18 juin 2013

ACTU : Le Comité spécial de la décolonisation entend des pétitionnaires plaider pour la réinscription de Porto Rico sur la liste de la décolonisation

Catherine MAIA

Après l’audition le 17 juin de 40 pétitionnaires sur la question de Porto Rico, le Comité spécial chargé d’étudier la situation en ce qui concerne l’application de la Déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux (Comité spécial des Vingt-Quatre), a demandé de nouveau au Gouvernement des États-Unis d’Amérique d’assumer la responsabilité qui lui incombe d’engager un processus permettant au peuple portoricain d’exercer pleinement son droit inaliénable à l’autodétermination et à l’indépendance, et ce, aux termes d’une résolution contenant une décision adoptée par consensus.

« Après 115 ans de domination coloniale, le peuple de Porto Rico n’a toujours pas perdu son identité », a observé le représentant de Cuba en présentant le projet de texte. À l’instar des autres coauteurs de ce texte (Bolivie, Équateur, Nicaragua et Venezuela), le représentant de la République islamique d’Iran, parlant au nom du Mouvement des non-alignés, a réaffirmé le droit à l’indépendance et à l’autodétermination de ce peuple.

Les coauteurs de ce texte, qui est adopté pour la quatorzième année consécutive, ont rappelé l’appui de la Communauté des États d’Amérique latine et des Caraïbes (CELAC) aux Portoricains. « Porto Rico fait partie de notre Amérique », a lancé la représentante du Nicaragua.  Son homologue de l’Équateur a évoqué l’adoption, en février 2012, de la Déclaration spéciale d’appui au peuple portoricain par l’Alliance bolivarienne pour les peuples de notre Amérique.

De nombreux pétitionnaires ont commenté le résultat du référendum tenu le 6 novembre 2012 à Porto Rico, qui avait pour but de déterminer le statut définitif de l’île caribéenne en choisissant entre trois options: conserver le statut actuel d’« État libre associé aux États-Unis », qui date de 1953; devenir un État fédéré des États-Unis; ou, choisir l’indépendance. Avec un fort taux de participation (80%), ce référendum a permis de constater que la majorité des votants (54%) refusait le maintien du statut actuel.

Parmi les votants, 61% se sont prononcés en faveur de l’annexion par les États-Unis de Porto Rico qui deviendrait alors le cinquante et unième État des États d’Unis d’Amérique. Un représentant de ce courant, du « New Progressive Party », a souligné l’injustice du statut actuel. Il a comparé le fait que les États-Unis adoptent et imposent à l’île les lois applicables à Porto Rico avec l’interdiction faite aux Portoricains de voter lors des élections américaines.

Les pétitionnaires indépendantistes ne se sont pas privés de critiquer la consultation de 2012, notamment au motif qu’elle n’avait pas inclus les membres de la diaspora portoricaine. D’autres ont souligné l’inutilité d’un référendum dont le résultat n’était pas juridiquement contraignant. Le pétitionnaire du Comité de Porto Rico aux Nations Unies (COPRONU) a, pour sa part, accusé le parti annexionniste portoricain d’avoir manipulé les données du plébiscite en prenant en compte dans son calcul les 15 000 bulletins blancs déposés. Les indépendantistes ont aussi demandé que l’Assemblée générale des Nations Unies inscrive à nouveau Porto Rico sur la liste des territoires non autonomes.

Outre la question du statut de l’île, les pétitionnaires ont abordé les problèmes qui se posent sur le plan économique et social, notamment l’absence d’un véritable système de santé à Porto Rico et le fort taux actuel de chômage (40%). Plusieurs se sont élevés contre l’imposition de la peine de mort, décidée par sept fois à Porto Rico entre 2003 et 2013, alors que les Portoricains la rejettent. En outre, ont relevé de nombreux intervenants, il est curieux que la justice soit rendue en anglais à Porto Rico, alors que cette langue étrangère n’est maîtrisée que par 10% de la population, dont la très grande majorité est hispanophone.

