Catherine MAIA
Le 27 octobre, c’est dans un climat tendu marqué par de vives émotions et des appels à la désescalade que l’Assemblée générale des Nations Unies a adopté une résolution sur la « Protection des civils et le respect des obligations juridiques et humanitaires » dans la crise en cours à Gaza. Bien que non contraignant, le texte demande « une trêve humanitaire immédiate, durable et soutenue, menant à la cessation des hostilités » et réaffirme « qu’on ne pourra parvenir à un règlement durable du conflit israélo-palestinien que par des moyens pacifiques, fondé sur les résolutions pertinentes des organes de l’ONU, dans le respect du droit international et sur la base de la solution des deux États ».
Après une première journée où se sont multipliés les appels à un cessez-le-feu immédiat et à un accès humanitaire à la bande de Gaza où la population civile palestinienne a déjà payé un lourd tribut avec 7 000 morts en trois semaines, ainsi qu’au droit d’Israël à se défendre dans le respect du droit international après l’attaque du Hamas ayant massacré 1 400 personnes, le vote de la résolution s'est déroulé au deuxième jour de la 10e session extraordinaire d'urgence de l'Assemblée générale sur la crise israélo-palestinienne.
Cette session extraordinaire d'urgence de l'Assemblée générale, tenue pour la première fois en 1997 à la demande du Qatar, s’est déroulée dans le cadre du mandat « Unis pour la paix », habilitant l'Assemblée à se réunir dans les 24 heures en cas de paralysie du Conseil sur une question cruciale de paix et de sécurité internationales. Tandis que les conditions se sont gravement détériorées ces derniers jours dans l'enclave assiégée de Gaza et que le Conseil de sécurité a rejeté le 25 octobre deux projets de résolutions concurrents concernant la réponse à apporter à la crise humanitaire à Gaza – l'un présenté par les États-Unis (appelant à des pauses humanitaires à Gaza) et l'autre présenté par la Russie (appelant à un cessez-le-feu à Gaza) –, ce mandat de l'organe plénier des Nations Unies a été réactivé.
Par sa résolution, l’Assemblée générale commence par exprimer sa vive préoccupation concernant « la dernière escalade de la violence depuis l’attaque du 7 octobre 2023 », de même que la grave dégradation de la situation dans la région, en particulier dans la bande de Gaza et dans le reste du Territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est, et en Israël ».
Elle poursuit en « condamnant tous les actes de violence dirigés contre des civils palestiniens et israéliens, notamment tous les actes de terrorisme et les attaques indiscriminées, ainsi que les actes de provocation, les incitations et les destructions », et rappelle l’importance du respect de certains principes cardinaux du droit international humanitaires, à savoir les « principes de distinction, de nécessité, de proportionnalité et de précaution dans la conduite d’hostilités ».
L’Assemblée générale appelle à une « trêve humanitaire immédiate, durable et soutenue, menant à la cessation des hostilités ». Elle demande également à « toutes les parties de s’acquitter immédiatement et pleinement des obligations que leur impose le droit international, y compris le droit international humanitaire et le droit international des droits de l’homme, en particulier en ce qui concerne la protection des civils et les biens de caractère civil, ainsi que la protection du personnel humanitaire, des personnes hors de combat, et des installations et biens humanitaires, et de permettre et de faciliter l’accès humanitaire pour l’acheminement de fournitures et services essentiels à tous les civils qui sont dans le besoin dans la bande de Gaza ». Plus spécifiquement, elle « rejette fermement toute tentative de transfert forcé de la population civile palestinienne » et « demande la libération immédiate et inconditionnelle de tous les civils qui sont retenus illégalement en captivité ».
Préalablement au vote de cette résolution, un amendement avait été proposé par le Canada en vue d’y inclure une condamnation sans équivoque des attaques du Hamas en Israël à partir du 7 octobre, ainsi que les prises d'otages. Si une majorité de membres a soutenu une telle proposition, celle-ci a toutefois été rejetée, faute d’avoir pu obtenir la majorité nécessaire des deux tiers des membres présents et votants pour être adoptée à l’Assemblée générale (88 votes pour, 55 contre et 33 abstentions). Ce rejet d’un amendement qualifié par l’ambassadeur de Jordanie auprès des Nations Unies d’effort pour « blanchir » les « atrocités » israéliennes à Gaza, a finalement conduit le Canada à s’abstenir lors du vote du 27 octobre, à l’instar d’autres pays tels que l’Allemagne, l’Australie, la Corée du Sud, la Finlande, la Grèce, l’Inde, l’Irak, l’Italie, le Japon, les Pays-Bas, la Pologne, la Suède, la Tunisie, l’Ukraine ou le Royaume-Uni.
D’autres encore, comme les États-Unis, ont décidé pour voter contre. Dans un discours prononcé avant le vote du 27 octobre, l’ambassadrice américaine auprès des Nations Unies, Linda Thomas-Greenfield, a justifié la position des États-Unis en raison de l’absence d’une mention du Hamas comme auteurs des attaques du 7 octobre. Bien que l’administration Biden ne soutienne pas un cessez-le-feu, l’ambassadrice américaine a néanmoins précisé que les civils palestiniens, le personnel de l’ONU et les travailleurs humanitaires devaient être protégés.
L’ambassadeur d’Israël auprès des Nations Unies, Gilad Erdan, a rejeté, quant à lui, avec véhémence la résolution adoptée, tout en proclamant que son pays demeurait déterminé à se défendre et à éradiquer le Hamas pour éviter une nouvelle attaque comme celle qui, il y a trois semaines, a occasionné la mort de 1 400 personnes, majoritairement des civils. « C’est un jour sombre pour l’ONU et pour l’humanité », a déclaré Gilad Erdan, jurant qu’Israël utiliserait « tous les moyens » pour combattre le Hamas. Et d’ajouter : « Aujourd’hui est un jour qui restera abject. Nous avons tous constaté que l’ONU n’a plus la moindre once de légitimité ou de pertinence ».
Bien que la Palestine, en sa qualité d’État non membre observateur auprès de l’ONU n’ait pas de droit de vote, le représentant de l’État palestinien a, pour sa part, prié la communauté internationale de se souvenir qu’en ce moment même les Palestiniens de Gaza fuient d’un endroit à un autre sans nulle part où aller en toute sécurité, les bombes israéliennes n’ayant épargné aucun mètre carré de ce territoire.
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