13 janvier 2013

ACTU : La poussée des islamistes stoppée dans le centre du Mali, tandis que l'Afrique de l'Ouest se mobilise

Catherine MAIA

La France, intervenant en soutien à l'armée malienne, a stoppé le 12 janvier l'avancée des islamistes dans le centre du Mali, où les pays d'Afrique de l'Ouest accélèrent leurs préparatifs pour déployer leurs troupes. Un sommet extraordinaire de la sous-région doit avoir lieu, le 16 janvier, à Abidjan.
 
L'armée malienne a enregistré dans ses rangs 11 morts, une soixantaine de blessés, et un officier français a été tué lors des combats contre les islamistes à Konna (centre), selon une déclaration du président malien Dioncounda Traoré lue samedi à la télévision publique. "Un coup d'arrêt a été porté à nos adversaires" au Mali, a déclaré samedi soir le président français François Hollande, réaffirmant que l'intervention française "n'a pas d'autre but que la lutte contre le terrorisme".

Selon le ministre de la Défense, l'officier français a été mortellement blessé vendredi lors d'un raid hélicoptères "contre une colonne terroriste" se dirigeant vers deux villes de la partie sud du pays. Ce raid vendredi "a permis la destruction de plusieurs unités" islamistes et a "stoppé leur progression", a affirmé le ministre, faisant également état de la participation aux opérations d'avions de combat Mirage 2000 et Mirage F1 - basés à N'Djamena.

La ville de Konna sous contrôle
"Nous avons fait des dizaines de morts, même une centaine de morts parmi les islamistes à Konna. Nous contrôlons la ville, totalement", a affirmé un officier malien depuis Mopti (centre), région marquant la limite entre le nord et le sud du pays. Une source sécuritaire régionale a fait état d'"au moins 46 islamistes" tués, alors qu'un habitant de Konna a dit avoir "vu des dizaines de corps" d'hommes portant des tuniques arabes et des turbans. Selon l'armée malienne, les "dernières poches de résistance" étaient nettoyées après la contre-attaque réussie pour reconquérir la ville et enrayer l'offensive jihadiste. Des civils auraient également perdu la vie dans ces combats, notamment suite à une attaque surprise, selon la FIDH, des jihadistes. Selon certaines sources, ces derniers utiliseraient des enfants pour se battre à leur côté.

Des unités françaises ont par ailleurs été déployées à Bamako pour y assurer la sécurité des quelque 6.000 ressortissants français. Des éléments des forces prépositionnés en Afrique, venus notamment de Côte d'Ivoire et du Tchad, sont arrivés sur l'aéroport de la capitale, selon une source militaire. Le président Hollande a par ailleurs annoncé un renforcement, "dans les meilleurs délais" des mesures antiterroristes en France.

Alors que la situation militaire était gelée, les combats avaient repris cette semaine dans le centre du pays. A plus de 700 km de Bamako, Konna était tombée jeudi aux mains des jihadistes qui occupent depuis plus de neuf mois le nord du Mali. Cette vaste région désertique est depuis avril 2012 un sanctuaire pour les groupes islamistes, notamment Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) qui détient huit otages français. La contre-attaque franco-malienne est partie de Sévaré, localité à 70 km au sud de Konna, dotée du plus important aéroport de la région, où avaient atterri jeudi les éléments des forces spéciales françaises prépositionnées depuis des mois au Burkina Faso voisin.

"La reconquête du nord a commencé"
A la suite de ses pairs ouest-africains et de l'Union africaine, M. Traoré a remercié François Hollande pour avoir lancé l'opération baptisée "Serval". De son côté, le capitaine Amadou Sanogo, chef des putschistes de mars 2012 et d'un comité militaire officiel, a estimé que La France avait joué "un rôle capital" aux côtés de l'armée malienne.

