26 mars 2013

COMPTE-RENDU : Conférence intergouvernementale sur les conséquences humanitaires des armes nucléaires (Oslo, 4-5 mars 2013)

Jean-Marie COLLIN

Le réseau France des Parlementaires pour la Non-­prolifération Nucléaire et le Désarmement (PNND) vous présente un bilan de la conférence intergouvernementale sur les conséquences humanitaires des armes nucléaires, organisée par la Norvège les 4 et 5 mars 2013.

Cette conférence intergouvernementale a été précédée d’une conférence de la société civile (2 et 3 mars 2013) organisée par la campagne mondiale pour l’abolition des armes nucléaires I CAN (International Campaign to Abolish Nuclear Weapons).
 

  1. Justification de la Conférence 
  2. Les acteurs présents/absents 
  3. Points clés : bilan de la conférence intergouvernementale (4 et 5 mars)
  4. Conférence du PNND au Stortinget (4 mars)
  5. Conférence de la société civile I CAN (2 et 3 mars)
  6. Annexe 1 : Droit international humanitaire 
  7. Annexe 2 : 127 États présents à Oslo 
  8. Annexe 3 : Questions des parlementaires de l’Assemblée nationale et du Sénat sur les conséquences humanitaires de l’emploi d’une arme nucléaire 
  9. Annexe 4: Message de Denis Baupin, vice-président de l’Assemblée nationale, Stortinget (4 mars)



1. JUSTIFICATION DE LA CONFÉRENCE

Ces derniers mois, les conséquences humanitaires de l’emploi de l’arme nucléaire ont été réaffirmées et une attention accrue a été accordée à l’application aux armes nucléaires du droit international, et en particulier du droit humanitaire, notamment via de nouveaux argumentaires : le document final de la conférence d’examen du Traité de non-prolifération NP de 2010, la Déclaration de Vancouver de 2011, la Résolution « Vers l’élimination des armes nucléaires » du CICR en 2011, etc. (voir annexe 1).

À ce titre, Il faut souligner le fait que ce sujet a été reconnu comme prioritaire pour la première fois dans la Déclaration finale de la Conférence des Parties chargée d’examiner le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) en 2010 : « La Conférence se dit vivement préoccupée par les conséquences catastrophiques sur le plan humanitaire qu’aurait l’emploi d’armes nucléaires et réaffirme la nécessité pour tous les États de respecter en tout temps le droit international applicable, y compris le droit international humanitaire ».

La Norvège a indiqué en mai 2012, lors de la première Conférence de préparation à la révision du traité de non-prolifération nucléaire, l’accueil sur son territoire, en 2013, d’une conférence intergouvernementale sur les conséquences catastrophiques sur le plan humanitaire qu’aurait l’emploi d’armes nucléaires.

Cette proposition a été soutenue par de nombreux États, notamment la Suisse, qui déposa lors de la 67e session de l’Assemblée générale des Nations unies (octobre 2012), une Résolution sur « La dimension humanitaire du désarmement nucléaire ». Ce texte fut alors soutenu par 35 pays. La conférence peut également être considérée comme un suivi de la Résolution sur les armes nucléaires adoptée lors de la Conférence internationale de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge en novembre 2011.

La Norvège a fixé la date de cette conférence en novembre 2012, avec l’objectif d’une meilleure connaissance et compréhension factuelle des conséquences humanitaires d’une explosion nucléaire, et de la capacité des États à répondre à une telle catastrophe de manière crédible et efficace.


2. LES ACTEURS PRÉSENTS/ABSENTS 

Le ministre des Affaires étrangères norvégien Jonas Gahr Støre a invité tous les États intéressés (États disposant d’armes nucléaires ou non), les organes des Nations Unies (UNIDIR, PNUE, AIEA, FAO), la Croix-Rouge et d’autres organisations de la société civile et humanitaire.

Le P5, les cinq puissances nucléaires (États-Unis, Russie, France, Chine, Royaume-Uni) officiellement reconnues par le Traité de non-prolifération (car elles ont procédé à un essai nucléaire avant le 1er janvier 1967, comme le stipule ce traité) ont décliné l’invitation. Ils ont refusé - forme de coalition passive - de participer à cette conférence principalement au motif que cette action se déroulait en dehors des instances onusiennes (Conférence du Désarmement, Traité de non-prolifération) et a pour ambition d’accélérer le processus de désarmement nucléaire.

