5 septembre 2015

ACTU : Crise des réfugiés : l'ONU appelle l'Europe à changer sa politique migratoire

Catherine MAIA

Alors que le nombre de migrants fuyant la violence dans leurs pays d'origine à destination de l'Europe ne cesse d'augmenter, le Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés, António Guterres, a exhorté les pays de l'Union européenne à changer les fondements de sa politique migratoire.

A l'heure où l'Union européenne (UE) prépare une série de réunions d'urgence visant à prendre des mesures pour faire face à la crise actuelle des réfugiés et des migrants, M. Guterres a déclaré dans un communiqué de presse que la situation exige « un gigantesque effort commun impossible à réaliser avec l'approche fragmentée actuelle ».

L'Europe est confrontée à un afflux massif de réfugiés, tel qu'elle n'en avait pas connu depuis des décennies, a rappelé le Haut-Commissaire, précisant que plus de 300.000 personnes ont risqué leur vie pour traverser la mer Méditerranée en direction de l'Europe rien qu'en 2015.

« Plus de 2.600 d'entre eux n'ont pas survécu à cette traversée dangereuse, y compris le petit Aylan, âgé de trois ans, dont la photo a bouleversé l'opinion publique mondiale », a déploré M. Guterres, en référence au choc provoqué par la diffusion dans la presse mondiale de la photographie du corps sans vie, échoué sur une plage turque, d'Aylan Kurdi, cet enfant syrien qui fuyait la guerre avec sa famille.

Aylan photomontage

Après leur arrivée sur les côtes et les frontières de l'Europe, les migrants et réfugiés continuent leur voyage, confrontés au chaos et subissant l'indignité, l'exploitation et le danger aux frontières et le long du chemin, a dénoncé le Haut-Commissaire.

« La générosité désintéressée des citoyens privés et des organisations de la société civile en vue d'accueillir et d'aider les nouveaux arrivants est une véritable source d'inspiration », a-t-il cependant souligné. « Sans oublier le leadership politique et moral exemplaire d'un certain nombre de pays ».

Mais, dans l'ensemble, l'Europe n'a pas réussi à trouver une réponse commune efficace, et les gens continuent d'en souffrir, a constaté M. Guterres, avant d'énoncer un certain nombre de points fondamentaux à l'attention des pays européens.

« Il s'agit principalement d'une crise de réfugiés, et non pas seulement d'un phénomène de migration », a tout d'abord précisé le Haut-Commissaire. Dans la mesure, a-t-il dit, où la grande majorité de ceux qui arrivent en Grèce proviennent de zones de conflit comme la Syrie, l'Iraq ou l'Afghanistan, ils ont droit à une protection en tant que réfugiés du point de vue du droit international.

La seule façon de résoudre ce problème pour l'Union européenne et tous ses États membres est de mettre en œuvre une stratégie commune, fondée sur la responsabilité, la solidarité et la confiance, a ensuite souligné M. Guterres.

Selon lui, la première mesure collective à mettre en œuvre de toute urgence est de débloquer les ressources nécessaires pour la réception, l'assistance et l'identification des réfugiés, principalement en Grèce, en Hongrie, mais également en Italie.

Les personnes considérés comme pouvant légitimement prétendre à une protection doivent bénéficier immédiatement de programmes de réinstallation massifs, a estimé le Haut-Commissaire, tout en préconisant la création d'au moins 200.000 places supplémentaires dans tous les Etats de l'UE.

Ceux considérés comme ne pouvant pas légitimement prétendre à une protection doivent être le plus vite possible reconduits dans leurs pays d'origine, dans le respect de leurs droits humains, a-t-il ajouté.

« Les pays européens, ainsi que les Gouvernements dans d'autres régions du monde, doivent réaliser des changements fondamentaux pour permettre une réinstallation plus importante et élargir les quotas d'admission humanitaire, les visas et les programmes de parrainage, les bourses et les autres façons d'entrer légalement en Europe », a déclaré le M. Guterres.

« L'Europe est confrontée à un moment de vérité », a déclaré M. Guterres. « Le temps est venu de réaffirmer les valeurs sur lesquelles elle s'est construite ».



 
© UNHCR

GENÈVE, 28 août (HCR) – Avec près de 60 millions de personnes déplacées par la force à l'échelle mondiale et les traversées par bateau de la Méditerranée qui font les manchettes des journaux presque quotidiennement, il devient de plus en plus usuel de voir les termes « réfugié » et « migrant » être utilisés de façon interchangeable par les médias et le public. Toutefois, y a-t-il une différence entre les deux termes? Et est-elle importante?

