Alors qu'ils sont devenus «indépendants de leurs anciennes puissances coloniales», depuis plus de 40 ans, les Etats africains ont toujours lié leur développement à ce qu'on appelle «l'aide internationale». Cette politique n'a produit aucun développement mais, dans les grands forums internationaux, on continue encore à appeler les pays riches à faire davantage d'efforts et à consacrer au moins 0,7% de leur Produit national brut (PNB) à «l'aide au développement», objectif qui est loin d'être atteint.
D'ailleurs, la part consacrée à cette aide ne fait que diminuer. Selon l'Organisation de coopération et de développement économique (OCDE), qui vient de dresser et de rendre public le bilan 2006 de l'aide consacrée par les 23 pays membres de son Comité d'aide au développment (CAD), l'aide consentie, qui ne représente que 0,3% du PNB, a baissé de 5,1% entre 2005 et 2006. Seuls quelques pays européens, en particulier le Luxembourg, les Pays Bas et les pays nordiques (Suède, Norvège et Danemark), ont respecté l'objectif fixé par les Nations Unies d'allouer 0,7% du PNB à l'aide au développement. Quant aux Etats-Unis, même s'ils y ont consacré la plus importante somme (22,7 milliards de dollards dont l'essentiel à l'Irak), leur contrbution a baissé de 20% au cours de la dernière année. La promesse faite par le G8, lors du sommet de Gleneagles en Ecosse en juillet 2005, de doubler l'aide à l'Afrique d'ici 2010 semble tout simplement oubliée. Aucune augmentation notée en 2006 (voir le bilan dressé par le CAD de l'OCDE :
Faudrait-il s'en plaindre ?
Non, absolument pas !
Il est temps de changer les termes de ce débat, car ce n'est pas cette aide qui va développer l'Afrique. Il appartient aux gouvernements et aux Etats africains d'élaborer et de mettre en oeuvre de véritables politiques de développement et de redéfinir les rapports qu'ils souhaitent avoir avec les pays dits riches ou développés.
Je viens également de lire avec beaucoup d'intérêt un autre rapport élaboré par une Commission d'enquête mise en place par le Sénat du Canada sur le bilan de 40 ans d'aide au Développement : http://www.parl.gc.ca/39/1/parlbus/commbus/senate/com-f/fore-f/rep-f/repafrifeb07-f.pdf. Ses conclu-sions ne sont nullement des révélations, car elles ne font que confirmer ce que tout le monde savait déjà. C'est à dire que «ni les programmes d'aide au développement - lents, mal conçus et dont personne ne rend compte -, ni les institutions d'aide étrangère, y compris l'Agence canadienne de développement international (ACDI), n'ont réussi à améliorer de façon continue la qualité de vie des Africains». Et les auteurs de noter que «les subventions paralysantes et le protectionnisme du régime de commerce international sont de bons exemples de l'échec de ce qu'on appelle «la communauté internationale».
Toutefois, les auteurs du rapport ont également raison d'ajouter que «la piètre administration publique et le piètre leadership en Afrique même sont de loin les plus grands obstacles à sa croissance et à sa stabilité. Dans bien des cas, la gouvernance des dirigeants africains s’avère inacceptable et pernicieuse. Ce sont les simples citoyens qui en souffrent le plus, même s’ils continuent malgré tout de lutter avec ténacité pour améliorer leur sort».
Ce rapport, fruit d'une longue recherche avec des enquêtes qui ont été menées dans plusieurs pays, aussi bien en Amérique du Nord qu'en Europe et en Afrique, d'Ottawa à Prétoria en passant par Washington, Bruxelles, Dakar, Addis Ababa et Nairobi, est très riche. Il jette une nouvelle lumière sur un important sujet de débat pour l'Afrique. Par conséquent, il mérite d'être lu attentivement par «les bailleurs de fonds» mais aussi et surtout par les responsables politiques africains.

Mode de citation : A. Ben-Ousmane DIALLO, «L'aide au développement : un grand échec !», MULTIPOL - Réseau d'analyse et d'information sur l'actualité internationale, 18 avril 2007.