Les 4 autres puissances nucléaires, non membres du TNP (Israël, Inde, Pakistan, Corée du Nord) ont été invitées également. Le Pakistan et l’Inde étaient présents.

Une très large majorité des 28 membres de l’OTAN fut représentée. Cette alliance militaire avait, lors du Sommet de Chicago (mai 2012), confirmé qu’elle serait « une alliance nucléaire aussi longtemps qu’existeront des armes nucléaires ». Cette alliance nucléaire militaire - la seule au monde - repose à la fois sur « la France et le Royaume-Uni, qui disposent de forces nucléaires en mesure de jouer un rôle dissuasif propre contribuant au renforcement global de la dissuasion de l’Alliance » (Déclaration d’Ottawa de 1974) et sur les forces nucléaires américaines, et notamment son arsenal nucléaire tactique, entreposé sur le territoire européen depuis 1954. Cinq États - la Belgique, l’Allemagne, l’Italie, la Turquie et la Hollande - qui disposent sur leur territoire de cet armement nucléaire américain étaient présents à cette conférence.

127 États ont participé à cette conférence (voir annexe 2)


3. POINTS CLÉS : BILAN DE LA CONFÉRENCE INTERGOUVERNEMENTALE (4 et 5 mars)

Toutes les délégations diplomatiques présentes, comme les membres de la société civile ont très clairement démontré et affirmé à maintes reprises, qu’en cas d’explosion d’une arme nucléaire, il serait totalement impossible d’intervenir convenablement et que les moyens humains, matériels et financiers manqueront forcément. La question de savoir qui payera la note, à la suite de cette catastrophe, a d’ailleurs été soulevée par la Malaisie.

Les 127 États ont très clairement exprimé leur crainte de devoir être confrontés à une explosion nucléaire. Pour eux comme pour le CICR une action préventive, c’est-à-dire, un processus de désarmement concret est le seul moyen pour permettre de mettre un terme à cette menace.
  • Il est peu probable qu’un État puisse être à la hauteur pour faire face aux besoins immédiats face à une détonation nucléaire.
  • L’expérience historique montre que les effets d’une arme nucléaire sont à long terme. Son potentiel destructeur affectera l’ensemble de la planète.
  • Les agences onusiennes ont très clairement affirmé qu’elles ne seraient pas en mesure de répondre efficacement à une telle catastrophe humanitaire et environnementale.
  • Le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) a souligné qu’il n’a pas la capacité de répondre à une telle catastrophe, ni même d’envisager de développer des moyens pour y répondre tant la catastrophe serait importante.
  • Plusieurs dizaines d’États (Argentine, Autriche, Brésil, Colombie, Costa Rica, Iran, Irlande, Mexique, Nouvelle-­‐Zélande, Norvège, Pérou, Philippines, Sierra Leone, Afrique du Sud, Sri Lanka, Suède, Suisse, Turquie, Zambie) ont clairement indiqué que les conséquences seraient dévastatrices et/ou qu’ils ne pourraient jamais être prêts pour faire face à une telle détonation nucléaire.
  • La modernisation des arsenaux nucléaires (mise en œuvre par les puissances nucléaires) a été fortement critiquée et interprétée comme un non-respect du Traité de non-prolifération nucléaire.
  • Le Chili, le Costa Rica, l’Iran et le Mozambique, avec le CICR, ont déclaré que l’utilisation des armes nucléaires violerait le droit international humanitaire.
Le Mexique a annoncé qu’il organiserait la prochaine conférence sur ce sujet. Il est vraisemblable que cette action soit mise en œuvre lors du premier trimestre 2014.


4. CONFÉRENCE DU PNND AU STORTINGET (4 mars)

Le réseau des Parlementaires pour la non-prolifération Nucléaire et le Désarmement a, le 4 mars, au sein du Parlement norvégien, tenu une conférence sur le thème « Les conséquences humanitaires de l’utilisation d’une arme nucléaire et le droit international humanitaire ».
Cette conférence s’est déroulée sous la présidence de Marit Nybakk vice-présidente du Parlement norvégien (co-présidente du PNND) et Hallgeir Langeland député norvégien (membre du conseil du PNND), avec la présence de différentes personnalités politiques internationales :
  • L’Ambassadeur du Costa Rica en Norvège.
  • José Roberto Rodríguez Quesada, député du Costa Rica

  • Bill Kidd MSP, député, membre de la Commission des lois et de la Commission pour l’indépendance, Écosse
  • Tarja Cronberg, députée, membre de la Commission des affaires étrangères et présidente de la Délégation pour les relations avec l’Iran, Parlement européen, Finlande.

