13 octobre 2017

ACTU : L'Unesco déplore la décision des États-Unis de se retirer de l'Organisation

Catherine MAIA

En moins d’un an, après s’être retirés de l’Accord de Paris sur le climat de 2015, et alors qu’ils s’apprêtent à fragiliser l’Accord de Vienne sur le nucléaire iranien de 2015, les États-Unis ont annoncé, le 12 octobre, qu’ils quitteraient fin 2018 l'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture (Unesco), mais y conserveraient le statut d'observateur non membre. Sous couvert de protection du patrimoine, l'Organisation aurait, selon eux, adopté des résolutions défavorables à l’État hébreu, car niant les liens entre les juifs et leurs sites historiques.

La Directrice générale de l'Unesco, Irina Bokova, a aussitôt dit regretter profondément cette décision qui porte un coup sérieux au multilatéralisme.

Dans une déclaration publiée après l'annonce du retrait des États-Unis, qui a été officiellement notifié par une lettre du Secrétaire d'État américain, Rex Tillerson, elle a déclaré : «C'est une perte pour l'Unesco. C'est une perte pour la famille des Nations Unies. C'est une perte pour le multilatéralisme».

Le Secrétaire général de l'ONU, António Guterres, s'est également fait l'écho des regrets de la Directrice générale de l'Unesco. «Le Secrétaire général regrette également profondément le retrait des États-Unis, compte tenu du rôle majeur que le pays joue à l'Unesco depuis sa création», a déclaré son porte-parole, Farhan Haq, lors d'un point de presse au siège de l'ONU à New York.

«Au moment où la lutte contre l'extrémisme violent appelle à un renouveau des efforts pour l'éducation et le dialogue des cultures, il est regrettable que les États-Unis se retirent de l'agence des Nations Unies chargée de mener ce combat», a souligné la Directrice générale de l'Unesco. Et d’ajouter : «Au moment où les conflits continuent de déchirer les sociétés à travers le monde, il est regrettable que les États-Unis se retirent de l'Organisation des Nations Unies chargée de promouvoir l'éducation pour la paix et la protection de la culture».

En 2011, Washington avait déjà suspendu sa contribution financière, représentant 22% du budget de l'Unesco, à la suite de l'admission de la Palestine en qualité d'État membre à part entière de l'Organisation. De fait, une loi américaine interdit le financement de toute entité onusienne qui comprendrait en son sein l’État palestinien. Cette décision, qui a conduit, deux ans plus tard, à la suspension du droit de vote des États-Unis à l’assemblée générale de l'Unesco, a également provoqué une accumulation d’arriérés de paiement qui devaient bientôt atteindre 600 millions de dollars (506 millions d’euros).

«Malgré la suspension de leur contribution financière depuis 2011, nous avons approfondi le partenariat entre les États-Unis et l'Unesco, et celui-ci n'a jamais été aussi fort», a souligné Mme Bokova, citant pour exemple les nombreuses coopérations entre son organisation et le Gouvernement américain, ainsi que les entreprises, universités et organisations de la société civile américaines, notamment dans la prévention de l'extrémisme violent par l'éducation et les médias, la lutte contre l'antisémitisme et la prévention des génocides, l'éducation des filles et le développement durable.

«Le partenariat entre l'Unesco et les États-Unis a été profond, car il s'est appuyé sur le fondement de valeurs partagées», a-t-elle rappelé. De fait, le travail de l'Unesco en faveur de l'alphabétisation et de l'éducation de qualité, de la mobilisation des nouvelles technologies pour l'apprentissage, de la coopération scientifique, de la liberté d'expression, de l'autonomisation des filles et femmes et de l'appui des sociétés en situation d'urgence, face aux catastrophes et aux conflits «répond aux préoccupations du peuple américain».

Pour celle qui achève dans les prochains jours son mandat de huit ans à la tête de l'Unesco, et qui sera remplacée par la Française Audrey Azoulay, la mission de l'Organisation n'est pas terminée. «Nous continuerons d'avancer pour construire un 21e siècle plus juste, plus pacifique et plus équitable, et pour cela l'Unesco a besoin de l'engagement de tous les États», a-t-elle rappelé.

Dans un communiqué, le Président de l'Assemblée générale de l'ONU, Miroslav Lajčák, a également regretté la décision des États-Unis de se retirer de l'Unesco, soulignant le rôle joué par l'organisation dans la construction de sociétés pacifiques, justes et équitables à travers l'éducation, les sciences, la culture et la communication.

M. Lajčák a rappelé que les États-Unis ont contribué à la création de l'Unesco en 1945 et qu'ils ont depuis utilisé sa voix et son rôle en tant que membre pour contribuer aux initiatives qui ont façonné le monde. Au regard des enjeux pour la paix qui n'ont jamais été aussi importants, le Président de l'Assemblée générale a affirmé que «la coopération, le dialogue et les partenariats sont plus importants que jamais».

Cette décision américaine – qui devrait être suivie par Israël ayant annoncé qu’il allait également «préparer» son retrait – n’est pas une première pour les États-Unis. En 1984, le président Ronald Reagan avait déjà choisi de se retirer de l’Unesco en avançant les partis pris anti-israéliens persistants de l’Organisation, outre sa proximité trop grande avec l’Union soviétique. 18 ans plus tard, en 2002, le président George W. Bush décidait de réintégrer l’Unesco, à une époque où il cherchait à rallier des soutiens dans la perspective du renversement du régime iranien de Saddam Hussein, l’année suivante.



Source : ONU

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