Le mandat d'arrêt se focalise sur la période entre janvier et mars 2003 et en particulier sur l'attaque du village de Bogoro le 24 février 2003, citant 3 chefs de crimes contre l'humanité et six chefs de crimes de guerre en Ituri, un territoire de l'Est de la RDC. Les crimes incluent meurtre, actes inhumains, traitements inhumains ou traitements cruels, le fait de faire participer activement des enfants de moins de 15 ans à des hostilités, esclavage sexuel, le fait de diriger intentionnellement des attaques contre la population civile, et pillage.
"L'arrestation et le transfert à la CPI du Colonel Ngudjolo marque un autre coup dur pour l'impunité dans l'un des conflits du monde les plus longs et les plus violents", a déclaré le coordinateur de la CCPI, William Pace. "L'arrestation par le gouvernement de la RDC de l'ancien chef de milice et actuel officier militaire du gouvernement pour crimes de guerre et crimes contre l'humanité est un exemple clair qui montre combien la coopération des Etats est essentielle au bon fonctionnement de la CPI, ce nouveau système de justice pénale internationale ratifié par 105 gouvernements."
"Cette arrestation apporte de l'espoir dans le sens où les victimes se sentent honorées par l'arrestation d'un homme qui bénéficiait de l'impunité du fait qu'il servait au sein des forces de l'armée nationale", a déclaré Eugène Bakama Bope, président du Club des Amis du Droit du Congo, une ONG membre de la CCPI. "Pour nous, les autres seigneurs de guerre tels que Peter Karim et Cobra Matata qui maintiennent un poste de pouvoir au sein de la hiérarchie militaire doivent également être poursuivis".
"Ce transfert confirme la détermination des autorités congolaises à refuser toute amnistie pour la commission des crimes internationaux. C'est ce qui avait été promis lors de la Conférence de paix aux Kivus en janvier dernier", a expliqué Christian Hemedi, coordinateur de la Coalition nationale de RDC pour la CPI. "La Coalition appelle le gouvernement congolais à adopter la loi de mise en œuvre du Statut de Rome de la CPI et réformer son système judiciaire pour être en conformité avec le Statut".
Lors de sa comparution initiale devant la CPI, le 11 février, la défense du chef de milice de la RDC a demandé à ce que la Cour se déclare incompétente et le remette en liberté provisoire : "On ne peut pas être jugé deux fois pour les mêmes faits, vous devez déclarer l'irrecevabilité" de la plainte, a plaidé Me Jean-Pierre Kilenda Kakengi Basila, choisi comme avocat pour cette première audience.
Il a affirmé que Mathieu Ngudjolo avait déjà été arrêté en octobre 2003 par la Mission de l'ONU en RDC (MONUC ) et jugé par le tribunal de grande instance de Bunia, capitale du district de l'Ituri, pour répondre selon lui des mêmes chefs d'accusation.
"Par ailleurs, mon client n'est pas en mesure d'entraver les travaux de votre Cour", a estimé Me Basila pour justifier la demande de libération provisoire. Il a expliqué que Mathieu Ngudjolo "n'a jamais pris la poudre d'escampette", même après qu'il eut appris par la presse que le Président congolais avait saisi le Procureur de la CPI. "Lui aussi tient à ce que toute la lumière soit faite sur les faits qui lui sont reprochés", a poursuivi l'avocat.
L'audience de confirmation des charges a été fixée au 21 mai prochain.

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Mathieu Ngudjolo Chui est un ressortissant de la RDC et le chef présumé du Front des nationalistes et des intégrationnistes (FNI). Il est actuellement un colonel dans l'armée nationale du gouvernement de la RDC, les Forces armées de la RDC (FARDC). Mathieu Ngudjolo Chui est le troisième suspect de la CPI transféré au centre de détention de Scheveningen. Thomas Lubanga Dyilo a été remis et transféré à La Haye en mars 2006 et Germain Katanga en octobre 2007. Le premier procès de la CPI contre Thomas Lubanga Dyilo, doit commencer le 31 mars 2008 et une audience de confirmation des charges se tiendra dans le premier semestre 2008 dans l'affaire contre Germain Katanga.