  • Ward Wilson, expert et auteur du livre 5 Myths about Nuclear Weapons (2013) 
  • Alyn Ware, coordinateur global du PNND

L’objectif de cette conférence était de voir comment les parlementaires de différents pays étaient engagés dans un processus de dialogue avec leur Gouvernement respectif sur ce sujet.
  • Les parlementaires norvégiens ont mis en avant le fait que, malgré la participation de leur pays à l’OTAN (alliance nucléaire), ces questions du désarmement nucléaire et des risques humanitaires sont très présentes dans les débats politiques des commissions de la Défense et des Affaires étrangères.
  • Les représentants du Costa Rica ont indiqué que leur pays, qui ne dispose pas d’armée, était un des pays leaders sur cette question du désarmement, qu’il multipliait les actions internationales, tant à l’ONU (ce pays a déposé le projet de Convention sur les armes nucléaires en 1997) ou avec les organisations de la société civile comme I CAN. Il faut noter que la présidente, Laura Chinchilla, est devenue en février 2013 membre honoraire du PNND.
  • Tarja Cronberg a indiqué que, au niveau du parlement européen, ce sujet commence à être discuté et se matérialise, par exemple, par diverses résolutions. Ainsi, le 15 janvier dernier, une proposition de résolution a été déposée sur « Les recommandations de la conférence d’examen du traité de non-prolifération concernant l’établissement d’un Moyen--Orient exempt d’armes de destruction massive ».
  • Les différents coordinateurs du PNND venant d’Allemagne, du Royaume-Uni, de la République Tchèque, de la France (voir les annexes 1 et 2), de la Suisse, de l’Autriche, du Costa Rica ont indiqué les différentes initiatives parlementaires qui ont été prises sur ce sujet dans leur pays. Il ressort que de nombreuses questions ont été posées sur les conséquences humanitaires et des rencontres entre parlementaires et ministres des Affaires étrangères ont également été initiées (en République Tchèque).

5. CONFÉRENCE DE LA SOCIETE CIVILE I CAN (2 et 3 mars)

La campagne internationale pour l’abolition des armes nucléaires I CAN est composée de 280 ONG partenaires dans 68 pays. Née à la suite de l’échec de la Conférence de révision du TNP en 2005, elle a été initiée par l’organisation IPPNW (International Physicians for the Prevention of Nuclear War).

Cette campagne, qui bénéficie de soutien financier important de la part de la Norvège et de la Suisse, a organisé une conférence « alternative » dans le but de montrer aux États et aux médias la mobilisation mondiale des ONG pour abolir les armes nucléaires.

Plus de 400 participants venus de 70 pays, se sont ainsi réunis les 2 et 3 mars, pour mettre en œuvre une réflexion sur cette campagne et pour expliquer les conséquences humanitaires qu’une arme nucléaire peut provoquer. À travers différentes sessions, en présence d’experts reconnus dans leur domaine de travail (scientifiques, victimes d’essais nucléaires, Hibakusha, experts...), il s’est agi de répondre ainsi à des questions aussi précises que :
  • Combien de personnes ces armes peuvent-elles tuer?
  • Quel genre de blessures auraient les survivants ?
  • Comment interviendraient les organismes de secours?
  • Quels seront pour le reste du monde, les effets à long terme sur le climat, sur l’économie ?
  • Il est essentiel de noter que I CAN est considéré comme un partenaire, voire une source prioritaire de renseignements et d’études pour de nombreux États. Ainsi, lors de la conférence intergouvernementale, outre le fait que les principaux responsables de cette campagne ont pris la parole, de nombreux pays ont salué les travaux réalisés par cette campagne et ont publiquement indiqué la nécessité que I CAN apporte de nouvelles sources d’information permettant d’appuyer leurs actions diplomatiques.
Il faut noter ainsi l’utilisation d’une étude récente, Unspeakable suffering: the humanitarian impact of nuclear weapons (février 2013), par différents États lors de cette conférence intergouvernementale. Cette étude non exhaustive sur les effets multiples des armes nucléaires, aussi bien sur la santé que sur l’environnement, mais aussi sur l’économie ou l’agriculture, met également en exergue des cas concrets à travers les effets de la bombe sur les villes japonaises d’Hiroshima, Nagasaki, les essais nucléaires ou encore un « cas fiction » avec la ville de Bombay.

