Confluences n’est pas une revue juridique mais les enjeux de cette justice, sur le plan éthique comme sur le plan politique, sont tels que chacun doit y réfléchir ; de plus, il se trouve que la Méditerranée, notre champ d’étude privilégié, a eu le triste privilège d’avoir conduit les Nations Unies à accélérer leur réflexion et leur action sur la justice pénale internationale tant les crimes commis en Bosnie, dans les années 90, furent terribles ; épuration ethnique, massacres sur une grande échelle, viols collectifs systématiques, tortures et exécutions sommaires, camps de détention aux conditions inhumaines furent en effet les horreurs quotidiennes d’une guerre où les délires nationalistes n’avaient plus de limites, comme le montre bien Xavier Bougarel dans un article que nous avions déjà publié en 1994 « Voisinage et crime intime ». C’est en réaction à ces tragédies froidement planifiées par des responsables politiques et militaires de ces pays et de ces clans en guerre que le Conseil de sécurité décida de créer, en 1993, le Tribunal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY) sur la base du chapitre VII de la Charte ; celui sur le Rwanda étant créé quelques mois plus tard, en 1994 selon la même procédure, à la suite du génocide qui bouleversa ce pays. Le scepticisme entoura alors ces initiatives. Mais les juges et le procureur qui en eurent la responsabilité ont réussi à en faire de véritables juridictions malgré les multiples obstacles qu’ils durent surmonter.
Et c’est certainement grâce à la crédibilité qu’ils ont su donner à leur action judiciaire que les travaux sur une Cour pénale internationale (CPI) à vocation universelle ont été relancés pour aboutir, en 1998, à la signature d’un traité en permettant la naissance. Ainsi, en l’espace d’une dizaine d’années, ce qui était encore considéré comme une forme de projet utopique, punir les individus coupables des crimes les plus graves même s’ils occupent de hautes fonctions dans l’appareil d’Etat, a commencé à devenir une réalité.

SOMMAIRE
Dossier
Introduction, Jean Paul Chagnollaud
Entretien avec le juge Claude Jorda
Le juge et le politique, Leïla Bourguiba
Cour pénale internationale : modèles de saisine et limites, Patrick Baudoin
Répression des crimes de guerre : les lacunes de la législation française, Vincent Vulin
La justice internationale dans l’imbroglio libanais : récit d’une lutte d’influence, Georges Corm
La justice pénale internationale pour le Liban : bienfait ou malédiction ?, Entretien avec Florence Hartmann
Politique et justice internationales : les guerres secrètes, Un livre de Florence Hartmann
« Paix et châtiment, les guerres secrètes… »
Documents
Xavier Bougarel, Voisinage et crime intime
Un rapport de l’Unesco, Le viol comme arme de guerre
Actuel
Robert Bistolfi, Kosovo : logique du pire ?
Bruno Callies de Salies, Tunisie : chronique de privations de liberté
Gérard Claude, Egypte : la diplomatie dans le contexte de l’Orient arabe
Michel Sakkar, Palestine : le Hamas après le coup d’Etat de Gaza
Robert Bistolfi, Légitimité de l’Etat d’Israël : la question ne sera pas posée…
Robert Bistolfi, Union méditerranéenne : une forme en recherche de contenu