Washington, qui a dit "partager l'objectif de la France de retirer aux terroristes leur sanctuaire dans la région", envisage de lui apporter un appui "logistique", du ravitaillement en vol et des drones de surveillance, selon un haut-responsable américain. La Grande-Bretagne va également fournir une assistance militaire logistique à Paris mais ne déploiera pas de personnel en situation de combat, a annoncé pour sa part le bureau du Premier ministre David Cameron.

Face à l'urgence, le Burkina Faso, le Niger et le Sénégal ont annoncé le déploiement chacun d'un bataillon de 500 hommes. Un sommet extraordinaire de la sous-région doit se tenir, mercredi 16 janvier, à Abidjan. "Il sera uniquement consacré au Mali", a déclaré le Nigérian Sunny Ugoh, porte-parole de la Cédéao. Depuis plusieurs mois, l'Afrique de l'Ouest a proposé l'envoi, avec l'aval de l'ONU, d'une force armée africaine de plus de 3.300 hommes, que des pays européens, dont la France, l'ancienne puissance coloniale, ont promis d'aider logistiquement, pour la reconquête du Nord du Mali. Vendredi, la Communauté des Etats d'Afrique de l'ouest (Cédéao) avait autorisé "l'envoi immédiat de troupes sur le terrain" pour épauler l'armée malienne "dans le cadre de la Misma (Force internationale de soutien au Mali)".

"Les forces (ouest-africaines) sont en train de se positionner (...), c'est la reconquête du nord Mali qui vient de commencer", a assuré à l'AFP le ministre ivoirien l'intégration africaine, Ally Coulibaly. L'objectif n'est pas seulement (...) d'empêcher que les jihadistes ne descendent vers le sud, mais surtout, c'est de reconquérir les positions de Tombouctou, Gao, Kidal", les trois principales villes du Nord, selon M. Coulibaly.

Le Nigeria n'a pas encore précisé son niveau de participation à la MISMA, mais a déjà dépêché une équipe technique de l'armée de l'air, ainsi que le futur commandant de la force africaine, qui sera nigérian. Acteur clé et plutôt hostile à une intervention militaire étrangère - en particulier française -, l'Algérie a exprimé son soutien "sans équivoque" aux autorités de transition maliennes, condamnant fermement "les attaques des groupes terroristes". Un haut responsable russe a toutefois estimé que "toute opération en Afrique peut et doit se faire exclusivement sous l'égide de l'Onu et de l'Union africaine".

La France avait demandé vendredi au Conseil de sécurité de l'ONU l'accélération de la mise en oeuvre de la résolution 2085, approuvée le 20 décembre et qui autoriserait notamment le déploiement par étapes de la Misma. Pour justifier son intervention, Paris a mis en avant l'article 51 de la charte de l'ONU qui mentionne "le droit de légitime défense, individuelle ou collective", en cas "d'agression armée" d'un pays membre de l'ONU.

Source : AFP


A LIRE :

  • Philippe WECKEL, « L'intervention militaire de la France au Mali », Sentinelle, n°330, 13 janvier 2013

Philippe WECKEL, « L'intervention militaire de la France au Mali », Sentinelle, n°330, 13 janvier 2013

L’intervention de la France commencée le 10 janvier 2013 a été certes justifiée par l’urgence de la situation, mais on ne voit pas comment elle pourrait s’achever en quelques jours ou quelques semaines, ni comment la France, après avoir accepté de donner un appui militaire, pourrait soudain se désengager. Elle qui semblait vouloir limiter son aide à un soutien logistique a donc franchi un pas irréversible. Le scénario a changé de même que le calendrier  Finalement, l'attaque des rebelles a peut être débloqué involontairement une situation qui était paralysée par l'incertitude sur le degré d'implication de la France dans la crise.

