15 décembre 2019

OUVRAGE : M. Vianney-Liaud, La juridiction des Chambres extraordinaires au sein des tribunaux cambodgiens

Mélanie VIANNEY-LIAUD

Les atrocités commises sous l’ère des Khmers rouges au Cambodge (1975-1979) sont restées impunies pendant de longues années. Créées en 2003 par l’ONU et le Gouvernement cambodgien, lancées en 2006 afin de juger ces crimes, les Chambres extraordinaires au sein des tribunaux cambodgiens (CETC) sont communément placées dans la catégorie des tribunaux dits « internationalisés » composée de juridictions dont la nature mixte résulte d’une hybridation entre éléments nationaux et internationaux.

Les CETC comptent trois chambres, constituées chacune de juges étrangers et cambodgiens. Les organes de poursuites et d’instruction sont dirigés par un procureur et un juge d’instruction nationaux ainsi que par leurs homologues internationaux.

À ce jour, neuf individus – anciens hauts dirigeants et cadres khmers rouges – ont été mis en examen devant les CETC. Trois d’entre eux ont été condamnés à la réclusion criminelle à perpétuité. Une affaire fait l’objet d’un appel, une autre s’est soldée par un non-lieu. Dans les trois derniers dossiers, les instructions préparatoires, très controversées, ont chacune été clôturées par deux décisions contraires, une ordonnance de renvoi devant la juridiction de jugement rendue par le juge d’instruction international et une de non-lieu rendue par son homologue cambodgien.

Alors que l’activité des CETC approche de son terme, l’objet de cette étude est d’évaluer la juridiction en procédant à son analyse institutionnelle et fonctionnelle. Treize années après leur mise en place, les CETC ont-elles atteint leur objectif : juger les auteurs des graves exactions commises pendant la période des Khmers rouges dans le cadre de procédures conformes aux normes internationales de justice et dans le respect de la souveraineté du Cambodge ? Les constatations tirées du bilan des Chambres extraordinaires sont intrinsèquement liées à leur caractère internationalisé. L’hybridité de la juridiction, cependant, n’est pas le seul facteur à avoir influencé la justice des CETC. D’autres éléments ont pesé sur l’efficience de la juridiction, tout aussi déterminants (influence culturelle du Cambodge, lacunes structurelles du système judiciaire national, modalités de financement du tribunal, etc.). Ils sont étudiés dans cet ouvrage afin de distinguer ce qu’il convient de garder de l’expérience de cette juridiction pénale internationalisée, des écueils à éviter.


TABLE DES MATIÈRES
Sommaire
Avertissement
Préface, Thierry-Serge Renoux
Avant-propos, Marcel Lemonde
Abréviations et sigles
INTRODUCTION GÉNÉRALE

Titre préliminaire. L’ambition raisonnée d’une justice pénale internationalisée : la création des CETC

Chapitre 1. L’étonnante absence de négociations entre 1979 et 1997
Section 1. Les facteurs juridiques
Section 2. Les facteurs d’ordre politique
Chapitre 2. L’adoption complexe de textes fondateurs contestés
Section 1. L’adoption de la Loi et de l’Accord sur les CETC
Section 2. L’adoption du Règlement intérieur

PARTIE I. L’EFFICIENCE CRITIQUE
D’UNE JURIDICTION PÉNALE HYBRIDE :
LE CADRE DES CETC

Titre I. L’incohérence délétère d’une organisation duale

Chapitre 1. Des organes judiciaires divisés aux modalités de décision délicates
Section 1. Des bureaux judiciaires bicéphales adoptant des décisions conjointes
Section 2. Des chambres hybrides statuant à la majorité qualifiée
Chapitre 2. Une administration multiple et un financement incertain
Section 1. L’administration de la juridiction
Section 2. Le financement des CETC
Titre II. Une structure fragilisée par des acteurs aux statuts disparates

Chapitre 1. L’indépendance et l’impartialité non garanties des juges et des procureurs
Section 1. Des statuts différents et insuffisants
Section 2. Des possibilités de recours inadaptées
Chapitre 2. Une représentation légale précarisée par les inégalités entre avocats
Section 1. Des systèmes différents de représentation légale
Section 2. Une déontologie controversée

PARTIE II. L’EFFICACITÉ RELATIVE
D’UN DROIT PÉNAL MIXTE : LE RÉGIME JURIDIQUE DES CETC

Titre I. Les écueils partiels d’une procédure hétérogène

Chapitre 1. Une phase préparatoire « inquisitoire »
Section 1. La poursuite
Section 2. L’instruction
Section 3. Un contrôle de l’instruction étendu
Chapitre 2. Une phase du procès « internationalisée »
Section 1. Le procès en première instance
Section 2. L’appel
Titre II. L’exécution nationale d’un jugement international 

Chapitre 1. Une interprétation souple de la compétence
Section 1. La légalité des crimes relevant du droit international
Section 2. L’exclusion des crimes relevant du droit national
Section 3. La mise à l’écart des amnisties et des grâces
Chapitre 2. Une appréciation extensive de la responsabilité pénale
Section 1. Les formes de responsabilité de l’article 29 (nouveau
Section 2. L’entreprise criminelle commune
Chapitre 3. L’exécution par les autorités nationales d’une peine prononcée selon des règles internationales
Section 1. Un régime des peines incertain
Section 2. Des modalités « internationales » de fixation de la peine
Section 3. L’incarcération au Cambodge des personnes condamnées par les CETC

CONCLUSION GÉNÉRALE

La nécessité d’une procédure pénale internationale adaptée au jugement des crimes de masse
La participation des victimes aux procédures pénales internationales
La rentabilité de la justice pénale internationale

ANNEXES
I. Organisation des CETC
II. Le bureau de l’administration des CETC
III. Tableau comparatif des effectifs du personnel cambodgien et onusien au sein des organes des CETC
IV. Les juges et les procureurs des CETC
V. Liste des bailleurs des CETC
VI. Le budget des CETC (2005-2017
VII. La gouvernance et le financement des CETC (sources et flux
VIII. Le coût des juridictions pénales internationales et internationalisées
IX. Les projets de réparation dans le dossier 002
X. Principaux textes juridiques cités

Bibliographie
Table des matières 

 Mélanie VIANNEY-LIAUD, La juridiction des Chambres extraordinaires au sein des tribunaux cambodgiens, Bayonne, Institut Francophone pour la Justice et la Démocratie, 2019 (750 pp.)

Aucun commentaire :

Enregistrer un commentaire