18 décembre 2013

ACTU : Le Timor-Leste introduit une instance contre l’Australie et demande à la CIJ d’indiquer des mesures conservatoires

Catherine MAIA

Le 17 décembre 2013, la République du Timor-Leste a introduit une instance contre l’Australie concernant la saisie, puis la détention, par «les agents de l’Australie, de documents, données et autres biens appartenant au Timor-Leste ou que celui-ci a le droit de protéger en vertu du droit international».

Le Timor-Leste soutient notamment que, le 3 décembre 2013, des agents des services de renseignement australiens (Australian Security Intelligence Organisation), agissant prétendument dans le cadre d’un mandat émis par l’Attorney-General de l’Australie, se sont présentés dans des locaux professionnels et privés d’un conseiller juridique du Timor-Leste à Canberra et ont saisi, entre autres, des documents et données contenant une correspondance échangée entre le Gouvernement du Timor-Leste et ses conseillers juridiques et, en particulier, des documents se rapportant à une procédure d’arbitrage qui se déroule actuellement entre le Timor-Leste et l’Australie, en application du traité relatif à la mer de Timor.

En conséquence, le Timor-Leste «prie la Cour de dire et juger :
Premièrement, que, en saisissant les documents et données, l’Australie a violé i) la souveraineté du Timor-Leste et ii) les droits de propriété et autres que celui-ci tient du droit international et de tout droit interne pertinent ;
Deuxièmement, que la détention continue, par l’Australie, de ces documents et données constitue une violation i) de la souveraineté du Timor-Leste et ii) des droits de propriété et autres que celui-ci tient du droit international et de tout droit interne pertinent ;
Troisièmement, que l’Australie doit immédiatement restituer au représentant du Timor-Leste désigné à cet effet tous les documents et données susmentionnés, détruire définitivement toute copie de ces documents et données qui se trouve en sa possession ou sous son contrôle, et assurer la destruction de toute copie qu’elle a directement ou indirectement communiquée à une tierce personne ou à un Etat tiers ;
Quatrièmement, que l’Australie doit réparation au Timor-Leste pour les violations susmentionnées des droits que celui-ci tient du droit international et de tout droit interne pertinent, sous la forme d’excuses officielles, ainsi que par la prise en charge des frais que le Timor-Leste a supportés aux fins de la préparation et du dépôt de la présente requête».
Comme base de compétence de la Cour, le demandeur invoque les déclarations faites par le Timor-Leste et l’Australie en vertu du paragraphe 2 de l’article 36 du Statut.

Le Timor-Leste a également déposé le 17 décembre 2013 une demande en indication de mesures conservatoires. Il fait valoir que cette demande a pour objet de protéger ses droits et d’empêcher que les documents et données saisis par l’Australie soient utilisés contre les intérêts et droits du Timor-Leste dans le cadre de l’arbitrage en cours et à l’égard d’autres questions ayant trait à la mer de Timor et à ses ressources.

En conséquence, le Timor-Leste «prie ... la Cour d’indiquer les mesures conservatoires suivantes :
a) que tous les documents et données saisis par l’Australie au 5 Brockman Street, à Narrabundah, dans le territoire de la capitale australienne, le 3 décembre 2013 soient immédiatement placés sous scellés et remis à la Cour internationale de Justice ;
b) que l’Australie fournisse immédiatement au Timor-Leste et à la Cour internationale de Justice i) une liste de tous les documents et données, ou des informations qui y sont contenues, qu’elle a révélés ou communiqués à toute personne, employée ou non par un organe de l’Etat australien ou de tout Etat tiers et exerçant ou non des fonctions pour le compte de pareil organe, et ii) une liste contenant l’identité ou une description de ces personnes et indiquant leurs fonctions actuelles ;
c) que l’Australie fournisse, dans un délai de cinq jours, au Timor-Leste et à la Cour internationale de Justice une liste de toutes les copies qu’elle a faites des documents et données saisis ;
d) que l’Australie i) procède à la destruction définitive de toutes les copies des documents et données qu’elle a saisis le 3 décembre 2013, et prenne toutes les mesures possibles pour assurer la destruction définitive de toutes les copies qu’elle a communiquées à des tierces parties, et ii) informe le Timor-Leste et la Cour internationale de Justice de toutes les mesures prises en application de cette injonction de destruction, que celles-ci aient ou non abouti ;

e) que l’Australie donne l’assurance qu’elle n’interceptera pas les communications entre le Timor-Leste et ses conseillers juridiques, que ce soit en Australie, au Timor-Leste ou en tout autre lieu, ni ne causera ou demandera l’interception de ces communications».
Le Timor-Leste prie en outre le président de la Cour, en attendant que celle-ci se prononce sur la demande en indication de mesures conservatoires, de faire usage du pouvoir que lui confère le paragraphe 4 de l’article 74 du Règlement pour demander à l’Australie :
«i) de fournir immédiatement au Timor-Leste et à la Cour internationale de Justice une liste de tous les documents et dossiers contenant des données électroniques qu’elle a saisis au 5 Brockman Street, à Narrabundah, dans le territoire de la capitale australienne, le 3 décembre 2013 ;

ii) de placer immédiatement sous scellés ces documents et données [ainsi que toute copie qui en a été faite] ;

iii) de déposer immédiatement les documents et données placés sous scellés [ainsi que toute copie qui en a été faite] à la Cour internationale de Justice ou au 5BrockmanStreet, à Narrabundah, dans le territoire de la capitale australienne ; et

iv) de ne pas intercepter les communications entre le Timor-Leste (et notamment son agent, S. Exc. M. Joachim de Fonseca) et ses conseillers juridiques en la présente procédure (DLA Piper, MM.E.Lauterpacht, Q.C., et Vaughan Lowe, Q.C.), ni causer ou demander l’interception de ces communications.»
___________

Le texte intégral de la requête et de la demande sera prochainement disponible sur le site internet de la Cour : www.icj-cij.org.

Source : CIJ

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