2 mai 2013

ACTU : Une experte de l'ONU exhorte l'Argentine à garantir l'indépendance de la justice

Catherine MAIA

La Rapporteuse spéciale des Nations Unies sur l'indépendance des juges et des avocats, Gabriela Knaul, a appelé le 30 avril le Gouvernement de l'Argentine à respecter l'indépendance de la justice, alors que des réformes lancées au début du mois menacent le processus électoral au sein du Conseil de la magistrature, qui nomme les juges. « L'État a la responsabilité d'assurer l'indépendance de la justice en respectant les lois et les normes internationales », souligne Mme Knaul dans un communiqué de presse.

La semaine dernière, la Chambre des députés du Parlement argentin a décidé de changer la procédure de nomination des membres du Conseil de la magistrature. La proposition de loi, qui doit être approuvée par le Sénat avant d'entrer en vigueur, prévoit l'élection au suffrage universel des membres du Conseil, avec des candidats présentés par les différents partis politiques. « Donner aux partis politiques la possibilité d'organiser l'élection des directeurs, c'est faire courir un risque à l'indépendance du Conseil de la magistrature et compromettre les principes de séparation des pouvoirs et de l'indépendance de la justice, deux éléments fondamentaux de tout système démocratique et de l'état de droit », explique Mme Knaul.

Selon les médias, le texte de loi devrait réduire à une simple majorité le vote pour les membres du Conseil, ouvrant ainsi la voie au Gouvernement pour s'appuyer sur sa majorité pour écarter des juges, alors que la majorité actuelle requise est aux deux-tiers. « Cette disposition […] est contraire à l'article 14 du Protocole facultatif au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, qui porte sur l'indépendance de la justice », a rappelé la Rapporteuse spéciale.

La proposition modifie également les conditions préalables pour être candidat au Conseil, et réduit à la simple majorité le vote nécessaire pour adopter des décisions, sans possibilité de faire appel. « J'appelle l'Argentine à mettre en place des procédures claires et des critères objectifs pour le renvoi des juges et les mesures disciplinaires à leur encontre et pour garantir un processus efficace par lequel les juges peuvent remettre en question les décisions prises afin de sauvegarder l'indépendance de la justice », conclut Mme Knaul.

Ce texte, critiqué également par les ONG Human Rights Watch et Transparency International, a déjà suscité des protestations d’organisations d’avocats, de magistrats et de défenseurs des droits de l’homme en Argentine.

A Buenos Aires, le ministère des Relations extérieures a réagi aux propos de Gabriela Knaul, exprimant son « mécontentement » : « Les termes employés s’éloignent non seulement des normes d’éthique et d’indépendance attendues d’un mécanisme spécial tel que celui du rapporteur [de l’ONU], mais leur manque d’impartialité, de tact et d’équilibre représentent une entorse au mandat qui lui a été confié ».

Le 18 avril, des centaines de milliers d'Argentins ont manifesté contre le gouvernement péroniste de Cristina Kirchner, à Buenos Aires et en province. Le projet de réforme de la justice était un des motifs des manifestations.

Sources : ONU / Le Monde

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