Avec deux ans d’avance sur son mandat, cette retraite anticipée n’est pas sans soulever quelques questions. Déjà en 2004, Horst Köhler avait pris de court tout le monde en rendant son tablier pour revêtir celui de Président de la République allemande. En 2007, Rodrigo de Rato se justifie : il part pour des «raisons personnelles», a-t-il annoncé dans un communiqué de presse. L’argument avancé selon lequel il souhaiterait se consacrer à sa vie familiale laisse cependant dubitatif bon nombre d’observateurs. À 58 ans, certains le voient d’ores et déjà embrasser à nouveau une carrière politique dans son pays d’origine. À quelques mois des élections générales de mars 2008, l’ancien ministre de l’Économie espagnol pourrait-il revenir au sein du Parti Populaire, qui lui même se trouve dans une situation difficile depuis la défaite de José Maria Aznar ?
Reste qu’au FMI, le poste ne pourra pas demeurer vacant longtemps. Selon une règle non écrite, c’est aux Européens que revient la responsabilité de désigner le nouveau directeur. D’où la question qui va rapidement se poser : qui désigner ? Parmi les successeurs potentiels figurent le Français Jean Lemierre, qui dirige actuellement la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (Berd), le Polonais Leszek Balcerowicz, ancien gouverneur de la Banque centrale polonaise, et Mario Draghi, actuel gouverneur de la Banque d'Italie.
Pour l’heure, dans les hautes sphères de la diplomatie internationale, la question de la succession paraît encore prématurée. Le départ précipité de Rodrigo de Rato suscite l’incompréhension, car elle intervient au moment même où le FMI débutait une réflexion sur ses missions et sa structure. Du point de vue de ses missions, l’objectif pour le FMI est de se réapproprier un rôle de gendarme des taux de change – à la demande pressante des États-Unis, agacés par la sous-évaluation du yuan qui favorise les exportations chinoises et creuse leur déficit commercial –, nouveau rôle qui aurait pu être le point d’orgue de la mandature Rato. Du point de vue de sa structure, l’objectif est d’améliorer la représentativité des pays émergents, une réforme nécessaire suite au départ de plusieurs pays d’Amérique Latine, lassés de la tutelle encombrante du Fonds, le remboursement anticipé de leur dette ayant impliqué un gros manque à gagner en terme d’intérêts et, par conséquent, l’épuisement des réserves financières de l’institution de Bretton Woods.