A cet effet, l'immigration clandestine, au même titre que la "radicalisation religieuse en terrain musulman et le développement de sectes fondamentalistes en terrain chrétien, l'implantation des groupes terroristes se réclamant d’Al-Qaida, l'apparition de nouvelles routes de la drogue, les trafics d’armes illicites, les réseaux de prolifération, le blanchiment d’argent et les risques sanitaires", n'a-t-il pas été identifiée dans le tout nouveau Livre blanc français sur la défense et la sécurité nationale comme l'un des problèmes de l'Afrique qui pouvait avoir des incidences directes sur les intérêts français et plus globalement ceux de l'Europe ? Au même titre, "l’exposition des États du Maghreb au transit, voire à l’immigration de migrants d’Afrique subsaharienne en nombre toujours plus élevé (plusieurs millions dans la zone du Maroc à la Libye)" n'a-t-il pas été identifié comme un facteur préoccupant ?
Alors loin de vouloir juger toutes ces nouvelles tendances, mais plutôt d'en observer la nature et les évolutions, on serait tenté, face à l'une des raisons avancées pour ce resserrement et à la pénalisation des politiques de contrôle migratoire, à savoir que c'est l'un des moyens de mieux assurer l'accueil et l'intégration des étrangers (étrangers que l'Europe ne rejette pas), de relever les échecs ou le peu de résultats, lorsque de telles initiatives ont existé, les incohérences et paradoxes, des politiques d'intégration, de lutte contre les discriminations et contre la xénophobie. Que fait ou qu'a fait l'Europe pour l'accueil de certains de ses immigrés réguliers et légaux ? Que fait ou qu'a-t-elle fait pour certains de ses nationaux issues comme on dit de l'immigration (de première, deuxième troisième, etc. génération) qui continuent à être discriminé ? Politique d'intégration, lutte contre les discriminations, autres combats ? Il n'est bien sûr question d'affirmer que rien n'est fait par rapport à ces problèmes. Néanmoins, si l'on suit cette logique, on se réjouit d'avance de meilleurs lendemains pour ces immigrés légaux et réguliers vivant dans les pays européens. On ne peut toutefois pas s'empêcher de se dire qu'il est certainement plus facile pour l'Europe et les pays européens, pour des raisons domestiques et du fait de leur position internationale, de s'attaquer à l'immigration, fut-elle légale ou non, que de penser et de mettre en oeuvre des politiques d'intégration.
Depuis qu'elle est en discussion et plus singulièrement depuis qu'elle a été votée, cette directive ne cesse de soulever des réactions d'indignation. La plus célèbre est sans doute l'appel du président Bolivien Evo Morales, dont je vous propose de lire un extrait :
Au nom du peuple de Bolivie, de tous mes frères du monde, je fais appel à la conscience des dirigeants et citoyens pour que ne soit pas approuvé le texte de la "directive retour".
Jusqu’à la fin de la Seconde Guerre mondiale, l’Europe était un continent d’émigrants. Des dizaines de millions d’habitants partirent pour les Amériques, pour coloniser, échapper aux famines, aux crises financières, aux guerres ou aux totalitarismes européens et à la persécution des minorités ethniques.
Aujourd’hui, je suis avec préoccupation le processus de ladite "directive retour". Ce texte, validé le 5 juin dernier par les ministres de l’Intérieur des 27 pays de l’Union européenne, doit être approuvé le 18 juin par le Parlement européen. Je perçois qu’il durcit de manière drastique les conditions de détention et d’expulsion des migrants sans papiers, quel qu’ait été leur temps de séjour dans les pays européens, leur situation de travail, leurs liens familiaux, leur volonté et le succès de leur intégration.

* Texte également reproduit sur le blog de l'auteur : Un oeil sur la politique internationale.