Catherine MAIA
Au cours d’une
réunion sur la Syrie qui s’est ajoutée au programme de travail du Conseil de
sécurité, le 15 janvier 2016, en raison de la situation grave qui prévaut
actuellement dans la ville assiégée de Madaya, la Sous-Secrétaire générale aux
affaires humanitaires, Mme Kyung-wha Kang, a tiré la sonnette d’alarme sur le
sort d’une population qui est délibérément privée de vivres. « La
famine, a-t-elle dit, appuyée en ce sens par de nombreux intervenants, est
utilisée comme arme de guerre par les belligérants ». Toutes les
parties, y compris le Gouvernement syrien, commettent des actes terribles
interdits par le droit international humanitaire, a-t-elle ajouté en demandant
au Conseil de dénoncer la nature barbare de ces tactiques.
Chiffrant à 4,5
millions le nombre de personnes, en Syrie, qui résident dans des régions
difficiles d’accès, Mme Kang a expliqué que leur situation résultait non
seulement des conditions de sécurité liées au conflit, mais aussi de
l’obstruction délibérée de la fourniture de l’aide et des secours. À cet
égard, Mme Kang a exhorté le Gouvernement syrien à autoriser les demandes
de passage de convois qui sont restées sans réponse. « Les vivres,
l’eau et les médicaments ne sont pas des faveurs que les parties au conflit
pourraient octroyer ou interdire selon leur volonté », a-t-elle fait
valoir.
Le représentant
syrien a voulu se dédouaner en expliquant que son Gouvernement ne pouvait pas
délivrer les autorisations requises de manière automatique. Il est, en
effet, obligé de prendre toutes les précautions nécessaires à la sécurité des
travailleurs humanitaires qui accompagnent les convois dans les zones où
opèrent des organisations terroristes armées. De plus, il faut éviter que
l’aide tombe entre les mains des terroristes, comme cela a été le cas à Madaya,
a-t-il fait remarquer.
De leur côté, les
Nations Unies et leurs partenaires, y compris le Comité international de la
Croix-Rouge (CICR) et le Croissant-Rouge, œuvrent sans relâche pour fournir une
aide alimentaire à ces peuples, a souligné Mme Kang, en citant notamment
l’eau fournie à 8 millions de personnes et les 130 camions arrivés cette
semaine dans les villes assiégées. En moins de deux jours, a précisé le
représentant du Venezuela, 200 bénévoles et travailleurs humanitaires ont
conduit 45 convois à Madaya pour aider 40 000 personnes et 18 convois
à Kefraya et à Fouah pour atteindre 20 000 autres personnes.
Mme Kang a indiqué
que 390 patients avaient ainsi pu être examinés et 9 autres évacués,
tandis que 19 sont en attente d’évacuation. Les Nations Unies, a-t-elle
dit, ont demandé un transfert immédiat et sans condition de ces personnes en
vue de leur traitement.
Madaya n’est
cependant que la partie émergée de l’iceberg, car cette zone ne représente que
10% des zones assiégées, selon le représentant du Royaume-Uni. Au total,
ce sont 400 000 personnes qui sont prises au piège dans les zones
assiégées de Madaya, Kafraya ou Fouah et au-delà, tandis que 4,5 millions de
personnes se trouvent encore dans des zones difficiles d’accès. Le
représentant de la Russie a également attiré l’attention sur la ville
d’Al-Zahraa, dans la province d’Alep, où des dizaines de milliers de personnes
se trouvent dans une situation extrême.
Outre l’accès sans
condition et sans obstacle à toutes les personnes dans le besoin, la
Sous-Secrétaire générale a invité à protéger les civils contre les attaques
aveugles et l’utilisation de barils d’explosifs.
À l’instar des
membres du Conseil de sécurité, elle a aussi appelé les parties concernées à
remettre la Syrie sur la voie de la paix. Seule une solution politique
mettra fin à la violence et au conflit, ont rappelé les intervenants en plaçant
leur espoir dans le dialogue intersyrien qui sera lancé le 25 janvier 2016.
Pour le
représentant de la France, « il n’y aura pas de processus politique
crédible sans progrès sérieux et tangibles, sur le front humanitaire. La
France, a-t-il précisé, avait demandé cette réunion d’urgence du Conseil de
sécurité avec trois objectifs complémentaires, à savoir mettre chacun devant
ses responsabilités face à la tragédie à Madaya; réunir les conditions
nécessaires pour le dialogue intersyrien du 25 janvier 2016; et assurer un
accès immédiat, permanent et sans restriction aux acteurs humanitaires.
À ce propos, son
homologue russe s’est montré inquiet de la convocation d’une seconde réunion du
Conseil sur cette question en l’espace d’une brève période, tandis qu’une autre
est prévue le 27 janvier 2016 pour discuter des aspects humanitaires de la
crise syrienne. Il a émis la crainte que cette situation ne soit un
prétexte pour essayer de faire échouer le début du dialogue syrien et a dénoncé
une politisation de l’action humanitaire.
Pour sa part, le
représentant de l’Ukraine a regretté que « certaines voix, y compris au
sein de ce Conseil, essayent de justifier les actions commises par le régime
syrien » et soutiennent ceux qui assiègent Madaya. L’Ukraine, qui a connu
la famine organisée de l’Holodomor au début des années 1930, souhaite que ce
Conseil affirme haut et fort que les attaques délibérées de civils et
l’utilisation de la famine comme méthode de guerre ne seront pas tolérées, a
déclaré son représentant.
Source
: ONU
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