Au terme de ses cinq premières années de fonctionnement, le bilan de la CPI est globalement positif. Quatre enquêtes ont été ouvertes par le Procureur sur des crimes sérieux commis dans 4 pays : Ouganda, République démocratique du Congo, Darfour (Soudan) et République Centrafricaine. Huit mandats d’arrêts ont été délivrés, mais seul l’un d’eux a pour le moment été exécuté, qui a conduit à l’arrestation et au transfert devant la Cour du chef de milice congolais Thomas Lubanga. Les charges retenues contre lui ayant été confirmées par la Chambre préliminaire, le premier procès de la CPI devrait débuter dans les prochains mois.
Au 1er janvier 2007, 104 États étaient Parties au Statut de Rome de la Cour pénale internationale et 139 États l'avaient signé. Parmi les pays membres, 29 appartiennent au groupe des États d'Afrique, 12 sont des États d'Asie, 16 sont des États d'Europe orientale, 22 sont des États d'Amérique latine et des Caraïbes et 25 sont du Groupe des États d'Europe occidentale et autres États.
Pour que la CPI puisse pleinement remplir sa vocation universelle de mise en jeu de la responsabilité pénale des individus, Ban Ki-moon a appelé les États membres de toutes les régions du monde qui ne sont pas encore parties au Statut de Rome à envisager de le devenir, ce qui comprend notamment les États-Unis, la Chine et la Fédération de Russie.

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«Cinq ans après la création, le 1er juillet 2002, de la Cour pénale internationale (CPI), son président, Philippe Kirsch, estime que "la marche vers l'universalité prendra un certain nombre d'années, voire de décennies" (…) À moins d'une saisine par le Conseil de sécurité de l'ONU, seuls les crimes commis sur le territoire de ces 104 États (parties au Statut de Rome), ou par leurs ressortissants, sont passibles de poursuites. À ce jour donc, Irak, Tchétchénie, Liban ou Palestine échappent au champ de compétence de la CPI. Nombre d'États, parmi lesquels les États-Unis, la Russie, l'Iran ou Israël, sont réticents à toute perte de souveraineté et craignent une utilisation politique de la CPI. "Mais la détente est perceptible", estime Philippe Kirsch, diplomate et magistrat canadien. Les États-Unis se sont notamment abstenus d'utiliser leur veto lors de la saisine du Procureur par le Conseil de sécurité sur le Darfour, en mars 2005. "Pour parvenir à l'universalité, l'une des clés du succès de la Cour va être de se conduire en temps qu'organe judiciaire, de ne pas se comporter en tant qu'organe politique. Et j'estime qu'on ne peut pas trouver trace, dans les quatre années passées depuis la désignation des juges et du procureur, de politisation de la Cour", ajoute M. Kirsch.
Mais, en cherchant à se dédouaner de toute accusation de politisation, certains estiment que la Cour pèche par excès de prudence. "La politique pénale du procureur démontre, par certains aspects, une volonté de satisfaire les États. Or ce n'est pas le rôle de la Cour", estime un juriste. En République démocratique du Congo (RDC), le Procureur, Luis Moreno Ocampo, a joué la prudence dans le choix de ses cibles. Si plusieurs suspects sont dans sa ligne de mire, les plus hauts responsables ne sont pas visés et Thomas Lubanga n'est poursuivi que pour avoir enrôlé des enfants dans ses troupes, malgré des faits de guerre plus sanglants. "C'est une inculpation d'ONG, commente un membre de la CPI, une inculpation qui répond à des standards occidentaux en pointant le drame des enfants-soldats". En Ouganda, la Cour pourrait avoir produit son premier effet préventif. Les cinq mandats d'arrêt émis contre les chefs de l'Armée de résistance du Seigneur ont incité à l'ouverture de négociations de paix en août 2006. Mais les suspects sont toujours en fuite et tentent de négocier leur impunité en échange de la paix. Et, malgré les appels discrets de la Cour aux États et aux organisations internationales, les mandats d'arrêt n'ont toujours pas été exécutés. "Laissés en liberté, les criminels demandent l'immunité sous une forme ou une autre à la condition de stopper la violence. Ils menacent d'attaquer plus de victimes. J'appelle cela du chantage. Nous ne pouvons pas céder", estime Luis Moreno Ocampo. Selon un membre de Human Rights Watch, "cette fermeté nouvelle du Procureur marque peut-être le tournant des cinq années d'existence de la Cour, et une certaine maturité"».