Le Parisien

I. Le contexte de l'intervention
La France est intervenue dans les circonstances de la prise de la localité de Konna et la progression des rebelles vers le verrou de Mopti qui commande l’accès à la capitale du Mali, Bamako. A Mopti se concentrait l’essentiel des forces maliennes pouvant éventuellement contenir la poussée des rebelles et à 70 km au sud de Konna se trouve l’aérodrome militaire de Sévaré qui permet d’acheminer sur zone des moyens aéroportés. La bataille est déterminante. Plus de la moitié du pays est déjà sous le contrôle des groupes islamistes et affiliés et, passée Mopti, la troupe rebelle ne devrait plus rencontrer la résistance d’une armée malienne démoralisée par les échecs successifs et minée par la crise politique. L’Etat malien est donc en sursis lorsque la France est appelée à l'aide.
Or l’attaque révèle que cette mosaïque de groupes armés est parvenue à une unité opérationnelle efficace. Elle a constitué un corps d’armée sous commandement unique, mobile et concentré : 200 véhicules légers surarmés, 2000 combattants entraînés, formés, déterminés et qui connaissent le terrain. Dans ces conditions la reconquête des localités du Nord et l’installation de petites unités militaires sédentaires sont  vouées à l’échec,  si elles ne sont pas associées à des actions aériennes offensives visant les bases logistiques et les concentrations de véhicules. Depuis la smalah d’Abdelkader et la guerre des sables de Rommel on sait que l’avantage stratégique est procuré par la mobilité. Seule une armée disposant de moyens d’observation sophistiqués et de capacités aériennes importantes peut empêcher les combattants islamistes de mener des attaques concentrées et les obliger à se disperser. Même si l’intervention militaire française a été provoquée par l’urgence de stopper l’avancée des rebelles, elle marque vraisemblablement le début d’un engagement prolongé au Mali. D’ailleurs en manifestant leur disponibilité à apporter une assistance à l’armée française en termes de renseignement et de logistique notamment (ravitaillement en vol des avions), les Etats-Unis s’inscrivent clairement dans la perspective de la montée en puissance du dispositif français « Serval ». Il faut rappeler que l’intervention en Libye avait été provoquée par la menace directe pesant sur la population de Benghazi et elle avait connu un développement considérable par la suite. Pour l'heure, la reconquête du Nord Mali n'est cependant pas à l'ordre du jour du côté français et la mission de ses militaires est limitée, après la bataille de Konna, à l'assistance à l'installation de la force africaine au Mali.
Les Etats de la CEDEAO qui ont pressé la France d’intervenir lui ont promis l’envoi de premiers contingents africains. De fait des éléments militaires non combattants, sénégalais et nigérians, sont arrivés à Sévaré, pour préparer l’arrivée de la force multinationale africaine (MISMA) dont le commandant en chef nigérian serait déjà sur place. Les chefs d’Etat de la CEDEAO ont immédiatement décidé cet envoi qui devrait être concrétisé au cours de la semaine prochaine (Communiqué du Président de la CEDEAO du 11/01/2013). Si l’on annonce triomphalement le début de la reconquête du Nord Mali, on s’engage dans la phase opérationnelle, alors que toutes les questions préalables, y compris le financement, n’ont pas encore été réglées. Est-ce forcément très grave ?
Les groupes islamistes ont profité des circonstances pour lancer une offensive majeure : la saison froide qui facilite l’action militaire, le chaos qui règne au sein de l’appareil d’Etat malien, le retard pris par la CEDEAO dans la mise en place de la force africaine, la diversion créée par les perspectives de négociation au Burkina-Faso et le refus par la France de s’engager militairement. Sur ce dernier point ils se sont trompés puisque, la France a assumé ses responsabilités lorsque l’existence même du Mali a été menacée. Son attitude a été unanimement saluée, mais le changement de scénario depuis l’adoption de la résolution 2085 lui impose une forme d’improvisation, y compris sur le plan juridique. L'argumentation française est un peu scabreuse. Qu'on en juge.