Dans le cadre de ce forum le PNND a proposé la possibilité aux participants de venir contacter directement leurs parlementaires via l’envoi de messages électroniques pour leur demander de prendre des mesures en faveur de l’abolition des armes nucléaires. De même, en raison de la présence de différents parlementaires (Ecosse, Costa Rica, Finlande), ce public pouvait discuter, échanger avec ces représentants politiques pour comprendre leurs actions.



ANNEXE 1 : Droit international humanitaire

Des éléments de nature juridique et éthique plaident en faveur du désarmement nucléaire.
  • L’avis consultatif de la Cour internationale de justice (CIJ), rendu en 1996, conclut à l’illicéité de la menace ou de l’emploi de l’arme nucléaire, même si la conclusion de cet avis reste ambiguë.
  • Le Document final de la Conférence de révision du TNP de 2010, adopté par la France, encourage un tel processus, en demandant aux puissances nucléaires de «réduire encore le rôle et l’importance des armes nucléaires dans tous les concepts, doctrines et politiques militaires et de sécurité» (mesure 5.c). Il souligne aussi l’obligation du respect du droit international humanitaire en tout temps : «La Conférence se dit vivement préoccupée par les conséquences catastrophiques sur le plan humanitaire qu’aurait l’emploi d’armes nucléaires et réaffirme la nécessité pour tous les États de respecter en tout temps le droit international applicable, y compris le droit international humanitaire».
  • La Déclaration de Vancouver de 2011 (Law’s Imperative for the Urgent Achievement of a Nuclear-Weapon-Free World) souligne l’incompatibilité des armes nucléaires avec le droit et la sécurité des hommes.
  • La Résolution « Vers l’élimination des armes nucléaires » du Conseil des délégués du Mouvement international de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, adoptée en novembre 2011, affirme le caractère irréconciliable des armes nucléaires avec le droit international humanitaire. Cette résolution « souligne les souffrances humaines incommensurables qui pourraient résulter de l’emploi d’armes nucléaires, [et] le manque de capacités pour mener une action humanitaire adéquate », et appelle les États à engager des négociations en vue de conclure un accord international juridiquement contraignant pour interdire l’emploi des armes nucléaires et parvenir à leur élimination totale.


ANNEXE 2 : 127 États présents à Oslo
  • Afrique (33) : Angola, Burkina Faso, Burundi, Cameroun, République Centre africaine, Cote d’Ivoire, République démocratique du Congo, Érythrée, Ethiopie, Gambie, Ghana, Guinée-­‐Bissau, Liberia, Mali, Malawi, Madagascar, Maroc, Mauritanie, Mozambique, Nigeria, Sao Tomé-et-Principe, Sénégal, Sierra Leone, Sud Soudan, Swaziland, Afrique du Sud, Soudan, Swaziland, Tanzanie, Tunisie, Ouganda, Zambie, Zimbabwe.
  • Asie (21) : Afghanistan, Bangladesh, Bahreïn, Bhutan, Brunei, Indonésie, Inde, Japon, Kazakhstan, Kyrgyzstan, Laos, Malaisie, Mongolie, Myanmar, Népal, Pakistan, Philippines, République de Corée, Tadjikistan, Thaïlande, Vietnam.
  • Europe (37) : Albanie, Arménie, Autriche, Azerbaïdjan, Biélorussie, Belgique, Bosnie-Herzégovine, Croatie, République Tchèque, Danemark, Estonie, Finlande, Géorgie, Allemagne, Grèce, Saint-Siège, Hongrie, Irlande, Islande, Italie, Lituanie, Luxembourg, Macédoine, Monténégro, Norvège, Hollande, Pologne, Portugal, Roumanie, Serbie, Slovaquie, Espagne, Suisse, Suède, Turquie, Ukraine.
  • Amérique (19) : Argentine, Barbade, Brésil, Canada, Chili, Colombie, Costa Rica, Cuba, Equateur, El Salvador, Guatemala, Jamaïque, Mexique, Nicaragua, Paraguay, Pérou, Sainte Lucie, Trinité-et-Tobago, Venezuela.
  • Moyen-Orient (12) : Algérie, Bahreïn, Egypte, Irak, Iran, Jordanie, Koweït, Libye, Maroc, Qatar, Arabie Saoudite, Yémen.
  • Pacifique (5) : Australie, îles Cook, Fidji, Nouvelle-Zélande, Tuvalu.


