En effet, dans un entretien daté du 20 décembre 2007 accordé au journal autrichien Die Presse, le Président de la République arabe syrienne, Bachar El-Assad, reconnaît que son pays a reçu en 2001 une offre de coopération nucléaire du réseau Khan, mais qu’il l’a tout de suite décliné : « Au début de l’année 2001, nous avons reçu une lettre d’un certain Khan. Nous ne savions pas si celle-ci était authentique ou falsifiée par Israël pour nous tendre un piège. En tout cas, nous n’étions intéressés ni par des armes nucléaires ni par un réacteur nucléaire. Nous n’avons jamais rencontré Khan », affirme le leader syrien dans l’interview.
Ces révélations interviennent trois mois après l’énigme de l’attaque aérienne de l’aviation israélienne sur un objectif du pays, une action à laquelle la Syrie aurait pu riposter : « Nous aurions pu répondre à l’attaque de l’IAF (Israeli Air Force) en tirant un missile, mais cela aurait pu fournir un prétexte à Israël pour commencer une guerre et nous ne le voulions pas », faisait remarquer El-Assad pour qui la cible du raid du 6 septembre 2007 était une installation militaire en construction, tout en écartant que celle-ci était nucléaire.
Ceci n’est pas du tout de l’avis de nombreux experts occidentaux qui pensent, après analyse des images satellites du site, que celui-ci abritait la construction d’un réacteur clandestin d’après un modèle nord-coréen. De récentes sources avaient déjà évoqué une éventuelle coopération nucléaire entre les deux pays. On se souvient d’ailleurs, quelques jours avant l’opération « Verger » de l’Hey Ha’Avir, le 3 septembre 2007, des informations selon lesquelles un bâtiment battant pavillon nord-coréen aurait déchargé une mystérieuse cargaison, que d’aucuns ont assimilé à de l’équipement nucléaire, au port syrien de Tartous. Et, fait marquant, quelques jours après le 6 septembre, Pyongyang avait protesté vigoureusement contre le raid israélien qu’il avait alors qualifié de « pure provocation ».
La Syrie tente-t-elle réellement de lancer un programme clandestin de recherche nucléaire militaire ? Difficile d’en être sûr. En tout cas, les inquiétudes à ce sujet ne datent pas d’aujourd’hui. Et contrairement aux propos du Président Bachar El-Assad, Khan aurait rencontré à plusieurs reprises des autorités syriennes. Ce dernier aurait même, au cours de ses déplacements dans le pays, donné des enseignements sur les questions nucléaires (1). De plus, à en croire certains rapports, la Syrie aurait eu à exploiter des centrifugeuses. Ce sont là autant d’éléments qui ne rassurent guère sur les véritables intentions de Damas qui, compte tenu de ses relations difficiles avec les États-Unis et Israël, pourrait peut-être avoir succombé à la tentation nucléaire dans une région où elle ne sera finalement pas la première à introduire la bombe.
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(1) Andrew KOCH, « Khan case raises fears of further proliferation », Jane’s Intelligence Review, September 2004, p. 46.