Malgré ce renouveau de la pensée juridique dans un domaine quelque peu négligé du droit des conflits armés, nombre de questions n’ont toujours pas été résolues. À bien des égards, la notion même d’occupation, et par conséquent la portée des règles applicables, est encore incertaine. Quelles différences y a-t-il entre l’invasion d’un territoire et son occupation ? La présence physique des troupes étrangères est-elle une condition sine qua nonou un contrôle à distance suffit-il pour qu’il y ait occupation? Quelle ligne faut-il tracer entre l’occupation pacifique et belligérante ? Selon quels critères la volonté du souverain légitime doit-elle ici être évaluée ? Quand est-ce que l’occupation se termine ?
Par ailleurs, les occupations modernes se déploient le plus souvent sous un mandat de la communauté internationale organisée, en l’occurrence du Conseil de sécurité. Leur mission est d’accomplir, dans un territoire en butte à de graves crises, une mission de reconstruction de l’État et de consolidation de la paix à long terme par la transformation des structures politiques et sociales locales. Or, il est difficile de réconcilier cet objectif avec le caractère conservateur du droit de l’occupation, qui interdit aux forces étrangères de modifier la législation et les institutions locales. Enfin, le contenu même de la protection juridique accordée aux populations civiles sous occupation suscite lui aussi des interrogations.
L’analyse des règles issues du droit des conflits armés ne suffit plus à un examen complet de cette question. Elle s’enrichit désormais de l’apport complémentaire du droit des droits de l’homme dont l’applicabilité est reconnue autant en temps de paix que de conflit armé. Se pose dès lors la question de l’articulation de ces deux régimes juridiques. Cet ouvrage tente ainsi de brosser un tableau moderne du droit de l’occupation de guerre, matière riche et complexe.

CHAPITRE I. – Repères historiques dans l’évolution de l’occupation de guerre
A. La phase de la guerre-patrimoniale
B. La phase de la guerre nationale
C. La phase des interventions armées pluri-fonctionnelles : des interventions «de rétablissement et de consolidation de la paix» aux interventions par des coalitions autoproclamées d’Etats (1990-...)
CHAPITRE II. – Le champ d’application du droit de l’occupation
A. La notion d’occupation : l’applicabilité ratione materiae du droit de l’occupation
B. Les personnes protégées : le champ d’application ratione personae du droit de l’occupation
C. Le début et la fin de l’occupation : l’applicabilité ratione temporis du droit de l’occupation
CHAPITRE III. – Le degré de résistance du droit de l’occupation à la dérogation
A. Le principe de stabilité juridique dans le droit de l’occupation
B. La portée du principe de stabilité du droit de l’occupation
C. Etude de cas : l’occupation de l’Irak (2003-2004, et au-delà?)
CHAPITRE IV. – Le contenu normatif du droit de l’occupation
A. Le plan des régimes juridiques : la complémentarité du droit international humanitaire et des droits de l’homme en temps d’occupation
B. Le plan des normes : vers un régime juridique global de l’occupation


Robert KOLB, Sylvain VITÉ, Le droit de l’occupation militaire : perspectives historiques et enjeux juridiques actuels, Bruxelles, Bruylant, collection de l'Académie de droit international humanitaire et de droits humains de Genève, n°3 (482 pp.)