II. La légalité de l'intervention
L'intervention n'a pas été autorisée par le Conseil de sécurité. La France n'y songeait pas au moment de la rédaction des résolutions. La déclaration du Conseil du 10 janvier n'en fait pas non plus mention.
La Déclaration présidentielle du 10 janvier 2013
"Les membres du Conseil de sécurité se déclarent gravement préoccupés par les mouvements militaires et les attaques de groupes terroristes et extrémistes qui ont été signalés dans le nord du Mali, et en particulier par la prise de la ville de Konna, près de Mopti.  Cette sérieuse détérioration de la situation compromet encore davantage la stabilité et l’intégrité du Mali et constitue une menace directe pour la paix et la sécurité internationales.
Les membres du Conseil rappellent les résolutions 2056 (2012), 2071 (2012) et 2085 (2012) adoptées en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies, ainsi que la nécessité pressante de contrer la menace terroriste croissante au Mali.
Les membres du Conseil demandent à nouveau aux États Membres d’accompagner le règlement de la crise au Mali et, en particulier, de fournir une assistance aux Forces de défense et de sécurité maliennes afin d’atténuer la menace que représentent les organisations terroristes et les groupes qui y sont affiliés.
Les membres du Conseil expriment leur volonté résolue de s’attacher à mettre pleinement en œuvre les résolutions du Conseil sur le Mali, en particulier la résolution 2085 (2012) dans tous ses aspects. Dans ce contexte, ils souhaitent que soit rapidement déployée la Mission internationale de soutien au Mali sous conduite africaine (MISMA).
Les membres du Conseil préconisent la publication immédiate d’une feuille de route politique convenue, prévoyant notamment la tenue de négociations sérieuses avec les Maliens non extrémistes dans le nord du pays et demandent instamment que la gouvernance démocratique soit intégralement rétablie".

La position de la France sur cette Déclaration du Conseil de sécurité
10 janvier 2013 - Mali - Remarques à la presse de M. Gérard Araud, représentant permanent de la France auprès des Nations unies
La France avait demandé une réunion en urgence du Conseil de sécurité sur la situation au Mali, qui est extrêmement grave puisque des groupes terroristes et extrémistes font mouvement vers le Sud. Ces groupes, lourdement armés, ont pris aujourd’hui la ville de Konna et menacent directement la ville de Mopti, qui compte plus de 100 000 habitants.
La France a condamné cette nouvelle offensive. Elle est aujourd’hui gravement préoccupée par la dégradation de la situation qui constitue une menace réelle, directe et immédiate à la paix et à la sécurité régionales et internationales.
Cette agression terroriste fragilise encore plus la stabilité du Mali et, ce faisant, celle de ses voisins. La pérennité de l’Etat malien et la protection des populations civiles sont désormais en jeu. Il y a urgence à agir contre cette menace et à œuvrer à rétablir la stabilité et l’unité du Mali, ainsi que le Conseil de sécurité a commencé à le faire en adoptant les résolutions 2056, 2071 et 2085.
Ces résolutions appellent en particulier tous les Etats membres à apporter leur assistance au règlement de la crise malienne sous tous ses aspects, militaires comme politique, et - je le souligne - à fournir un appui aux autorités de ce pays pour mettre un terme à la menace terroriste. La France est pleinement engagée dans leur mise en œuvre.
Ces derniers événements soulignent une nouvelle fois la nécessité de procéder au déploiement rapide d’une force africaine au Mali ainsi que de la mission européenne de formation et de conseil.

