dans ce rapport, le sixième à documenter les violations du droit international perpétrées à l'intérieur de la Syrie depuis août 2011.

Les forces anti-gouvernementales ne sont pas épargnées par le rapport, qui conclut là aussi à des crimes de guerre. Les groupes armés antigouvernementaux et kurdes ont recruté et utilisé des enfants soldats dans les hostilités, accuse la Commission. «Les auteurs de ces violations et de ces crimes, de quelque bord qu'ils soient, font fi du droit international. Ils ne craignent pas d'avoir à rendre des comptes. Il est impératif de les traduire en justice», souligne la Commission a souligné, appelant à une saisine de la justice et à l'implication du Conseil de sécurité.

Lors d'une conférence de presse donnée à Genève, la Commission, dirigée par Paulo Pinheiro, a enjoint à la cessation des hostilités et plaidé pour un retour aux négociations. «La République arabe syrienne est un champ de bataille. Ses villes et ses villages sont pilonnés et assiégés sans répit. Des massacres sont commis en toute impunité. Le nombre des Syriens disparus est incalculable». «Choisir l'action militaire en Syrie ne fera qu'intensifier les souffrances à l'intérieur du pays et à empêcher règlement politique d'être atteint», met en garde la Commission, qui compte également comme membres Karen Koning AbuZayd, Carla del Ponte et Vitit Muntarbhorn. La Commission préconise une solution politique fondée sur les principes du communiqué de Genève du 30 juin 2012.

Le Secrétaire général Ban Ki-moon et le Représentant spécial conjoint de l'ONU et de la Ligue des États arabes, Lakhdar Brahimi, ainsi que d'autres hauts fonctionnaires de l'ONU, y sont également favorables, plaidant pour la tenue, longtemps repoussée, de la Conférence de Genève II , qui réunirait les parties syriennes ainsi que les États-Unis, la Fédération de Russie et les Nations Unies.

La Commission d'enquête présentera son rapport au Conseil des droits de l'Homme le 16 septembre 2013. 

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