Longtemps ignoré par le droit, l’animal devient, en ce début de XXIe siècle, l’objet d’une réflexion juridique de plus en plus nourrie. À l’heure où notre société porte un intérêt croissant à la cause animale, la communauté juridique internationale semble cependant relativement silencieuse sur le statut de cet être à la fois vivant et objet, élément primordial de l’environnement qu’elle tend à chérir. Certes, l’animal est reconnu et protégé dans de certains droits positifs nationaux ou supranationaux. Mais, parce qu’il n’existe pas « un animal », mais « un monde animal varié » dont les besoins se diversifient selon les situations, la protection de l’animal est loin de faire l’objet d’un régime juridique cohérent et structuré. La distinction entre les animaux sauvages et les animaux domestiques à partir de laquelle le droit français, par exemple, a organisé la répression des mauvais traitements et de la cruauté parait, en effet, avoir été transposée au plan international.
Le droit international et européen n’accorde qu’une très modeste place à la sensibilité des animaux sauvages. Pour reprendre les mots de R. Babadji, « c’est, pour ainsi dire, d’en face qu’ils sont appréhendés », à savoir sous l’angle traditionnel de la chasse, de la pêche, de la conservation, englobés dans les concepts de faune ou d’écosystème, ou encore, plus récemment, de développement durable. De même, si certaines instances internationales se sont récemment saisies de la question, elles tendent à considérer, dans ce cadre, la cause animale plus comme un objet accessoire de leur compétence que comme le but premier de leur démarche.
L’animal domestique, à l’inverse, fait l’objet d’un débat relativement ancien, notamment dans les droits internes, quant à sa nature ou quant à la possibilité de lui octroyer la personnalité juridique. La relation de proximité entre l’humain et l’animal domestique semble même avoir permis de porter la question de son « bien-être » à l’attention de certaines institutions internationales, en témoigne les avancées constatées en ce sens dans le cadre du Conseil de l’Europe, de l’Union européenne ou, à l’échelle internationale, de l’Organisation mondiale de la santé animale. Leur efficacité demeure néanmoins discutée dès lors que ces avancées ne constituent bien souvent que des réglementations a minima qui n’auront lieu d’être que tant qu’elles pourront être conciliées avec l’exploitation économique ou scientifique de celui-ci. Autrement dit, si l’animal voit aujourd’hui sa sensibilité mise au premier plan, d’aucuns estiment qu’elle serait encore ignorée quand il est considéré comme un produit de masse ou qu’il se situe « à l’antichambre de la famille ».
La protection de l’animal est donc abordée de façon plurielle par le droit international, se construisant à la périphérie de ses branches. Nonobstant, elle a le mérite d’en constituer, bien qu’indirectement, un objet. Et c’est à ce dernier qu’est consacré le présent volume de l’Observateur des Nations Unies. Unis par le désir de participer à la promotion d’un droit internationalisé de la protection animale, les contributeurs de ce volume n’auront, pour autant, pas tous pour ambition d’uniformiser le jus animalium, si tant est qu’il existe. Cela est d’ailleurs la raison pour laquelle, sans rompre avec la dichotomie présentée ci-dessus, la première partie de ce volume sera consacrée à l’animal domestique (I) quand la seconde se concentrera sur l’animal sauvage (II). Une troisième partie, consacrée à l’animal, toute catégorie confondue, fera office de propos final (III).
Claire Portier
(extrait de l'Editorial)
(extrait de l'Editorial)
Claire Portier, Éditorial
L’animal domestique
Ilja Richard Pavone, Animal Welfare and Protection of Farm Animals in the European UnionL’animal sauvage
Mamoud Zani, Le Conseil de l’Europe et la protection des animaux : à propos de la Convention de Chisinau sur le transport international des animaux
Pallavi Arora, Christos Kypraios, Ritual slaughter in Europe: Towards Reconciling Animal Welfare and Religious Pluralism
Agnès Maatoub, Le droit international à la rescousse des chiens errants
Caroline Migazzi, La lutte contre le commerce illégal d’espèce sauvage : vers un renforcement de l’effectivité et de l’efficacité du cadre juridique ?Varia
Leticia Albuquerque, La chasse au regard du droit international : une pratique pour la conservation des espèces ou un acte biocide ?
Yann Prisner-Levyne, For a New Legal Status for Wild Animal under International Law
L’Animal
Deborah Cao, International Crimes against Animality
Sabine Brels, Globally Protection Animals at the UN : Why and How ?
Raphaël Maurel, Le droit et les armoiries : à la recherche d’un ancien ordre juridique transnational
Aucun commentaire :
Enregistrer un commentaire