Oui, il existe une différence et elle est importante. Les deux termes ont des significations distinctes et différentes. En les utilisant à tort, on pose des problèmes à ces deux populations. Voici pourquoi :

Les réfugiés sont des personnes qui fuient des conflits armés ou la persécution. Leur situation est souvent si périlleuse et intolérable qu'ils traversent des frontières nationales afin de trouver la sécurité dans des pays voisins, et sont par conséquent reconnus internationalement comme des réfugiés ayant accès à l'aide des États, du HCR et d'autres organisations. On les reconnaît ainsi précisément parce qu'il est dangereux pour eux de retourner dans leur pays et qu'ils ont besoin d'un refuge ailleurs. Refuser l'asile à ces personnes aurait potentiellement des conséquences mortelles.

Le terme réfugié est défini par le droit international et les réfugiés sont protégés par ce dernier. La Convention de 1951 relative aux réfugiés et son protocole de 1967, ainsi que d'autres textes juridiques comme la Convention de l'OUA de 1969 sur les réfugiés, restent les pierres angulaires de la protection moderne des réfugiés. Les principes juridiques que ces documents énoncent ont été intégrés à d'innombrables autres instruments et pratiques internationales, régionales et nationales. La Convention de 1951 définit ce qu'est un réfugié et souligne les droits fondamentaux que les États doivent leur garantir. Un des principes les plus fondamentaux énoncés par le droit international est celui voulant que les réfugiés ne doivent pas être expulsés ou renvoyés à une situation où leur vie et leur liberté seraient menacées (principe du non-refoulement).

La protection des réfugiés revêt de nombreux aspects. Ceux-ci comprennent: l'assurance de ne pas être renvoyé chez eux face aux dangers qu'ils ont fuis; l'accès à des procédures d'asile justes et efficaces; et des mesures visant à assurer que leurs droits fondamentaux sont respectés afin de leur permettre de vivre dans la dignité et la sécurité, tout en les aidant à trouver une solution à long terme. Les États assument la responsabilité principale de cette protection. Par conséquent, le HCR collabore étroitement avec les Gouvernements afin de les conseiller et de les appuyer s'il y a lieu pour assumer leurs responsabilités.

Les migrants choisissent de s'en aller non pas en raison d'une menace directe de persécution ou de mort, mais surtout afin d'améliorer leur vie en trouvant du travail, et dans certains cas, pour des motifs d'éducation, de regroupement familial ou pour d'autres raisons. Contrairement aux réfugiés qui ne peuvent retourner à la maison en toute sécurité, les migrants ne font pas face à de tels obstacles en cas de retour. S'ils choisissent de rentrer chez eux, ils continueront de recevoir la protection de leur Gouvernement.

Pour les Gouvernements, cette distinction est importante. Les pays gèrent les migrants en vertu de leurs propres lois et processus en matière d'immigration. Les pays gèrent les réfugiés en vertu des normes sur la protection des réfugiés et de l'asile aux réfugiés qui sont définies dans les lois nationales et les normes internationales. Les pays ont des responsabilités précises envers les demandeurs d'asile sur leurs territoires et à leurs frontières. Le HCR aide les pays à gérer ces responsabilités en matière d'asile et de protection des réfugiés.

En effet, la politique a sa façon d'intervenir dans de tels débats. La confusion entre les réfugiés et les migrants peut avoir des conséquences graves sur les vies et la sécurité des réfugiés. Interchanger les deux termes détourne l'attention de la protection juridique précise dont les réfugiés ont besoin. Cela peut saper le soutien de la population pour les réfugiés et l'institution de l'asile à un moment où, plus que jamais auparavant, les réfugiés ont besoin d'une telle protection. Nous devons traiter tous les êtres humains avec respect et dignité. De plus, nous devons nous assurer que les droits fondamentaux des migrants sont respectés. Par le fait même, nous devons également agir de façon juridiquement appropriée en ce qui concerne les réfugiés, en raison de leur situation particulière.

Par conséquent, songeons de nouveau à l'Europe et au nombre important de personnes qui sont arrivées au cours de cette année et de l'année dernière par bateau en Grèce, en Italie et ailleurs. Que sont-elles? Des réfugiés ou des migrants?

En réalité, elles appartiennent aux deux groupes. La majorité des personnes arrivant cette année en Italie et en Grèce plus particulièrement, proviennent de pays plongés dans la guerre ou que l'on considère comme des pays produisant des réfugiés, qui ont besoin de la protection internationale. Toutefois, une plus petite proportion provient d'autres pays, et pour nombre d'entre eux, le terme « migrant » serait plus exact.

Ainsi, au HCR, nous disons « réfugiés et migrants » lorsque nous faisons référence aux mouvements de personnes par voie maritime ou dans d'autres circonstances lorsque nous pensons que les deux groupes peuvent être présents – les mouvements par bateau en Asie du Sud-Est sont un autre exemple de ce phénomène. Nous appelons « réfugiés » les personnes qui fuient la guerre ou la persécution en franchissant une frontière internationale. Et nous appelons « migrants » les personnes qui se déplacent pour des motifs qui ne sont pas inclus dans la définition légale de ce qu'est un réfugié. Nous espérons que d'autres songerons à faire de même. Le choix des mots est important.


Aucun commentaire :

Enregistrer un commentaire