Catherine MAIA
Au
terme de cinq jours de négociations marathon à Genève et d'un blackout
médiatique total sur le climat et l'évolution des tractations, la chef
de la diplomatie européenne, Catherine Ashton, a annoncé le 24 novembre "un accord sur un plan d'action" concernant le programme nucléaire iranien controversé. En échange d’un allègement des sanctions économiques
qui lui sont imposées, l'Iran s'est engagé dans cet accord intérimaire, valable six mois, à limiter son programme nucléaire. Mme Ashton était entourée du ministre iranien des Affaires étrangères, Mohammad
Javad Zarif, et des six chefs de la diplomatie du groupe 5+1
(États-Unis, Chine, Russie, Royaume-Uni, France et Allemagne).
Simultanément à Washington, lors d'une intervention solennelle depuis
la Maison Blanche, le Président américain Barack Obama a assuré que cet
accord obtenu à l'arraché "barre le chemin le plus évident" de la république islamique vers une bombe atomique. Obama a toujours dit qu'il
ferait tout - y compris recourir à la force - pour empêcher l'Iran de
se doter d'armes nucléaires. Les Occidentaux et Israël soupçonnent
Téhéran de dissimuler un volet militaire derrière son programme civil,
ce qu'il nie.
M. Obama a pris soin de qualifier cet accord intérimaire de six mois
de "première étape importante", soulignant les "énormes difficultés"
persistant dans ce dossier qui empoisonne la communauté internationale
depuis une décennie. Son homologue iranien, Hassan Rohani, réputé modéré
et qui a lancé une politique d'ouverture vers l'Occident depuis son
électon en juin 2013, a salué une entente qui allait "ouvrir de nouveaux
horizons". Son ministre des Affaires étrangères, M. Zarif, a salué "un
résultat important mais (qui) est seulement un premier pas".
"Nous avons mis en place une commission conjointe pour surveiller la
mise en place de notre accord. J'espère que les deux parties pourront
avancer d'une manière qui puisse rétablir la confiance", a dit le
ministre, notamment entre Téhéran et Washington, qui ont rompu leurs
relations diplomatiques en avril 1980. M. Zarif a également réaffirmé le
"droit inaliénable" de son pays à l'enrichissement d'uranium". Le texte
de Genève contient une "référence claire selon laquelle
l'enrichissement va continuer", a-t-il martelé, très applaudi par la
presse et la délégation iraniennes venues en nombre à Genève.
Enrichissement d'uranium
Le droit à l'enrichissement d'uranium n'est pas mentionné dans le
Traité de non-prolifération nucléaire (TNP) dont l'Iran est signataire.
Cette question est au coeur des inquiétudes des pays occidentaux et
d'Israël, qui craignent que l'uranium enrichi à 20% soit utilisé par
l'Iran pour obtenir de l'uranium à 90% pour un usage militaire, malgré
les dénégations de Téhéran. L'Iran affirme que cet uranium est destiné à
son réacteur de recherche et à des fins médicales.
Succédant à M. Zarif devant la presse le 24 novembre à l'aube, le
secrétaire d'État américain John Kerry a paru prendre son contre-pied. L'accord de
Genève, a-t-il insisté, "ne dit pas que l'Iran a le droit à
l'enrichissement (d'uranium), quoiqu'en disent certains commentaires
d'interprétation". "L'Iran a accepté de suspendre l'enrichissement
d'uranium au-delà de 5%. L'Iran a accepté de dégrader ou de convertir
son stock d'uranium enrichi à 20%", a détaillé M. Kerry, parlant d'"une
première étape" avant une prochaine "phase beaucoup plus difficile".
M. Kerry, parrain de la reprise des négociations directes
israélo-palestiniennes, a également voulu rassurer Israël qui s'est
farouchement opposé ces dernières semaines à tout allègement des
sanctions contre l'ennemi iranien. Un accord nucléaire "complet rendra
le monde (...) les partenaires de la région et l'allié Israël plus
sûrs", a promis le secrétaire d'État américain. Alors que les relations
américano-israéliennes traversent une crise, M. Kerry a affirmé qu''il
n'y avait pas la moindre différence entre les États-Unis et Israël sur
l'objectif final qui est que l'Iran n'aura pas de bombe nucléaire".
Un "mauvais accord" selon Israël
La réaction de l'État hébreu ne s'est pas fait attendre. Le bureau du
Premier ministre Banjamin Netanyahu a dénoncé un "mauvais accord qui
offre exactement ce que l'Iran voulait : la levée significative des
sanctions et le maintien d'une partie significative de son programme
nucléaire".
Les cinq jours de négociations se sont déroulés dans un grand hôtel
de Genève, où toutes les délégations résidaient. Les diplomates et
experts du 5+1 ont négocié à partir du 20 novembre - après un échec près du
but début novembre - avant d'être rejointes par chacun de leurs
ministres.
Avec l'Iran, les grandes puissances étaient en quête d'un accord
intérimaire de six mois, apportant des garanties sur le caractère
pacifique du programme nucléaire en contrepartie d'un allégement
"limité" de sanctions qui étranglent l'économie iranienne. Le Président
Obama a assuré que les sanctions "les plus sévères continueront d'être
appliquées", mais il a une nouvelle fois exhorté le Congrès à s'abstenir
d'adopter de nouvelles mesures punitives contre Téhéran.
MULTIPOL - Réseau d'analyse et d'information sur l'actualité internationale (http://reseau-multipol.blogspot.com)
25 novembre 2013
ACTU : Conclusion d'un accord intérimaire sur la régulation du nucléaire iranien
Libellés :
Crises/Conflits
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