ANNEXE 3 : Questions des parlementaires de l’Assemblée nationale et du Sénat français sur les conséquences humanitaires de l’emploi d’une arme nucléaire

Les questions qui ont été posées sur ce sujet ont toutes été le fait des parlementaires membres du réseau du PNND :
  • 19/02/201, question écrite n°18970 de M. Baupin Denis. Ministère interrogé : Affaires étrangères.
•
  • 05/03/2013, question écrite n°20438 de Mme Auroi Danielle. Ministère interrogé : Affaires étrangères.
•
  • 12/03/2013, question écrite n°20852 de M. Jean-­‐Jacques Candelier. Ministère interrogé : Défense.
•
  • 28/02/201, question écrite n°05074 de M. Richard Tuheiava. Ministère interrogé : Affaires étrangères.
  • 28/02/201, question écrite n°04990 de Mme Michelle Demessine. Ministère interrogé : Affaires étrangères.


ASSEMBLÉE NATIONALE


Question n°18970 de M. Baupin Denis (Écologiste, Paris), publiée au JO le 19/02/2013, p. 1684
Ministère interrogé : Affaires étrangères

M. Denis Baupin attire l’attention de M. le ministre des Affaires étrangères sur la Conférence intergouvernementale, organisée par la Norvège les 4 et 5 mars 2013, sur les conséquences catastrophiques sur le plan humanitaire qu’aurait l’emploi d’armes nucléaires. Durant des décennies, le débat sur l’armement nucléaire a porté principalement sur la doctrine militaire et les questions de sécurité. Aujourd’hui, la prise de conscience des conséquences catastrophiques de ces armes pour la santé publique, la sécurité humaine et l’environnement ne cesse de croître. Des États toujours plus nombreux reconnaissent et expriment le désir d’examiner de plus près les « conséquences catastrophiques sur le plan humanitaire » qu’aurait l’emploi d’armes nucléaires. Cette reconnaissance a été exprimée pour la première fois dans la Déclaration finale de la Conférence des Parties chargée d’examiner le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) en 2010 (« La conférence se dit vivement préoccupée par les conséquences catastrophiques sur le plan humanitaire qu’aurait l’emploi d’armes nucléaires et réaffirme la nécessite pour tous les États de respecter en tout temps le droit international applicable, y compris le droit international humanitaire»). À l’automne 2012, lors de la 67e session de l’Assemblée générale des Nations unies, une Résolution sur « La dimension humanitaire du désarmement nucléaire » fut déposée par la Suisse au sein de la première Commission chargée des questions de désarmement et de sécurité internationale. Ce texte a été soutenu par 35 pays. Enfin, le Comité International de la Croix-Rouge, en consultation avec la Fédération internationale des sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge et les sociétés nationales (donc la Croix-Rouge française), ont voté une Résolution, le 26 novembre 2011, « vers l’élimination des armes nucléaires », stipulant précisément « que le débat international devait être recadré sur ces armes en fonction de leur coût humain et de leurs incidences en droit international humanitaire ». Alors que, de par le monde, près de 20 000 armes nucléaires constituent aujourd’hui les arsenaux de l’ensemble des puissances nucléaires, la Norvège, appuyée et suivie par un groupe d’États, a décidé de poursuivre les discussions lors d’une conférence intergouvernementale qui va se dérouler les 4 et 5 mars 2013 à Oslo. L’objet de cette conférence est de comprendre, d’évaluer et de savoir comment réagir face à l’impact humanitaire immédiat d’une explosion nucléaire ou encore face à ses conséquences possibles sur les plans économiques et environnementaux. Il souhaite savoir quelle est la position de la France vis-à-vis de cette conférence et plus généralement la politique d’action de la France dans ce domaine.