Point de presse du 11/01/2013
Q - Le président malien Dioncounda Traoré a envoyé hier une lettre au président François Hollande pour lui demander l'aide militaire de la France. L'ambassadeur de France à l'ONU a promis une réponse de la France aujourd'hui. Quelle est la réponse de la France ?
R - La situation est extrêmement grave. La pérennité de l'État malien et la protection des populations civiles sont désormais en jeu.
Nous sommes gravement préoccupés par cette agression caractérisée qui est une menace réelle, directe et immédiate à la paix et à la sécurité régionale et internationale.
C'est la raison pour laquelle la France a demandé hier soir une réunion en urgence du Conseil de sécurité des Nations unies. Ce dernier a dit unanimement sa profonde préoccupation et souligné la nécessité du déploiement rapide de la force africaine et de la mission européenne.
Comme le président de la République vient de l'indiquer, la France répondra, aux côtés de ses partenaires africains, à la demande des autorités maliennes. Elle le fera strictement dans le cadre des résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies et elle sera prête à arrêter l'offensive des terroristes si elle devait se poursuivre.
La situation est pour l'instant calme à Bamako. Toutes les mesures ont été prises pour assurer la sécurité de la communauté française au Mali. Nous invitons nos compatriotes à rester vigilants et à rester en contact avec notre ambassade.

La position des Etats-Unis sur la Déclaration
Remarks at a Press Gaggle Following UN Security Council Consultations on Mali;  U.S. Permanent Representative to the United Nations Susan E. Rice, U.S. Mission to the United Nations (10/01/2013)
"Reporter: How serious is what’s happening in Mali now?
Ambassador Rice: It looks very serious, and there was a great deal of expression of concern about the deteriorating situation, discussion also of the letter from the president of Mali that requested external support, particularly from the French. We have a press statement that the president of the Council will read shortly.
Reporter: What can the Security Council do?
Ambassador Rice: The Security Council can encourage swift implementation of 2085. They can keep the heat on and the pressure on for a credible political process and for ECOWAS and the AU to grip their role. They can support and encourage the Malian government’s sovereign request for assistance from friends and partners in the region and beyond. Obviously, it’s up to those external players to decide what they wish to do, but I think there was clear-cut consensus about the gravity of the situation and the right of the Malian authorities to seek what assistance they can receive.
Reporter: As developments are unfolding today and the seizure of this new town, is this having some in the Council wonder whether, you know, that this sort of indicates that the Council’s moving too slowly on this?
Ambassador Rice: No. I don’t think that was the perception. I mean, there may be—we’ve all been encouraging ECOWAS—frankly since the Council trip to West Africa last spring—to present a viable plan as soon as possible, and even today the plan to our minds still requires refinement. But the point is not that. The point is that we’ve got extremists who have very worrying if not nefarious ambitions that need to be thwarted and whether—the best would have been if the Malian army had the capacity and the will to do so back last spring and even still today. And one of the things we discussed is the extent to which the Malians are ready and willing to defend their own country.
Reporter: Did the President ask for help this week?
Ambassador Rice: There was a letter that was just sent from the president of Mali to the Secretary-General—the copies of which were provided to the Council—which requested support.
Reporter: Is there a sense of next steps?
Ambassador Rice: As I said, the President of the Council is going to read a press statement shortly. I think we all will follow this very closely, and there’s, I think, a probability that we may need to come back together to discuss this in the coming days.
Reporter: Did the president of Mali request specific kinds of military support? Troops?
Ambassador Rice: It wasn’t specific, but it basically said, “help, France.”
Reporter: Has the United States decided what help it’s going to give to the international force? Finance?
Ambassador Rice: We’re looking at providing financial support, absolutely.
Reporter: To ECOWAS? Or to?
Ambassador Rice: To those who would be in AFISMA."

Les dispositions pertinentes de la Résolution du 13 décembre 2012 :
"6.    Souligne que la réunion et le redéploiement des Forces de défense et de sécurité maliennes dans tout le territoire du pays revêtent une importance vitale si l’on veut assurer à longue échéance la sécurité et la stabilité du Mali et protéger le peuple malien;
7.    Demande instamment aux États Membres et aux organisations régionales et internationales de fournir aux Forces de défense et de sécurité maliennes un soutien coordonné sous forme d’aide, de compétences spécialisées, de formation, y compris en matière de droits de l’homme et de droit international humanitaire, et de renforcement des capacités, en concordance avec les impératifs intérieurs, afin de rétablir l’autorité de l’État malien sur la totalité du territoire national, de préserver l’unité et l’intégrité territoriale du Mali et d’atténuer la menace que représentent les organisations terroristes et les groupes qui y sont affiliés, et les prie d’informer régulièrement le Secrétariat de ce qu’ils auront fait dans ce sens;
8.    Prend note de l’attachement des États Membres et des organisations internationales à la reconstitution des capacités des Forces de défense et de sécurité maliennes, y compris le déploiement au Mali d’une mission militaire de l’Union européenne chargée de dispenser auxdites forces une formation militaire et des conseils;"

