20 mars 2019

POINT DE VUE : Des changements et vite pour sauver l’Europe

Olivier VÉDRINE

L’histoire de la construction de l’Union européenne a débuté il y a plus de 60 ans. Traditionnellement, la faible participation aux élections européennes traduit davantage un manque de politisation du débat européen qu’un réel désintérêt de la population. L’Union européenne se trouve aujourd’hui à un tournant de son histoire et son avenir dépend en grande partie de la manière dont elle répondra à deux grands défis auxquels elle est actuellement confrontée.

D’une part la paralysie des institutions causée par l’inefficacité du Conseil européen et le contrôle hypercentralisé de la Commission européenne, d’autre part, «la paralysie des esprits» comme le démontrait déjà le «non» il y a quelques années de la France et des Pays-Bas lorsqu’on leur a demandé de voter sur le traité constitutionnel en 2005 et maintenant le taux croissant de l’euroscepticisme et des populismes dont le Brexit n’est qu’un symptôme.

De nos jours, nous sommes confrontés avec le Brexit et les protestations des gilets jaunes à des crises politiques majeures dans l’UE. Le Brexit est le résultat de la politique néolibérale de Margaret Thatcher qui a brisé le tissu social du Royaume-Uni en créant deux Royaume-Uni bien différents, le premier celui des gens avec un emploi et un avenir et le second celui des sans-emploi, ceux de la périphérie des grandes villes, ceux des zones rurales, des citoyens sans espoir dans l’avenir. Pour les premiers, il a été facile de croire en l’intégration européenne et ils ont voté naturellement contre le Brexit. Pour les seconds, l’intégration européenne ne signifie plus rien, ce n’est plus qu’un système néolibéral où ils ne peuvent pas trouver leur place, ils ont voté pour le Brexit comme une revanche et une vengeance.

Comment inviter à nouveau les peuples dans le processus d’intégration européenne? Comment faire revivre le rêve des pères fondateurs de la construction européenne? La réponse est simple: moins de Bruxelles, plus d’Europe! Pour de nombreux citoyens européens, l’UE c’est la Commission européenne, un groupe de froids technocrates sous l’influence de lobbyistes, obéissants au dogme du néolibéralisme.

Même si nous arrêtons le processus du Brexit, nous ne gagnerons pas si nous ne proposons pas une vision alternative à l’intégration européenne technocratique et néolibérale. Si nous ne proposons aucune alternative, un nouveau Brexit se produira et pas seulement au Royaume-Uni.

Nous avons l’euro et l’union monétaire est réalisée mais sans union politique, sans politique sociale européenne commune, sans harmonisation fiscale. Les citoyens ont le droit de penser que cette voie de l’intégration européenne ne leur est pas destinée, qu’elle ne concerne que le monde de l’économie, de la finance et des grandes entreprises. Les peuples d’Europe se sentent européens, ils comprennent qu’il est nécessaire que l’Europe soit unie, mais ils comprennent de plus en plus que l’Europe dont ils ont besoin et qu’ils désirent n’est pas représentée par la Commission européenne ni par le Conseil européen.

Enfin, le plus important pour une démocratie, c’est la société civile elle-même: c’est le désir d’adhérer à un modèle. Qui peut mieux représenter cette société civile et les peuples européens: c’est le Parlement européen! Concevoir un rêve européen est essentiel, le moteur et le soutien de ce rêve c’est le Parlement européen, la seule véritable institution européenne élue et démocratique. Le Parlement européen pourrait élire un gouvernement pour l’UE; les citoyens européens sentiraient la différence avec notre actuelle Commission européenne technocratique et l’inutile Conseil européen.



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