La planète dispose de suffisamment de ressources pour nourrir l'ensemble de la population, a indiqué la FAO, l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture. Pourtant, le premier Objectif du Millénaire pour le Développement, qui vise à éradiquer l'extrême pauvreté et la faim, est loin d'être atteint. Lors d'une cérémonie organisée au siège de la FAO, à Rome, son directeur Jacques Diouf a rappelé que «le droit à l'alimentation a été formellement reconnu dans la Déclaration universelle des droits de l'Homme adoptée par les Nations Unies en 1948». Ce droit «implique une réorientation de l'idée de charité vers le concept de droit. Garantir à chaque être humain une alimentation adéquate et régulière ne constitue pas seulement un impératif moral et un investissement pouvant se traduire par des gains économiques énormes : c'est l'accomplissement d'un droit humain fondamental. Le monde a les moyens pour le réaliser», a proclamé Jacques Diouf.
«La reconnaissance du droit humain à l'alimentation impose aux États l'obligation de respecter, protéger et faciliter, et fournir si besoin est l'accès à l'alimentation», a affirmé la Haut Commissaire aux droits de l'Homme Louise Arbour dans un communiqué publié à Genève. Elle a rappelé que les droits de l'Homme étaient indivisibles et que le droit à l'alimentation était essentiel pour jouir des autres droits. Adopter une approche qui privilégie les droits de l'Homme dans leur ensemble est donc nécessaire pour assurer la sécurité alimentaire et permettre aux personnes de « tenir leur gouvernement pour responsable ».
Pour sa part, Jean Ziegler, le Rapporteur spécial des Nations Unies sur le droit à l'alimentation, a déploré que l'OMC, la Banque mondiale et le Fonds monétaire international «ne reconnaissent pas le droit à l'alimentation» et veulent régler ce fléau par le marché. Ces positions provoquent selon lui «une schizophrénie» à l'ONU. Ce problème n'épargne pas la Suisse. Ainsi, si le sociologue genevois salue l'action «magnifique» et le rôle de «pionnier» de la Direction du développement et de la coopération (DDC), il regrette que l'ambassadeur de Suisse à l'OMC «vote pour la libéralisation du commerce, donc contre les lois suisses sur la coopération».
Plus généralement, Jean Ziegler a parlé de «l'incohérence» des États dans un communiqué publié aujourd'hui. Alors que de nombreux États ont reconnu le droit à l'alimentation, et que beaucoup ont ratifié la Convention sur les droits de l'enfant, ils ont adopté des politiques commerciales qui auront des conséquences négatives sur le respect des droits humains dans d'autres pays, a-t-il dénoncé. Par ailleurs, le Rapporteur a qualifié la conversion du maïs, du blé, du sucre et de l'huile de palme en combustibles de «recette pour un désastre». Le risque de concurrence entre combustible et alimentation laissera les pauvres et les affamés «à la merci des prix croissants de l'alimentation, de la terre et de l'eau». Jean Ziegler a appelé à ce que le droit à l'alimentation soit respecté «par toutes les organisations intergouvernementales et par tous les acteurs non-étatiques, y compris les entreprises transnationales».