Catherine MAIA
« Le Conseil de sécurité devrait être d'autant plus préoccupé par la
situation au Darfour que des crimes continuent d'y être commis, y
compris par les individus faisant l'objet de mandats d'arrêt délivrés
par la Cour pénale internationale (CPI) », a déclaré le 13 décembre la Procureure
de cette juridiction, Fatou Bensouda, devant les membres du Conseil.
Le renvoi de la situation au Darfour devant la CPI, qui remonte à mars
2005, est une entreprise qui incombe à la fois à cette juridiction et au
Conseil de sécurité, a rappelé Mme Bensouda, qui a souligné le lien
entre lutte contre l'impunité et retour d'une paix durable. Venue
présenter les activités de son Bureau au cours des six derniers mois,
elle a estimé qu'il avait fait son travail en mettant en œuvre le mandat
établi par le Conseil, conformément au Statut de Rome.
« Combien d'autres civils doivent être tués, blessés ou déplacés pour
que le Conseil décide d'agir de son côté ?», s'est interrogée Mme
Bensouda. Exaspérées par l'absence de progrès en vue de l'arrestation
des individus sous le coup d'un mandat d'arrêt, les victimes des crimes
commis au Darfour attendent désormais du Conseil qu'il prenne des
mesures concrètes et décisives en ce sens, a-t-elle insisté.
Selon elle, l'incapacité des autorités soudanaises à exécuter les
mandats d'arrêt touchant plusieurs de ses membres semble refléter un
engagement militaire renouvelé au Darfour. « Le Conseil de sécurité doit
bien savoir que le gouvernement soudanais n'est disposé ni à remettre
les suspects ni à les juger pour leurs crimes », a-t-elle affirmé.
Rejetant les allégations selon lesquelles les activités de son Bureau
seraient motivées par des considérations politiques ou pêcheraient par
impartialité, la Procureure a rappelé que les juges de la Chambre
préliminaire avaient conclu de manière formelle que les forces
gouvernementales soudanaises s'étaient rendues coupables de crimes de
guerre, de crimes contre l'humanité et de génocide au Darfour, « dans le
cadre d'une stratégie délibérée élaborée au plus haut niveau de l'état
».
Elle a aussi assuré que la responsabilité des quatre individus visés par
les mandats – le Président du pays, Omar Al Bashir, le Ministre de la
Défense Abdel Raheem Hussein, le Gouverneur du Kordofan méridional Ahmad
Harun, et l'ancien commandant janjaouite Ali Kushayb –, ne découlait
pas directement de leurs fonctions officielles.
« Dans toutes ces affaires, des témoins ont décrit en détail la
participation active de ces accusés à l'élaboration et l'exécution de
cette stratégie criminelle », a-t-elle assuré.
Trois chefs de groupes rebelles du Darfour ont également été poursuivis
par la CPI : Abdallah Banda Abakaer Nourain, Saleh Mohammed Jerbo Jamus
et Bahar Idriss Abu Garda. Les deux premiers sont actuellement en
détention à La Haye, en l'attente de leur procès ; les chefs
d'inculpation pesant contre le troisième ont été levés en 2009.
Mme Bensouda a ensuite rappelé que les juges de la Cour avaient contacté
de manière formelle le Conseil de sécurité à six reprises, notamment
pour lui signaler l'absence de coopération de la part du Soudan, du
Malawi et du Tchad dans l'exécution des mandats d'arrêt émis par la CPI
contre les quatre individus toujours recherchés, sans jamais obtenir de
réponse. Les deux derniers pays cités sont pourtant signataires du
Statut de Rome.
Le Bureau de la Procureure entend par ailleurs poursuivre son
interaction avec les organisations régionales, en particulier avec
l'Union africaine, a indiqué Fatou Bensouda. Les recommandations faites
par son Panel de haut niveau pour la justice, si elles devaient être
mises en œuvre, permettrait de faire un pas considérable dans la lutte
contre l'impunité au Darfour, mais aussi dans tout le Soudan », a-t-elle
dit.
La Procureure a ensuite affirmé que les enquêtes sur la situation au
Darfour représentaient un défi de taille pour son Bureau, même si ce
dernier avait achevé celles qui sont à l'origine de l'émission des
mandats d'arrêt. « Des progrès substantiels ont été accomplis en vue de
l'ouverture du procès de deux des trois individus suspectés d'avoir
commis des crimes de guerre lors de l'attaque par les rebelles de la
base de l'Opération hybride Nations Unies- Union africaine à Haskanita,
au nord du Darfour », a-t-elle assuré, en rappelant que ce procès
devrait débuter au début de l'année 2013.
« Je suis impatiente de présenter devant les juges les nombreux éléments
de preuve substantiels recueillis, une fois que les quatre individus
toujours recherchés par la Cour seront arrêtés », a-t-elle ajouté en
conclusion.
Source : ONU
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