En ce qui concerne la situation des prisonniers politiques, le Comité a demandé à nouveau au Président des États-Unis de libérer Oscar López Rivera, détenu depuis plus de 30 ans, ainsi que Norberto González Claudio, qui tous les deux purgent leurs peines dans des prisons américaines. Cet appel a été relayé par de nombreux pétitionnaires. M. López Rivera détient le triste record de la plus longue détention politique, celle qui lui est imposée ayant dépassé celle qu’a subie Nelson Mandela dans l’Afrique du Sud de l’apartheid, ont fait remarquer plusieurs intervenants.

Par le texte adopté, le Comité se déclare également préoccupé par les actes commis contre des indépendantistes et souhaite que des enquêtes soient menées sur leur situation. En outre, il prie instamment le Gouvernement des États-Unis de mener à son terme la restitution de l’ensemble des terrains anciennement occupés par sa marine de guerre et celle des installations de l’île de Vieques et de Ceiba, et d’accélérer le nettoyage et la dépollution des zones touchées par les manœuvres militaires américaines. Plusieurs pétitionnaires ont appuyé cette demande, soulignant les dangers qu’encourent les habitants de cette île en ce qui concerne leur santé.

Source : ONU


Rapport du Rapporteur du Comité spécial, Bashar Ja’afari (République arabe syrienne), A/AC.109/2013/L.13

Ce rapport passe en revue les grandes lignes de l’évolution de la situation politique, militaire et économique à Porto Rico.

Il indique notamment qu’un plébiscite (le quatrième en 45 ans) a été organisé à Porto Rico le 6 novembre 2012, auquel 80% de l’électorat a pris part, à la suite duquel 54% de l’électorat portoricain s’est opposé au maintien du statut politique actuel de Porto Rico.

Depuis, le Gouverneur Alejandro García Padilla, membre du Partido Popular Democrático (PPD), a déclaré publiquement qu’en l’absence de décision du Congrès des États-Unis sur le statut politique de l’île avant la fin de l’année 2013, le PPD promouvrait une loi visant à convoquer une assemblée constituante.

Le rapport relève que la question des prisonniers se pose à Porto Rico, un certain nombre d’organisations portoricaines et de responsables politiques et associatifs faisant valoir depuis des années qu’il s’agit de prisonniers politiques condamnés à des peines trop lourdes.  Le cas d’Oscar López Rivera, aujourd’hui âgé de 70 ans, détenu depuis 31 ans, et qui se trouve actuellement dans une prison fédérale de l’Indiana est le plus marquant. Les manifestations en faveur de sa libération se poursuivent.  Oscar López Rivera est, selon de nombreux observateurs, le prisonnier politique ayant connu la plus longue incarcération de l’histoire portoricaine et mondiale, indique le rapport.

Le rapport explique que les États-Unis conservent depuis 1953 la même position quant au statut de Porto Rico et la compétence des organes des Nations Unies pour l’examiner en s’appuyant sur la résolution 748 (VIII) par laquelle l’Assemblée les a déchargés des obligations que leur imposait le Chapitre XI de la Charte des Nations Unies.  Les États-Unis affirment notamment que Porto Rico a exercé son droit à l’autodétermination, est pleinement autonome, s’est prononcé librement et démocratiquement en faveur du statut d’État libre associé aux États-Unis et, en conséquence, ne relève plus de la compétence de l’ONU.  Les Portoricains favorables à la décolonisation et à l’indépendance contestent cette affirmation.

De son côté, l’Assemblée générale a exprimé sa conviction, au paragraphe 9 de la résolution 748 (VIII), qu’il serait dûment tenu compte de la volonté du peuple portoricain et de celle du peuple des États-Unis dans le cas où l’une ou l’autre des parties à l’association consentie d’un commun accord désirerait apporter une modification aux termes de cette association.

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