Question n°20438 de Mme Auroi Danielle (Écologiste, Puy-de-Dôme), publiée au JO le 05/03/2013, p. 2357
Ministère interrogé : Affaires étrangères

Mme Danielle Auroi attire l’attention de M. le ministre des Affaires étrangères sur la conférence intergouvernementale, organisée par la Norvège les 4 et 5 mars 2013, sur les conséquences qu’aurait l’emploi d’armes nucléaires sur le plan humanitaire. Le Comité International de la Croix-Rouge, en consultation avec la Fédération internationale des sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge et les sociétés nationales (donc la Croix-Rouge française), ont voté une Résolution, le 26 novembre 2011, « Vers l’élimination des armes nucléaires », stipulant précisément « que le débat international devait être recadré sur ces armes en fonction de leur coût humain et de leurs incidences en droit international humanitaire ». Alors que, de par le monde, près de 20 000 armes nucléaires constituent aujourd’hui les arsenaux de l’ensemble des puissances nucléaires, la Norvège, appuyée et suivie par un groupe d’États, a décidé de poursuivre les discussions lors d’une conférence intergouvernementale qui va se dérouler les 4 et 5 mars 2013 à Oslo. L’objet de cette conférence est de comprendre, d’évaluer et de savoir comment réagir face à l’impact humanitaire immédiat d’une explosion nucléaire ou encore face à ses conséquences possibles sur les plans économiques et environnementaux. Elle souhaite savoir quelle est la position de la France vis-à-vis de cette conférence et plus généralement quelle est la politique d’action de la France dans ce domaine.


Question n°20852 de M. Jean-Jacques Candelier (Gauche démocrate et républicaine-­Nord), publiée au JO le 12/03/2013, p. 2715
Ministère interrogé : Défense

M. Jean-Jacques Candelier attire l’attention de M. le ministre de la Défense sur la conférence d’Oslo. Le monde vit sous la menace de 20 000 armes nucléaires. L’objet de la conférence intergouvernementale des 4 et 5 mars 2013 à Oslo est de comprendre, d’évaluer et de savoir comment réagir face à l’impact immédiat d’une explosion nucléaire ou face à ses conséquences sur les plans économiques et environnementaux. Les autorités françaises envisagent la possibilité que notre pays soit atteint par une arme nucléaire, ce qui laisse entendre que notre dissuasion nucléaire n’est pas une garantie absolue. Il lui demande quelle est la position de la France vis-à-vis de cette conférence et comment la France compte réagir face à l’impact humanitaire immédiat d’une explosion nucléaire militaire sur son territoire.


SÉNAT

Question écrite n°05074 de M. Richard Tuheiava (Polynésie française, SOC-A), publiée au JO du 28/02/2013, p. 647
Ministère interrogé : Affaires étrangères

M. Richard Tuheiava attire l’attention de M. le ministre des Affaires étrangères sur la conférence intergouvernementale, organisée par la Norvège les 4 et 5 mars 2013, sur les conséquences catastrophiques sur le plan humanitaire qu’aurait l’emploi d’armes nucléaires. Durant des décennies, le débat sur l’armement nucléaire a porté principalement sur la doctrine militaire et les questions de sécurité. Aujourd’hui, la prise de conscience des conséquences catastrophiques de ces armes pour la santé publique, la sécurité humaine et l’environnement ne cesse de croître. Des États toujours plus nombreux reconnaissent et expriment le désir d’examiner de plus près les « conséquences catastrophiques sur le plan humanitaire » qu’aurait l’emploi d’armes nucléaires. Cette reconnaissance a été exprimée pour la première fois dans la déclaration finale de la conférence des parties chargée d’examiner le traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) en 2010 : « La conférence se dit vivement préoccupée par les conséquences catastrophiques sur le plan humanitaire qu’aurait l’emploi d’armes nucléaires et réaffirme la nécessité pour tous les États de respecter en tout temps le droit international applicable, y compris le droit international humanitaire ». À l’automne 2012, lors de la 67e session de l’assemblée générale des Nations unies, une résolution sur « la dimension humanitaire du désarmement nucléaire » a été déposée par la Suisse au sein de la première commission chargée des questions de désarmement et de sécurité internationale. Ce texte a été soutenu par 35 pays. Enfin, le Comité International de la Croix-Rouge, en consultation avec la Fédération internationale des sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge et les sociétés nationales (donc la Croix-Rouge française), ont voté une Résolution, le 26 novembre 2011, « Vers l’élimination des armes nucléaires », stipulant précisément « que le débat international devait être recadré sur ces armes en fonction de leur coût humain et de leurs incidences en droit international humanitaire ». Alors que, de par le monde, près de 20 000 armes nucléaires constituent aujourd’hui les arsenaux de l’ensemble des puissances nucléaires, la Norvège, appuyée et suivie par un groupe d’États, a décidé de poursuivre les discussions lors d’une conférence intergouvernementale qui va se dérouler les 4 et 5 mars 2013 à Oslo. L’objet de cette conférence est de comprendre, d’évaluer et de savoir comment réagir face à l’impact humanitaire immédiat d’une explosion nucléaire ou encore face à ses conséquences possibles sur les plans économiques et environnementaux. Il souhaite savoir quelle est la position de la France vis-à-vis de cette conférence et plus généralement la politique d’action de la France dans ce domaine.