Observations sur la Déclaration
Le Conseil a été réuni pour répondre à une demande de soutien que le Président intérimaire du Mali lui a adressée. Il avait connaissance d'une seconde lettre sollicitant l'aide de la France. Les membres ont admis unanimement que le Mali devait être en mesure de solliciter toute l'aide qu'il pourrait recevoir dans la situation d'urgence et de gravité qui était la sienne. Néanmoins la Déclaration ne fait pas référence à ce droit de demander une aide. Sans doute, les Etats-membres ou certains d'entre eux ont-ils estimé qu'il n'appartenait pas au Conseil de se prononcer sur cette question. Le soutien du Conseil s'est exprimé dans une formule qui peut être considérée comme une interprétation extensive de la Résolution : "Les membres du Conseil demandent à nouveau aux États Membres d’accompagner le règlement de la crise au Mali et, en particulier, de fournir une assistance aux Forces de défense et de sécurité maliennes afin d’atténuer la menace que représentent les organisations terroristes et les groupes qui y sont affiliés."  Aucune forme d'assistance n'est exclue et, par conséquent, une assistance armée serait possible.
On est approximativement dans le registre des "autorisations implicites" du Conseil de sécurité. Néanmoins l'interprétation visant à fonder une telle "autorisation" émane d'une déclaration formelle et unanime des membres du Conseil. Elle a été acceptée par les trois membres africains du Conseil, la Chine, la Russie, etc. On outre on commettrait un contresens en affirmant que la Résolution aurait implicitement autorisé l'intervention militaire française. Disons plutôt que cette dernière est pleinement compatible avec la Résolution. Effectivement la France considère qu'elle ne fonde pas son droit d'intervention qu'elle appuie sur le droit de légitime défense, donc sur un élément extérieur aux résolutions pertinentes.

La légitime défense collective
Les déclarations des autorités françaises inscrivent l'intervention dans la perspective des résolutions du Conseil de sécurité dont elle concourt à la mise en oeuvre. Elles soulignent surtout que la France n'agit pas pour défendre ses intérêts propres, mais qu'elle répond à la demande d'assistance du Mali qui fait face à une agression armée extérieure menaçant son existence même. Aucune référence formelle n'est faite à l'article 51 de la Charte de l'ONU (légitime défense). Toutefois la référence implicite est évidente lorsque la France déclare sans délai son inititiative au Conseil de sécurité dès le 11 janvier. En effet cette disposition de la Charte impose une telle déclaration. Concrètement l'intervention française échapperait donc au contrôle a priori du Conseil de sécurité.
Le régime de la légitime défense peut-il être étendu à une agression terroriste ? Dans l'Avis sur le Mur... la Cour internationale de Justice a estimé que "L'article 51 de la Charte reconnaît  ainsi l'existence  d'un  droit  naturel de légitime défense en cas d'agression  armée par un Etat contre un  autre Etat. Toutefois, Israël ne prétend pas que les violences dont il est victime soient imputables à un  Etat étranger" (Avis consultatif du 9 juillet 2004, Conséquences juridiques de l'édification d'un mur dans le territoire palestinien occupé, § 139).
On peut soutenir que les agressions terroristes les plus graves menaçant l'existence même de l'Etat entrent dans le domaine d'exercice du droit naturel de légitime défense. Aucun Etat ne se rallierait à une conclusion contraire, malgré l'opinion de la Cour.





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