6 décembre 2007

NOTE : La légalité de Guantanamo à nouveau devant la Cour suprême des États-Unis

Catherine MAIA
Hier, la Cour suprême des États-Unis s’est penchée pour la troisième fois sur les droits des 305 détenus de la prison située sur la base militaire navale américaine de Guantanamo qui, pour l’heure, relèvent de la loi sur les commissions militaires leur accordant une possibilité très limitée de recours.
Cette affaire, qui ne manquera pas de relancer le débat sur la législation antiterroriste controversée adoptée par le gouvernement Bush après le 11-Septembre, vise à déterminer si le gouvernement américain, sous prétexte de « guerre contre le terrorisme », peut nier à certains de ses ennemis leurs droits civiques fondamentaux.
Deux groupes de détenus ont déposé un recours, l'un constitué de trente prisonniers originaires de plusieurs pays comme le Koweït, le Yémen et l'Afghanistan, l'autre composé de six ressortissants algériens arrêtés en Bosnie en octobre 2001 et remis aux États-Unis trois mois plus tard, bien que la Cour suprême bosniaque ait ordonné leur libération faute de preuves.
Les prisonniers rejettent la loi sur les commissions militaires de 2006 (Military Commissions Act) qui les prive du droit de contester leur détention devant les tribunaux. Les avocats des deux groupes de détenus demanderont ainsi à la plus haute juridiction américaine de trancher sur le point de savoir si le gouvernement peut légalement priver des prisonniers, détenus sans procès ni inculpation depuis des années, de leur droit de contester leur détention devant un juge. Pour les avocats des détenus, la base de Guantanamo, qui est louée et administrée entièrement par l'armée américaine, doit être considérée comme faisant partie intégrante du territoire américain.
Les élus démocrates et de nombreuses capitales étrangères condamnent les conditions de détention dans le camp ouvert en janvier 2002, après le lancement de l'offensive américaine en Afghanistan. Le Haut commissaire des Nations Unies pour les droits de l'Homme a également rappelé à plusieurs reprises que les droits de l'Homme s'appliquent, même en temps de conflit armé.
Pour sa part, le gouvernement fédéral américain assure que les détenus sont traités de manière juste et peuvent défendre leur dossier devant un tribunal militaire, avec une possibilité limitée de recours. « Les détenus jouissent désormais de protections procédurales et de droits statutaires (...) supérieurs à tout autre ennemi combattant capturé dans l'histoire de la guerre », a commenté le département de la Justice. Les procureurs du gouvernement fédéral, tenteront ainsi de faire valoir que le droit de contester sa détention, l'habeas corpus, ne s'applique pas à des étrangers détenus à l'extérieur des États-Unis, et donc sur la base de Guantanamo, une base navale américaine en territoire cubain louée depuis des décennies.
Washington a le soutien des lobbies conservateurs qui estiment que l'octroi de droits élargis aux prisonniers de Guantanamo risquerait d’engorger les tribunaux et d’offrir une tribune de propagande aux intéressés.
La décision de la Cour suprême, qui devrait être rendue avant la fin juin prochain, est très attendue par les défenseurs des droits humains qui estiment, à l’instar de nombreux pays, que le Président George Bush a abusivement profité de sa « guerre contre le terrorisme » pour enfreindre des droits civiques fondamentaux.
Bien que Bush ait reconnu les dégâts causés par le camp de Guantanamo à l'image internationale des États-Unis et ait promis que la prison fermerait un jour ses portes, plusieurs candidats républicains à l'élection présidentielle de novembre 2008 se sont prononcés pour que le camp reste ouvert.
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En juin 2004, la Cour suprême a autorisé les détenus à contester leur détention devant un tribunal fédéral. Quatre mois plus tard, un juge fédéral a déclaré illégaux ces tribunaux militaires d'exception créés par le Président Bush en novembre 2001.
En juillet 2005, une Cour d'appel fédérale a annulé la décision de juin 2004 et validé les tribunaux d'exception.
En juin 2006, la Cour suprême a invalidé les tribunaux militaires d'exception.
En septembre 2006, le Congrès a de nouveau instauré les tribunaux militaires d'exception.

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