Catherine MAIA
Le 20 juin 2019, le Conseil de sécurité des Nations Unies a adopté, à l'unanimité de ses 15 membres, la Résolution 2475 (2019), toute première résolution en faveur de la protection des personnes handicapées dans les situations de conflits armés.
Cette avancée fait suite à un appel poignant de Nujeen Mustafa – une Syrienne de 20 ans née avec une paralysie cérébrale – à ce que devienne visible la situation de ces "invisibles". Devenue militante des droits des handicapés dans les conflits armés après avoir dû elle-même effectuer un long voyage depuis Alep vers l'Allemagne, Nujeen Mustafa était venue à l'ONU, le 24 avril dernier, pour exhorter le Conseil de sécurité à agir en faveur des personnes handicapées dans les conflits.
En l’espèce, l’action prend la forme d’une résolution, rédigée à l’initiative de la Pologne et la Grande-Bretagne, comprenant 11 recommandations.
Dans le préambule, le Conseil de sécurité se déclare gravement préoccupé par les conséquences « disproportionnées » des conflits armés sur les personnes handicapées, qui sont délaissées, soumises à des violences et privées de l’accès aux services de base. Il proclame que « tous les droits de l’homme et toutes les libertés fondamentales sont universels, indivisibles, intimement liés et interdépendants et qu’il est nécessaire de garantir aux personnes handicapées, y compris les personnes présentant des déficiences physiques, intellectuelles, psychosociales ou sensorielles, et aux personnes marginalisées du fait de leur handicap, la possibilité d’exercer pleinement ces droits et libertés sans subir de discrimination ».
À cet égard, le Conseil rappelle l’existence de la Convention relative aux droits des personnes handicapées de 2006, mais également les initiatives internationales en cours concernant spécifiquement cette catégorie d’individus, telle que la stratégie des Nations Unies pour l’inclusion des personnes handicapées et les directives sur l’inclusion des personnes handicapées dans l’action humanitaire.
Il prend acte de la Charte pour l’inclusion des personnes handicapées dans l’action humanitaire de 2006 et insiste, par ailleurs, sur l’utilité d’offrir en temps voulu aux civils handicapés touchés par les conflits armés une assistance « durable, adaptée, inclusive et accessible », y compris un appui à la réintégration et à la réadaptation et un soutien psychosocial, afin de répondre efficacement aux besoins qui leur sont propres, spécifiquement ceux des femmes et des enfants handicapés.
Les États membres sont exhortés, en particulier, « à faire en sorte que les personnes handicapées, y compris les organisations qui les représentent, soient véritablement associées à l’action humanitaire, à la prévention et au règlement des conflits et aux activités de réconciliation, de reconstruction et de consolidation de la paix, et à consulter les spécialistes de la prise en compte de la question du handicap » (§ 6).
Le Conseil proclame, par ailleurs, l’importance « de mieux faire connaître les droits et les besoins particuliers des personnes handicapées au personnel des Nations Unies chargé du maintien et de la consolidation de la paix et de renforcer les moyens dont ils disposent en la matière » (§ 7), ainsi que son intention d’« inviter des personnes handicapées, y compris des membres des organisations qui les représentent, à lui présenter des exposés sur les thèmes et zones géographiques qui l’intéressent et à envisager d’ajouter au programme de ses missions la tenue de débats interactifs avec des personnes handicapées et les organisations locales qui les représentent » (§ 10).
La résolution, a expliqué le délégué de la Pologne, répond à trois objectifs : (1) mieux faire connaître les droits et les besoins spécifiques des personnes handicapées au personnel des Nations Unies chargé du maintien et de la consolidation de la paix ; (2) disposer en temps voulu de données et d’informations précises concernant les effets des conflits armés sur les personnes handicapées ; et (3) les associer véritablement à l’action humanitaire, à la prévention et au règlement des conflits et aux activités de réconciliation, de reconstruction et de consolidation de la paix.
Tandis que 15% de la population mondiale vit avec un handicap, nous devons et nous pouvons collectivement faire davantage pour la défense des droits des personnes en situation de handicap, garantir la prise en compte de leurs besoins spécifiques et lutter contre les discriminations, en particulier en situation de conflits armés, a affirmé le délégué de la France.
Bien que ne s’opposant pas à la résolution, aussi bien la Russie que la Chine ont toutefois émis des réserves à l’égard d’un texte dont elles considèrent qu’une série de dispositions n’entrent pas dans le mandat du Conseil de sécurité, mais relèveraient du travail des organes onusiens chargés des questions humanitaires.
MULTIPOL - Réseau d'analyse et d'information sur l'actualité internationale (http://reseau-multipol.blogspot.com)
21 juin 2019
ACTU : Adoption de la première résolution du Conseil de sécurité sur la protection des personnes handicapées dans les conflits armés
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Sécurité internationale/Défense
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