25 mars 2013

ACTU : Centrafrique : Michel Djotodia, nouvel homme fort du pays

Catherine MAIA

Dix ans après son arrivée au pouvoir, François Bozizé tombe comme il était venu : sous la pression des armes. Michel Djotodia, le chef de la rébellion Séléka, le remplace à la tête de l'État de la République centrafricaine (RCA).

Le leader de la Séléka devait officialiser par une cérémonie, le 24 mars, son statut de nouveau chef de l’État de la République centrafricaine. Mais dans les faits, il l’est déjà depuis la veille. Après une offensive éclair de deux jours sur Bangui, Michel Djotodia a pris la capitale avec ses frères d’armes et mis en fuite François Bozizé, qui avait lui-même pris le pouvoir en menant un coup d’État contre Ange-Félix Patassé, en 2003. Deux présidents chassés par les armes, chacun au bout de dix ans de pouvoir exactement.
 
Originaire du nord-est du pays, Djotodia maîtrise plusieurs langues. Il avait tenté auparavant une carrière politique, en se présentant deux fois sans succès aux législatives dans la préfecture de Vakaga. Puis il avait épousé une carrière de diplomate - il devient notamment consul de la RCA à Nyala, au Soudan. Une ville où il fait connaissance avec les rebelles tchadiens – alors appuyés par Khartoum - avant de décider de suivre leur exemple. En 2006, il fonde l’Union des forces démocratiques pour le rassemblement (UFDR), est brièvement arrêté au Bénin, puis se réfugie au Sud-Darfour où il bénéficie d’importants soutiens et peut continuer à construire l’armée qui le mènera au pouvoir, sous le regard bienveillant de plusieurs chefs d’État d’Afrique centrale.

Mais les premières déclarations de Djotodia sur RFI, le 25 mars, sont ambigües. Il affirme vouloir rester «dans l’esprit des accords de Libreville», avec un gouvernement dirigé par l’opposant Nicolas Tiangaye et qui comptera peut-être des partisans de Bozizé : «Nous ne sommes pas là pour faire une chasse aux sorcières», assure-t-il. Mais il veut aussi organiser une élection présidentielle d'ici à trois ans, un délai certes prévu par les accords mais qui paraît bien long pour un président auto-proclamé qui souhaite ne pas se couper de l'aide internationale. «Je n’ai pas dit que, dans trois ans, je remettrais le pouvoir. J’ai dit que des élections libres et transparentes seront organisées à ce moment-là», a tenu à souligner le nouvel homme fort de Bangui, dont les ambitions politiques sont ainsi clairement affirmées face aux journalistes qui lui demandaient combien de temps il comptait rester au centre du jeu politique.

«Il ne s’agit pas de s’éterniser au pouvoir», a tenté de rassurer le porte-parole de la rébellion à Paris, Eric Massi, toujours sur RFI. «Notre objectif est de permettre aux Centrafricains de prendre en main leur destin». La question d’une nouvelle feuille de route avec un aménagement des accords de Libreville en vue d’une réduction du délai d’organisation de la présidentielle, voire d’un couplage de celle-ci avec les élections locales prévue d’ici à un an selon les accords de Libreville, est donc posée et devra trouver une réponse rapidement, sous la pression de la communauté internationale.

Source : Jeune Afrique





MISE A JOUR – 26 MARS 2013


Même s'il ne s'est pas encore officiellement proclamé Président, Michel Djotodia entre dans ses habits de nouveau chef de l'État centrafricain. Avec une méthode qui n'a rien d'original : suspension de la Constitution et de l'Assemblée nationale.

La boîte à outil du bon petit putschiste… À peine arrivé au pouvoir, le chef de la rébellion Séléka, Michel Djotodia, se comporte en parfait autocrate, à défaut de pouvoir encore être qualifié de dictateur… Suspension de la Constitution, dissolution du Parlement, législation par décrets et ordonnances dans la conduite des affaires du pays : en affichant sa méthode de Gouvernement lors d’un discours à la presse, le 25 mars, le nouveau chef de l’État centrafricain n’a pas pris de gants.

« J'estime nécessaire de suspendre la Constitution du 27 novembre 2004, de dissoudre l'Assemblée nationale ainsi que le Gouvernement. Pendant cette période de transition qui nous conduira à des élections libres, crédibles et transparentes, je vais légiférer par ordonnances », a déclaré Michel Djotodia. Seule concession faite par ce dernier : il ne s'est pas explicitement autoproclamé Président de la République, même s’il se pose clairement en nouveau maitre du pays, ce que l'Union africaine a sèchement condamné.

« Michel Djotodia est le nouveau Président, c'est acquis. L'opposition le reconnaît », a réagi le porte-parole du Gouvernement d'union nationale, Crépin Mboli Goumba, opposant au régime Bozizé. « Nous sommes dans l'esprit de Libreville, a-t-il ajouté. Il y avait cinq signataires à Libreville (clan Bozizé, opposition, Séléka, rebelles ayant déposé les armes, société civile). Toutes ces parties seront représentées dans le nouveau Gouvernement mais pas dans les mêmes proportions ».

"Transition consensuelle"

« En respectant l'esprit des accords de Libreville, je vais reconduire le Premier ministre (Nicolas Tiangaye), chef du Gouvernement d'union nationale dans ses fonctions », avait déclaré Djotodia lors de son allocution, le 25 mars. « Nous nous engageons à conduire désormais les destinées du peuple centrafricain pendant cette période de transition consensuelle de 3 ans conformément aux accords politiques de Libreville », a-t-il ajouté avant d’énumérer les objectifs du prochain Gouvernement.

« Restaurer la paix et la sécurité, réorganiser les forces de défense et de sécurité, réorganiser l'administration territoriale » et « poursuivre le processus de DDR (désarmement, démobilisation et réintégration) » des anciens combattants seront les principaux chantiers de la transition en cours. « Nous regrettons les dégâts collatéraux (pillages, violences) et nous nous emploierons à y mettre fin très rapidement », a également affirmé Michel Djotodia qui demande aux « travailleurs du secteur public et privé de reprendre le travail » dès le 26 mars. Selon Crépin Mboli Goumba, des « patrouilles mixtes entre la Séléka et la Fomac (Force multinationale d'Afrique centrale) ont commencé à patrouiller » dans la nuit du 24 au 25 mars « pour arrêter les pillages ». Un couvre-feu de 19h à 6h du matin a été décidé.
 

1 commentaire :

  1. Un dictateur a été renversé. Bienvenue au nouveau satrape! Décrets par ci par là. Pauvre Centrafrique. Avec des gens pareils te remettre sous tutelle internationale serait le moindre mal!

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