« En accord avec les recommandations de 2009 du Comité des droits de l’homme, l’Espagne a été notifié de l’obligation du pays à révoquer sa loi d’amnistie, qui n’est pas conforme au droit international des droits de l’homme », a déclaré M. Colville. « Les juges ne doivent pas faire l’objet de poursuites judiciaires pour avoir fait leur travail, puisque cela pourrait constituer une violation du principe d’indépendance de la justice », a-t-il ajouté en précisant que dans ce cas précis il n’est pas possible d’accorder l’amnistie pour des crimes internationaux graves.
Dans ses observations au rapport présenté par l’Espagne en 2009, le Comité des droits de l’homme de l’ONU a recommandé que ce pays prenne les mesures juridiques nécessaires pour garantir la reconnaissance par les tribunaux nationaux de la non-application du statut de prescription pour les crimes contre l’humanité, a rappelé M. Colville.
Le 8 février dernier, des experts indépendants de l'ONU avaient exprimé leur préoccupation concernant le procès contre le juge espagnol Baltasar Garzon accusé d'avoir outrepassé les limites de son mandat en enquêtant sur plus de 100.000 cas de disparitions forcées qui auraient eu lieu pendant la guerre civile espagnole et sous le régime de l'ancien dictateur Francisco Franco, de 1936 à 1951.
Le juge Garzon est inculpé pour avoir « sciemment outrepassé son mandat » en acceptant les plaintes déposées par des proches des victimes des disparitions forcées et pour avoir ouvert une enquête dans cette affaire.
« Il est regrettable que le juge Garzon puisse être sanctionné pour avoir ouvert une enquête qui est cohérente avec les obligations de l'Espagne d'enquêter sur les violations des droits de l'homme selon les principes du droit international », a indiqué la Rapporteuse spéciale de l'ONU sur l'indépendance des juges et des avocats, Gabriela Knaul, dans une déclaration commune avec le groupe de travail de l'ONU sur les disparitions forcées et involontaires qui comprend cinq experts indépendants.
Les cas pour lesquels le juge Garzon a ouvert une enquête seraient irrecevables à cause d'une loi d'amnistie espagnole qui a été introduite suite à la mort de Franco et à cause de la prescription. La semaine dernière, la Cour suprême espagnole a rejeté une requête demandant le rejet des accusations contre le juge Garzon.
« Pour garantir le respect des lois, il faut un engagement inconditionnel envers la justice et les droits de l'homme. Dans le contexte d'un respect total de l'indépendance et de l'autonomie du judiciaire, des erreurs supposées dans les décisions juridiques ne devraient pas constituer une raison de retirer un juge et encore moins de lancer une procédure pénale », a déclaré Mme Knaul. « L'autonomie dans l'interprétation de la loi est un élément fondamental du rôle d'un juge et du renforcement du respect des droits de l'homme », a-t-elle souligné.
Le groupe de travail a, pour sa part, souligné que les disparitions forcées et les violations des droits de l'homme sont des infractions qui persistent tant que le sort des victimes reste incertain. « La réconciliation entre l'Etat et les victimes des disparitions forcées ne peut se faire sans une clarification de chaque cas individuel, et la loi d'amnistie ne peut pas enlever la responsabilité de l'Etat d'enquêter, de poursuivre et de punir ceux qui sont coupables des crimes de disparitions forcées », a rappelé le groupe de travail dans la déclaration.
Source : ONU