L’émergence de ce pays n’est en rien une nouveauté car historiquement la Perse a toujours occupé une place importante dans cette région ; pendant des siècles, les grands équilibres régionaux reposaient avant tout sur les rapports de forces qu’entretenaient ce grand pays et l’Empire ottoman. A une époque plus récente, l’Iran du Shah était un Etat avec lequel il fallait compter mais la perception qu’on pouvait en avoir en Occident était différente de celle d’aujourd’hui puisqu’il était un de ses alliés privilégiés sur lequel les Etats-Unis s’appuyaient pour leur politique dans la région. Dans cette configuration, l’Iran du Shah participait à l’équilibre stratégique du Proche-Orient dans le contexte de la Guerre froide face à l’Union soviétique fortement implantée en Syrie, en Iraq et en Egypte, jusqu’au revirement de Anouar El Sadate au début des années 70.
Cet équilibre a disparu en plusieurs séquences assez proches les unes des autres. D’abord, il y eut la révolution islamique presque immédiatement accaparée par la guerre contre l’Iraq qui allait durer jusqu’en 1988. Ce conflit terrible et dévastateur, qui a neutralisé les deux pays pendant huit ans, a fait le jeu de bien d’autres acteurs sur la scène internationale. L’Occident soutenait l’Iraq pour contrer ce qu’il percevait comme une menace islamiste tandis qu’Israël, qui avait tout intérêt à ce que ce conflit perdure, soutenait l’Iran en sous-main pour contribuer à abattre le régime de Saddam Hussein considéré comme son ennemi potentiellement le plus dangereux ; c’est d’ailleurs au tout début de cette guerre que le gouvernement de Begin fit détruire par son aviation la centrale nucléaire d’Osirak (en 1981).
Ensuite, il y eut la première guerre du Golfe, en 1992, qui a commencé à changer, en profondeur, la donne stratégique ; l’Iraq en est sorti très affaibli avec une réduction considérable de ses capacités militaires, un abandon forcé de ses programmes d’armes de destruction massives et la perte de la maîtrise de son espace aérien étroitement surveillé par les Etats-Unis et la Grande-Bretagne.
Enfin, moins de dix ans plus tard (en mars 2003), l’invasion de ce pays par les Etats-Unis a ouvert une étape majeure dans la recomposition des équilibres stratégiques de la région. Sous le choc, le régime de Saddam Hussein s’est effondré tandis que la société iraquienne se fissurait en de multiples fragments suivant les vieux clivages ethniques et communautaires (sunnites, chiites et kurdes) qui n’avaient, en fait, jamais été dépassés.
SOMMAIRE
Dossier
Introduction
Le rôle de la Russie et des vétérans de la guerre Iraq-Iran, Jean-Paul Chagnollaud et Bernard Hourcade
La diplomatie nucléaire iranienne, Seyed Mohammad Tabatabaei
La diplomatie chinoise et l’Iran : un équilibrisme habile mais périlleux, Lionel Vairon
L’Iran perturbateur, Yves Boyer
Israël-Iran : quel danger nucléaire ?, Bernard Ravenel
En cas de frappes, quelles réponses en terme sécuritaire ?, Hubert Britsch
Elections sous contrôle, paupérisation et contestations civiles, Sepideh Farkhondeh
L’Iran, centre de gravité de plusieurs conflits, Ahmad Salamatian
Etats-Unis et Proche Orient : vers une perpétuation des politiques sismiques, Barah Mikail
Itinéraire
Un entretien avec Théo Klein, « Les Juifs ont du mal à entrer dans l’histoire »
Actuel
Palestine, 60 ans après : le droit au retour des réfugiés, Sylviane de Wangen
Kosovo, 17 février 2008 : les risques de l’indépendance, Christophe Chiclet
Chypre : espoir de réconciliation, Christophe Chiclet
Le droit de la famille au Maghreb : une fragile adaptation aux réalités, Wassila Ltaief
Israël au Salon du Livre, Robert Bistolfi