Le président a ajouté que, «en oeuvrant à assurer la primauté du droit, l’Organisation (des Nations Unies) peut renforcer ce tissu moral qui est tellement essentiel à la cohésion d’un monde aux interconnexions croissantes».
M. Owada s’adressait aux représentants des Etats Membres des Nations Unies réunis à New York à l’occasion de la présentation par la Cour de son rapport pour la période allant du 1er août 2009 au 31 juillet 2010. L’organe judiciaire principal des Nations Unies est un «collège de juges qui se consacrent à faire progresser la justice dans le monde contemporain», a-t-il rappelé à son auditoire.
Au cours de son discours devant l’Assemblée générale, le président Owada a, comme le veut la tradition, donné un aperçu des activités judicaires de la Cour, qui, durant la période considérée, a compté à son rôle quelque seize affaires. «Ces affaires, auxquelles étaient parties des Etats de toutes les régions du monde, portaient sur des sujets très divers, allant de questions classiques comme la protection diplomatique et les immunités souveraines à des problèmes d’intérêt plus actuel comme le droit international de l’environnement», a-t-il précisé. «Toutes ces affaires mettent en cause un grand nombre de questions litigieuses de droit international public (et) je peux dire que les travaux de la Cour sont bien le reflet du vaste champ des questions de fond que couvre aujourd’hui le droit international», a remarqué M. Owada.
Pendant les douze mois sous revue, la Cour a rendu un arrêt sur le fond dans l’affaire relative à des Usines de pâte à papier sur le fleuve Uruguay (Argentine c. Uruguay), et a donné un avis consultatif sur la question de la Conformité au droit international de la déclaration unilatérale d’indépendance relative au Kosovo. Cette dernière procédure, a souligné le président Owada, «a suscité un très vif intérêt de la part de l’Organisation des Nations Unies et de ses Etats Membres» et «la Cour est reconnaissante au Secrétariat de l’Organisation pour sa coopération, ainsi qu’aux Etats Membres qui ont participé à la procédure dans la phase écrite et dans la phase orale».
La Cour a également rendu une ordonnance sur la recevabilité d’une demande reconventionnelle dans l’affaire des Immunités juridictionnelles de l’Etat(Allemagne c. Italie) et une ordonnance rayant de son rôle l’affaire relative àCertaines questions en matière de relations diplomatiques (Honduras c. Brésil).
Elle a en outre tenu des audiences et des délibérations dans les affaires suivantes : Ahmadou Sadio Diallo (République de Guinée c. République démocratique du Congo), Application de la convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale (Géorgie c. Fédération de Russie) et Différend territorial et maritime (Nicaragua c. Colombie).
Le président Owada a ensuite informé les personnes présentes à l’Assemblée générale que, depuis le mois d’août 2009, la Cour avait été saisie de trois nouvelles affaires contentieuses et d’une nouvelle requête pour avis consultatif. Il a brièvement résumé ces quatre procédures, dans l’ordre chronologique de leur inscription au rôle général de la Cour.
Premièrement, en décembre 2009, le Royaume de Belgique a introduit contre la Confédération suisse l’instance relative à la Compétence judiciaire et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale (Belgique c. Suisse). Cette affaire porte essentiellement sur l’interprétation et l’application de la convention de Lugano du 16 septembre 1988 et concerne en particulier un litige opposant les principaux actionnaires de la Sabena, l’ancienne compagnie aérienne belge.
Deuxièmement, en avril 2010, la Cour a reçu une demande d’avis consultatif émanant du Fonds international de Développement agricole sur des questions concernant le Jugement no 2867 du Tribunal administratif de l’Organisation internationale du travail sur requête contre le Fonds international de Développement agricole. Ce jugement ordonne au FIDA de verser à une fonctionnaire l’équivalent de deux années de traitement ainsi que des dommages-intérêts pour préjudice moral et de lui rembourser ses dépens, en raison de la suppression de son poste. Cette demande d’avis consultatif s’inscrit dans le cadre d’une procédure spéciale, celle en réformation de jugements de tribunaux administratifs, qui, depuis 1946, a donné lieu à quatre avis, a indiqué le président Owada.
Troisièmement, à la fin du mois de mai 2010, l’Australie a introduit contre le Japon une instance concernant «la poursuite par le Japon de l’exécution d’un vaste programme de chasse à la baleine dans le cadre de la deuxième phase du programme japonais de recherche scientifique sur les baleines en vertu d’un permis spécial dans l’Antarctique («JARPA II»), en violation des obligations contractées par cet Etat aux termes de la convention internationale pour la réglementation de la chasse à la baleine («ICRW»), ainsi que d’autres obligations internationales relatives à la préservation des mammifères marins et de l’environnement marin». Cette affaire a été portée au rôle général de la Cour sous le titre : Chasse à la baleine dans l’Antarctique (Australie c. Japon).
Enfin, en juillet 2010, le Burkina Faso et le Niger ont conjointement saisi la Cour d’un différend frontalier les opposant. Le président a notamment rappelé à son auditoire que la Cour est notamment priée de déterminer le tracé de la frontière entre les deux pays entre la borne astronomique de Tong–Tong et le début de la boucle de Botou. Cette affaire a été portée au rôle général de la Cour sous le titre : Différend frontalier (Burkina Faso/Niger).
M. Owada a souligné que «le nombre des affaires inscrites au rôle de la Cour n’a cessé de croître ces dernières années». Il a indiqué que «16 affaires (étaient) actuellement en instance, auxquelles particip(ai)ent une trentaine d’Etats» membres des Nations Unies.
De plus, le président a fait remarquer que «la portée des affaires qui sont confiées à la Cour est aujourd’hui plus large que jamais, chacune d’elles présentant des caractéristiques particulières sur le plan du droit et sur celui des faits».
«Le recours croissant des Etats à la Cour internationale de Justice pour la solution judiciaire de leurs différends montre que leurs dirigeants politiques ont de plus en plus conscience de l’importance de faire primer le droit dans la communauté internationale», a-t-il souligné. «Il est certain que cette importance se développe rapidement dans le monde contemporain, dans lequel la mondialisation est toujours plus poussée.»
L’orateur a fait observer «que le droit pénètre aujourd’hui tous les aspects des activités de l’Organisation des Nations Unies, du maintien de la paix et de la sécurité à la protection des droits de l’homme, de la lutte contre la pauvreté à la protection de l’environnement de la planète, y compris la question du changement climatique». «Pour ces raisons», a-t-il ajouté, «la Cour attache un grand prix à la confiance que les Etats Membres continuent de placer dans sa mission».
M. Owada a assuré l’Assemblée générale que «la Cour continuera à ne ménager aucun effort pour s’acquitter du mandat que lui confèrent la Charte et son Statut, qui est d’aider les Etats membres à régler pacifiquement leurs différends».
«Je nourris l’espoir que les Etats Membres continueront à lui témoigner leur confiance, non seulement en lui soumettant de nouveaux différends, mais aussi en acceptant sa juridiction, qu’ils le fassent en déposant la déclaration prévue au paragraphe 2 de l’article 36 du Statut ou en signant les nombreux traités internationaux qui contiennent une clause compromissoire attribuant compétence à la Cour pour leur interprétation ou leur application», a conclu le président de la Cour.
Source : CIJ