29 juin 2021

ACTU : La Biélorussie se retire du Partenariat oriental : une riposte aux sanctions de l’Union européenne

Catherine MAIA

Le 28 juin, la Biélorussie a annoncé la suspension de sa participation au Partenariat oriental de l'Union européenne (UE), une initiative lancée en 2009 visant à un rapprochement entre l'Union, ses États membres et six pays partenaires d'Europe orientale et du Caucase du Sud comprenant l'Arménie, l'Azerbaïdjan, la Biélorussie, la Géorgie, la Moldavie et l'Ukraine. En échange de la réalisation de réformes politiques et économiques, ce Partenariat oriental offre un cadre de coopération multilatérale plus étroit. 

En outre, le représentant permanent de la Biélorussie auprès de l'UE a été rappelé à Minsk pour des consultations, tandis que le chef de la délégation de l'UE en Biélorussie a été invité à retourner à Bruxelles pour « transmettre à ses dirigeants le caractère inacceptable des pressions et des sanctions » européennes. En décidant la rupture de divers accords de coopération, parmi lesquels le Partenariat oriental occupe une place centrale, ces sanctions risquent d’avoir un impact néfaste spécialement dans la lutte contre l’immigration illégale et le crime organisé.

Le ministère des Affaires étrangères biélorusse a présenté ces mesures comme une réaction aux sanctions européennes contre le régime d'Alexandre Loukachenko considérées comme proches d'« une déclaration de guerre économique ». Il a ajouté que les représentants des institutions européennes et les personnes des pays de l'UE ayant contribué à l'introduction de ces sanctions seront désormais interdits d'entrée sur le territoire national.

Ces mesures marquent un épisode supplémentaire dans les tensions qui n'ont fait que de s'accroitre entre la Biélorussie et l'UE avec l’émergence d’un mouvement de protestation qui a suivi l’élection d’Alexandre Loukachenko à un sixième mandat présidentiel en août 2020. Depuis cette date, les résultats électoraux sont contestés par l'opposition et une partie de la communauté internationale, tandis que le chef d’État fait face, par la répression, à un mouvement d'une ampleur inédite depuis son accession au pouvoir en 1994.

Contrairement à la Russie, qui appuie le régime de Loukachenko et voit le Partenariat oriental comme une ingérence dans sa sphère d’influence, l'UE, mais aussi le Royaume-Uni, les États-Unis et le Canada ne reconnaissent pas les résultats de l'élection présidentielle biélorusse de 2020. L’UE, en particulier, a adopté à partir d'octobre 2020 une série de mesures restrictives à l'encontre de la Biélorussie, afin de réagir au caractère jugé frauduleux de l'élection présidentielle en Biélorussie, ainsi qu'aux arrestations et détentions arbitraires et aux actes d'intimidation et de répression violente commis à l’encontre des manifestants pacifiques, des membres de l'opposition et des journalistes, le régime ayant arrêté et jugé, si ce n'est poussé à l'exil, les leaders de la contestation.

Plus récemment, le 23 mai, la Biélorussie s'est également attirée les remontrances de l’UE après l’atterrissage forcé à Minsk d’un avion de la Ryanair, dérouté par un avion de chasse biélorusse lors d’un vol entre Athènes et Vilnius, des capitales de pays de l’UE, la Grèce et la Lituanie, toutes deux membres de l’OTAN. La Biélorussie a justifié ce détournement par des informations concernant la possible présence d'une bombe à bord de l’avion. Si la police biélorusse n’a rien trouvé dans les bagages des passagers, en revanche, elle a arrêté le journaliste biélorusse, Roman Protassevich, un opposant du régime, et sa compagne russe, Sofia Sapega. D’abord placés en détention, puis en résidence surveillée depuis le 25 juin, ils sont accusés d’avoir coordonné, sur les réseaux sociaux (chaîne Télégram Nexta Live), le mouvement de contestation agitant le pays depuis l’an passé.

Cet incident sans précédent a été amplement dénoncé, tant par plusieurs pays européens que par plusieurs personnalités de l’UE. L’UE « n’acceptera pas que les passagers de [ses] compagnies aériennes soient mis en danger », a alors indiqué Adina Valean, la commissaire européenne en charge des Transports. De même, le chef de la diplomatie de l’UE, Josep Borrell, a déclaré : « C’est totalement inadmissible. Nous tenons le gouvernement du Biélorussie pour responsable de la sécurité de tous les passagers et de l’appareil ». « Il faudra assumer toutes les conséquences de violations des règles internationales du transport aérien », a également averti la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen, tandis que le président du Conseil européen, Charles Michel, a réclamé une enquête de l’OACI (Organisation de l’aviation civile internationale).

Après sa décision du 4 juin d’instaurer une interdiction de survol de l'espace aérien de l'UE et d'accès aux aéroports de l'UE pour tous les types de transporteurs biélorusses, le 21 juin, l’Union a décidé d’élargir la liste des personnalités et des entreprises liées au pouvoir biélorusse en place soumises à des sanctions. Ces sanctions comprennent l’interdiction de pénétrer sur ou de transiter par le territoire de l'UE, un gel des avoirs, ainsi que la prohibition pour les citoyens et les entreprises de l'UE de mettre des fonds à la disposition des personnes et entités inscrites sur la liste. Parmi les individus sanctionnés figurent divers hauts fonctionnaires biélorusses, de même que des personnalités de la classe politique et des acteurs économiques de premier plan. Des sanctions économiques concernent également les secteurs-clés de la potasse, du tabac et du pétrole.

Si ces sanctions visent à inciter les autorités biélorusses à mettre un terme aux graves violations des droits humains, à libérer les prisonniers politiques et à engager une transition démocratique pacifique, il n’est pas certain qu’Alexandre Loukachenko, qui dirige d’une main de fer le pays depuis 1994, cède aux pressions.



Le président biélorusse Alexandre Loukachenko, à Minsk (AFP, 2021)


Aucun commentaire :

Enregistrer un commentaire