30 mai 2018

REVUE : "L’enseignement supérieur marchandisé et mondialisé", Recherches internationales (n°111, octobre-décembre 2017)

Michel ROGALSKI

Cinquante années après les événements de mai 1968 personne ne pourrait reconnaître les traits de l’enseignement supérieur tant en France qu’à l’étranger. Certes, la masse de la population universitaire s’est formidablement accrue, mais là n’est pas l’essentiel. Le statut et la conception de cet enseignement ont complètement changé et ont été profondément marqués par la vague de libéralisme qui a submergé la planète.

Il y a cinquante ans le débat et les revendications estudiantines portaient déjà sur la gratuité mais également sur la contribution des études et de la formation à l’enrichissement des pays. La logique posait d’envisager un « salaire » étudiant comme rémunération de l’apport collectif généré. On mesure aujourd’hui le chemin parcouru devant le coût des études toujours plus élevé et présenté comme un retour sur investissement et devant être géré comme tel, c’est-à-dire faisant appel au besoin à l’endettement personnel. Partout le néolibéralisme a bouleversé ce secteur en organisant la hausse des frais d’inscription, le développement des prêts étudiants et en organisant à l’échelle du monde une hiérarchie entre établissements supérieurs permettant à ceux-ci, grâce à des « classements » mondiaux incohérents de justifier toujours plus de l’élévation des tarifs. L’esprit d’entreprise a tellement gagné le secteur que chacun cherche à fusionner et apparaître ainsi plus visible à l’échelle mondiale. Bien sûr sans aucune considération pédagogique.

Une masse croissante d’étudiants s’endette et entre dans la vie professionnelle avec les difficultés que l’on sait. Le boulet est tel qu’on estime qu’un tiers de ces dettes – évaluées déjà à 100 milliards d’euros — ne seront jamais remboursées par cette génération d’étudiants endettés. Une bulle spéculative est en train de se former avec ces dettes étudiantes que l’on commence à titriser et mélanger à d’autres titres toxiques et à revendre à des banques abusées, répétant le mécanisme de la crise des subprimes américaines de 2008.

Cette situation a nourri des luttes étudiantes aux États-Unis, au Canada et au Chili notamment, certaines victorieuses. Elle en appellera d’autres, tant la situation est explosive.
[Présentation]


Michel Rogalski, L’Europe et ses temporalités [Éditorial]
Jacques Fath, ONU : une Assemblée générale très révélatrice
Alain Rouy, La fin du modèle politique allemand
Jean-Jacques Kourliandsky, Quo vadis, Catalogne ? Au-delà du spectacle médiatique
Hassane Zerrouky, 55 ans de rapports entre la France et l’Algérie
Patrick Bond, L’Afrique exploitée, pillée, mais résistante 
DOSSIER
L’ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR MARCHANDISÉ ET MONDIALISÉ
L’enseignement supérieur marchandisé et mondialisé [Présentation]
Aurélien Casta, La lente affirmation des prêts étudiants et des frais d’inscription en Angeterre (1970-2012)
Jean-Rémi Carbonneau, Mélissa Desrochers, Médias et printemps étudiant au Québec 2012
Wiktor Stoczkowski, « Une grenouille vit un boeuf qui lui sembla de belle taille… » ou comment (ne pas) moderniser les universités françaises
TRACES
Pierre Mendès-France, Discours sur le Traité de Rome (18 janvier 1957)
NOTES DE LECTURE
Patrick Moreau, L’autre Allemagne. Le réveil de l’extrême droite [Alain Rouy]
Thibaut Rioufreyt, Les Socialistes français face à la Troisième voie britannique (1997-2015) [Emma Bell]
Philippe Gervais-Lambony, L’Afrique du Sud, les paradoxes de la nation arc-en-ciel [Raphaël Porteilla]
Moda Dieng, L’Afrique du Sud entre émergence et responsabilité [Raphaël Porteilla]






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