Question écrite n°04990 de Mme Michelle Demessine (Nord, CRC) publiée au JO du 28/02/2013, p. 647
Ministère interrogé : Affaires étrangères

Madame Michelle Demessine interroge M. le ministre des Affaires étrangères sur le refus de la France de participer à la conférence intergouvernementale sur les conséquences humanitaires des armes nucléaires organisée les 4 et 5 mars prochain à Oslo. L’objet de cette conférence est de comprendre, d’évaluer et de savoir comment réagir face à l’impact humanitaire immédiat d’une explosion nucléaire ou encore faire face à ces conséquences possibles sur les plans économiques et environnementaux. Même si cette conférence a lieu en dehors des instances onusiennes, elle s’inscrit dans la continuité des engagements internationaux de la France au sein de la Conférence des Parties chargée d’examiner le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires en 2010. En effet, son document final stipulait que « la Conférence se dit vivement préoccupée par les conséquences catastrophiques sur le plan humanitaire qu’aurait l’emploi d’armes nucléaires et réaffirme la nécessité pour tous les États de respecter en tout temps le droit international applicable, y compris le droit international humanitaire ». Elle souhaiterait savoir pour quelles raisons la France refuse de participer à cette conférence intergouvernementale.


ANNEXE 4 : Message de Denis Baupin, vice-président de l’Assemblée nationale française (lu lors de la Conférence au Stortinget)

Chers parlementaires, chers membres du Réseau des Parlementaires pour la Non-prolifération Nucléaire et le Désarmement, membres de la société civile.

Je vous prie de bien vouloir m’excuser, j’aurais souhaité me joindre à cette conférence avec plaisir, mais mon agenda ne me permet pas d’être parmi vous.

Pour la première fois, un État, la Norvège, organise et accueille une grande conférence intergouvernementale sur les conséquences catastrophiques humanitaires de l’explosion d’une arme nucléaire.

Je me sens concerné à plus d’un titre par cette question du désarmement nucléaire. En raison de mon histoire personnelle - je suis objecteur de conscience - et bien sûr, comme membre d’un groupe politique (Europe Ecologie Les Verts - EELV) qui a toujours souhaité l’abandon de la force nucléaire de la France et des arsenaux mondiaux. Le 25 janvier dernier, notamment à l’Assemblée nationale, je présidais un colloque sur le désarmement nucléaire au sein de l’Assemblée nationale avec le soutien de l’organisation des Parlementaires pour la Non-prolifération Nucléaire et le Désarmement.

Aujourd’hui, la prise de conscience des conséquences catastrophiques que ces armes provoqueraient ne cesse de croître. Il est certain que face à toute catastrophe nucléaire, une guerre ou un accident nucléaire militaire, nous, citoyens de cette planète nous risquerions d’être confrontés à la plus grande des catastrophes que l’homme n’est jamais connu. Il faut bien voir en effet que toute utilisation d’une arme nucléaire entraînerait immédiatement des conséquences dont les effets seraient mondiaux et qui viendraient sans aucun doute - même si nous n’étions pas la cible de cette arme - directement affecter notre pays sur le plan sanitaire, environnemental, humanitaire et économique.

