Carla Del Ponte s'exprimait lors d'une conférence de presse à l'issue de son dernier exposé en sa qualité de Procureur, devant le Conseil de sécurité. Ce dernier a en effet choisi le magistrat belge Serge Brammertz pour la remplacer à partir de janvier 2008. Carla Del Ponte avait été nommée pour la première fois en septembre 1999, son mandat ayant été renouvelé en 2003 et de nouveau au début de cette année.
«C'est vrai, nous avons arrêté et transféré à La Haye 161 accusés, et c'est important, mais après Milosevic, les deux principaux auteurs de crimes en ex-Yougoslavie sont Karadzic et Mladic», a insisté Carla Del Ponte.
Le 8 mars 1995, Radovan Karadzic, en tant que commandant suprême de la Republika Srpska, la République serbe autoproclamée en sécession de la Bosnie-Herzégovine, a donné l'ordre d'éliminer les enclaves musulmanes de Srebrenica et de Zepa. Ces ordres ont été mis en oeuvre par le général Ratko Mladic, dont les forces ont attaqué l'enclave le 11 juillet 1995, terrorisant la population et procédant à l'exécution sommaire de près de 7.900 musulmans bosniaques entre le 13 juillet et le 19 juillet 1995
«J'ai souligné devant le Conseil qu'il devrait prendre une décision : soit fermer le TPIY au délai fixé à 2008 ou 2010, soit le laisser en sommeil et le réactiver lorsqu'ils seront arrêtés», a dit la Procureur qui a transmis au président du Conseil une lettre des mères des victimes de Srebrenica.
Carla Del Ponte a insisté sur l'arrestation de Mladic, parce que l'on sait où il se trouve, en Serbie, et que l'Union européenne a les moyens de faire pression alors que ce pays doit signer son Accord d'Association avec l'Union, qui requiert l'unanimité de ses membres. Elle a aussi estimé que si Mladic était arrêté, le pays de la région dans lequel Karadzic se cache le remettrait sans doute au TPIY.
En réponse à une question, Carla Del Ponte a reconnu que l'OTAN n'avait pas pris les mesures nécessaires à l'arrestation de Karadzic et Mladic entre 1995, date à laquelle les mandats d'arrêt avaient été lancés, et 1998. «Mais après cette date, ils étaient en fuite et cachés en Serbie, où Milosevic était encore au pouvoir. Karadzic y est resté jusqu'en 2004 et Mladic y est toujours», a-t-elle expliqué. Elle a en revanche contesté l'idée d'une «conspiration» à l'heure actuelle pour les laisser en liberté.
La Procureur du TPIY a aussi reconnu que l'élection présidentielle serbe au mois de janvier 2008 et la question de l'indépendance du Kosovo rendraient la situation plus difficile, parce que les radicaux nationalistes en profitent.
Elle a évoqué à cet égard la situation «stupéfiante» de l'amitié de l'ancien chef de la Mission d'administration intérimaire des Nations Unies au Kosovo, Søren Jessen-Petersen, avec Ramush Haradinaj, ancien chef de guerre du mouvement indépendantiste de l'UCK, devenu Premier ministre malgré l'annonce d'une inculpation par le TPIY. Ce dernier avait démissionné rapidement, mais la situation avait sérieusement pesé sur les témoins se présentant devant le TPIY, a expliqué Carla Del Ponte.
Source : ONU