Lors d'une conférence de presse donnée peu avant son départ pour Addis-Abeba, Jody Williams avait indiqué que la Mission se rendrait à Khartoum le 13 février (dépêche du 09 février 2007), mais les visas n'ont toujours pas été délivrés par le gouvernement soudanais.
La Mission continuera son travail dans la capitale éthiopienne, ainsi que dans d'autres villes, avant un retour à Genève le 21 février. Elle doit présenter son rapport au Conseil lors de sa quatrième session régulière, au mois de mars.
Cette Mission de Haut Niveau a été établie par une décision du Conseil des droits de l'homme adoptée par consensus lors d'une session extraordinaire consacrée au Darfour, au mois de décembre 2006.
Ce n'est pas la première fois qu'une Mission d'enquête ou même une procédure spéciale est empêchée de se rendre sur un territoire pour y mener une évaluation, une prise d'informations ou même une enquête. En 2006, les rapporteurs spéciaux John Dugard et Jean Ziegler se sont heurtés au refus du gouvernement d'Israel. Dans le passé, certains rapporteurs spéciaux ou groupes de travail n'ont pas pu rentrer sur le territoire de certains Etats, faute de coopération. Ce fut l'exemple de Roberto Garreton en ce qui concernait l'ex-Zaïre.
De manière générale, ce problème pose la question de la coopération de l'Etat. D'abord en amont, c'est-à-dire au moment de la négociation d'une résolution suite à une situation de violations. La coopération de l'Etat doit être receherchée non seulement avec l'Etat concerné, mais aussi et au besoin avec le groupe régional auquel il appartient. La coopération suppose encore que l'Etat soit entendu sur les griefs qui lui sont reprochés et surtout qu'il fasse valoir ses arguments et que, dans la mesure du possible, ceux-ci soient entendus. Elle doit rechercher une meilleure entente possible en suscitant une prise de conscience. Les Etats sont "allergiques" à toute initative qui recèle des élans punitifs. Ainsi, peut-on éviter les concensus de façade.
En amont, la coopération doit prendre un caractère plus technique, dans la recherche des personnalités devant composer la Mission, dans les dates de séjour et les modalités de la visite sur le territoire (lieux à visiter, personnes à rencontrer et à interroger...). Elle doit aussi s'opérer lors ou après l'élaboration du rapport en offrant la possibilité à l'Etat de donner son point de vue, et non de modifier le rapport.
Ces différentes étapes peuvent concourir à éviter un rejet du rapport final, donc un échec. Il ne s'agit pas d'assurer un contrôle de l'Etat sur la Mission, mais plutôt de l'y associer dans les proportions raisonnables.
Face à de tels refus, les différents organes spéciaux et Missions ont développé une pratique consistant à se rendre dans d'autres pays, au besoin dans des pays voisisns, pour y rencontrer et interroger les ONG, les OI et les victimes, et constituer ainsi un rapport.
Aussi louable soit-elle, cette pratique nous a toujours semblé contestable et non productive à deux égards.
D'une part, les infornmations peuvent être moins fiables et prêter à débat (argument que les Etats font toujours valoir). D'autre part, les rapports sont systématiquement contestés, voire rejetés par les Etats concernés, quand bien même les informations y contenues sont autenthiques, ce qui ne contribue pas à améliorer les situations. Nous avions déjà donné sur ce site les motifs pour lesquels les Etats refusent de coopérer, motifs politiques, psychologiques ou idéologiques. (Voir notre note du 13 octobre 2006 à ce sujet)
La résolution instituant le Conseil des droits de l'homme semble résoudre cette question, du moins en théorie, dans la mesure où elle fait de la coopération et du dialogue l'épine dorsale du travail de cet organe.
Cependant, dans la pratique, ce principe peine encore à trouver plus d'application, application qui est cruciale pour que le Conseil ne tombe pas dans les travers de la défunte Comission des droits de l'homme.
Il faudrait alors se souvenir de trois points à concilier : l'intérêt et la responabilité à protéger les victimes, le caractère politique du Conseil des droits de l'homme et la prévalence de la souveraineté des Etats.
Le Conseil des droits des droits de l'homme n'est pas une juridiction, mais bel et bien un organe politico-diplomatique, où les intérêts ne sont pas absents.