La position de la France à l’égard de cette conférence est floue, voire négative. En effet, la France n’approuve pas la tenue de cette conférence. Au contraire, la France regrette qu’une telle initiative soit prise en dehors des instances onusiennes. Pourtant, n’est-il pas absolument nécessaire d’explorer toutes les voix possibles pour mettre un terme à cette menace nucléaire ? De plus, la France s’est engagée, comme les autres membres du P5, selon le Document final de la Conférence de révision du TNP de 2010 à « accélérer les progrès concrets sur les mesures tendant au désarmement nucléaire, » ou encore à respecter le droit international humanitaire en tout temps : « La Conférence se dit vivement préoccupée par les conséquences catastrophiques sur le plan humanitaire qu’aurait l’emploi d’armes nucléaires et réaffirme la nécessité pour tous les États de respecter en tout temps le droit international applicable, y compris le droit international humanitaire ».

Devant la non réponse de la France, ces dernières semaines, sur sa participation ou non à cette conférence, il était ainsi de ma responsabilité de parlementaire d’interpeller, à l’Assemblée nationale, le ministre des Affaires étrangères pour connaître la position de la France vis-à-vis de cette conférence et plus généralement la politique d’action de la France dans ce domaine. Cette action, pourrait apparaître anodine, mais elle est fortement symbolique. Trop rarement au sein de cet hémicycle, des parlementaires se sont exprimés sur ce sujet, dans le but de remettre en cause ce qu’il faut bien qualifier de dogme de la dissuasion nucléaire.

Cette conférence est donc une chance. Oui, nous avons de la chance qu’un État, accompagné de dizaines d’autres (je pense par exemple à la Suisse ou encore au Costa-Rica), nous offre cette sphère de discussions, d’échanges pour avancer face à cette menace nucléaire. Je souhaite qu’elle soit une pleine réussite, et que ces conclusions puissent interpeller fortement la position de mon pays.

Vous pouvez compter sur mon soutien.


Parlementaires pour la Non-prolifération Nucléaire et le Désarmement – PNND

Le PNND est un programme du Global Security Institute (GSI), groupe de réflexion basé aux États-Unis, fondé par le Sénateur américain Alan Cranston en 2002. Aujourd’hui, cette organisation dispose d’un bureau dans la ville de Bâle au sien du Bazel Peace Office. Ces sources de financement proviennent de fondations internationales et d’États (Norvège, Suisse, ...).

Le PNND s’assigne pour mission de fournir aux parlementaires des informations actualisées sur les politiques relatives à la prolifération des armes nucléaires, sur les initiatives de désarmement nucléaire, les rencontres intergouvernementales et les manifestations internationales organisées sur ce thème (notamment les réunions des Nations Unies sur le désarmement). Cette information est transmise par le biais de conférences, bulletins d’information, séminaires, comptes-rendus et contacts.

Forum non-partisan, il permet aux parlementaires au niveau national, européen et international de partager leurs connaissances et leurs informations, de développer des stratégies de coopération et de s’impliquer dans les différentes initiatives, les forums et les cercles qui se rattachent au désarmement nucléaire.

Ce réseau mondial réunit plus de 800 parlementaires provenant de plus de 80 pays qui se sont engagés à prévenir la prolifération nucléaire et réaliser le désarmement nucléaire. Concernant leur sensibilité, on peut noter qu’elles transcendent les clivages des partis politiques dans de nombreuses sections comme en Nouvelle-Zélande, au Canada, au Japon, en Corée du Sud et établissent des partenariats avec des groupes parlementaires « mixtes » comme en Belgique, aux États-Unis et au Royaume-Uni.


Jean­Marie Collin est le Directeur pour la section française du PNND qui compte actuellement 16 membres (6 sénateurs, 7 députés dont 3 du Parlement européen).

Consultant indépendant, il travaille sur les questions de sécurité nationale en France. Ses domaines d’expertises couvrent les armes nucléaires françaises, la prolifération et le désarmement nucléaires, l’OTAN, le contrôle des armements, la sécurité environnementale, les armes à sous-munitions.

Il est l’auteur de nombreux livres, articles et rapports pour différents think tanks et organisations non-gouvernementales. Il vient de publier Arrêtez la Bombe (2013) avec l’ancien ministre de la Défense Paul Quilès et le Général d’armée aérienne Bernard Norlain.

« La mission qui m’a été assignée est de "faire vivre" cette branche française du PNND notamment en organisant des cercles de débats réunissant experts, parlementaires français et internationaux, dans le but de promouvoir les discussions sur les problématiques du désarmement et de la non-prolifération nucléaire au sein de l’Assemblée nationale et du Sénat français ».

 

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