2 février 2019

ACTU : La fin du Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire : une plus grande menace nucléaire

Jean-Marie COLLIN

Le Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire (FNI) va probablement disparaître. Pourtant, cet instrument de désarmement entré en vigueur en 1988 sans limitation de durée, était le garant d’une plus grande sécurité pour les Européens. Demain, de nouveaux missiles nucléaires ou conventionnels seront-ils pointés sur nos villes ?

Depuis plusieurs années les États-Unis accusent la Russie de ne pas respecter ce traité bilatéral, qui interdit une gamme complète de système d’armes (missiles sol-sol dont la portée est comprise entre 500 et 5500 km). Le Traité FNI avait créé la confiance et ouvert la voie à des réductions massives des arsenaux, principalement nucléaires. Depuis 2014, c’est le missile russe Novator 9M729 qui est pointé du doigt par les États-Unis. Dans le même temps, la Russie, qui ne fait pas preuve de transparence, s’interroge sur la compatibilité du FNI et du système de missiles anti-missile des États-Unis (basé en Roumanie et en Pologne).

Le 9M729 dispose d'une rampe de lancement construite pour quatre missiles au lieu de deux. Crédit Ministère Russe de la défense

Après le retrait de l’accord sur le nucléaire avec l’Iran en mai dernier, à la surprise des dirigeants européens, le Président américain Donald Trump a annoncé, en octobre 2018, sa volonté de faire sortir les États-Unis de ce traité. Notons qu’à aucun moment, les États européens, qui peuvent être la cible potentielle de ces armes (aujourd’hui éliminées, mais demain ?), n’ont été concertés. Si la décision américaine de retrait venait à se concrétiser, selon l'article 15 du traité qui prévoit un délai de 6 mois, celle-ci serait pleinement effective le 2 août 2019.

Alors qu’il existe une « commission spéciale de vérification » (article 13 du traité), cette dernière ne fonctionne pas ou très mal. La Russie, dans une tentative de transparence, a, le 16 janvier, invité les États-Unis (ainsi que d’autres pays) à inspecter le missile Novator, une offre rejetée par Washington. Si on peut le regretter, en réalité, cette transparence était clairement un jeu de communication de la part de Moscou. Pourquoi procéder ainsi, alors que la commission de vérification du traité aurait dû s’en charger ? Les deux parties semblent ne pas vouloir résoudre la crise.

Dans un tel contexte, il est urgent que les États de l’Union européenne manifestent un engagement diplomatique extrêmement fort contre la fin de ce traité. En France, les parlementaires doivent au plus vite exprimer leur inquiétude face à l’absence d’initiative de la part du ministère des affaires étrangères français. Les maires sont aussi concernés et doivent manifester leur volonté de ne pas être les cibles de missiles nucléaires, par exemple en rejoignant l’appel des Villes de ICAN.
Le Traité FNI présente sans aucun doute – au vu de la situation de 2019 – des manquements. Il serait nécessaire de l’élargir à d’autres parties comme la Chine, mais aussi l’Inde, le Pakistan et la France. La Suède a, depuis plusieurs années, avancé l’idée d’un traité englobant notamment les missiles de croisières (air/sol) à capacité nucléaire pour répondre à la réalité des menaces de ce XXIe siècle.

Pour autant, la solution est-elle de créer un nouveau traité pour supprimer une seule catégorie d’armes nucléaires ? Cela signifierait-il que les autres armes (transportées par d’autres vecteurs balistiques) seraient acceptables ?

Tous les États dotés d’armes nucléaires peuvent désormais mettre un terme à cette menace nucléaire en rejoignant le Traité d’interdiction des armes nucléaires. Ce nouvel instrument juridique – ouvert à la ratification – prévoit en son article 4 que les États possesseurs négocient un processus de désarmement juridiquement contraignant. Les États non dotés peuvent aussi jouer un rôle, en particulier ceux membres de l’OTAN, en rejoignant aussi ce traité et participer ainsi à ce processus de désarmement.

Le TIAN peut apporter une solution de sortie honorable pour tous face à cette problématique mondiale créée par les armes nucléaires. Ne pas agir signifierait que l’on se dirige vers toujours plus d’instabilité. À un moment donné, il est certain que le pire arrivera, faisant basculer la société internationale dans un univers inquiétant.



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