Catherine MAIA
L’Assemblée générale a adopté, le 4 mai, la Résolution A/69/L.62 sur la Cour pénale internationale (CPI), qualifiée par le représentant du Kenya de « plus petit dénominateur commun ». Le représentant des Pays-Bas, qui a présenté la résolution sur la CPI, a noté que l’adhésion en avril 2015, de la Palestine au Statut de la Cour, dit Statut de Rome, constitue l’un des événements marquants depuis le dernier rapport de la Cour.
L’Assemblée générale a adopté, le 4 mai, la Résolution A/69/L.62 sur la Cour pénale internationale (CPI), qualifiée par le représentant du Kenya de « plus petit dénominateur commun ». Le représentant des Pays-Bas, qui a présenté la résolution sur la CPI, a noté que l’adhésion en avril 2015, de la Palestine au Statut de la Cour, dit Statut de Rome, constitue l’un des événements marquants depuis le dernier rapport de la Cour.
Son
homologue du Brésil a espéré qu’à la prochaine session, il sera possible
d’adopter un texte à la hauteur « de notre objectif commun de combattre
l’impunité ». Le représentant a regretté qu’une nouvelle fois, l’Assemblée
générale se soit bornée à « constater que les dépenses liées aux enquêtes
et poursuites engagées par la Cour, notamment celles concernant les situations
dont elle est saisie par le Conseil de sécurité, ont été prises en charge par
les seuls États parties au Statut de Rome ». Il est regrettable que
la résolution n’appelle pas les États Membres à examiner cette question, a-t-il
estimé, car nous devons réfléchir à la viabilité d’un système où la Cour fait
face à une charge de travail sans précédent et où les membres du Conseil de
sécurité ne cessent de jouer avec l’idée de la saisir de telle ou telle
situation. Il faut se souvenir, s’est impatienté le représentant, que
l’Assemblée générale a la responsabilité exclusive d’examiner et d’approuver le
budget de l’ONU. Il est, en effet, « inacceptable » que l’Assemblée ne
puisse se prononcer sur la question des coûts découlant de la saisine de la Cour
par le Conseil de sécurité, a renchéri la représentante de l’Argentine, en
estimant, à son tour, que ces coûts devraient être pris en charge par les
Nations Unies et non par les États parties au Statut de Rome.
Le
lien entre la CPI et le Conseil de sécurité atteste de la
« politisation » de la justice pénale internationale, a commenté le
représentant du Soudan qui, faisant valoir son statut d’État non partie au
Statut de Rome, a dit ne pas se sentir concerné par « une résolution qui
n’a aucun poids ». Il a accusé la Cour d’être devenue un instrument
visant exclusivement « les dirigeants et les symboles
africains ».
RAPPORT DE LA COUR
PÉNALE INTERNATIONALE
Adoption du projet de
Résolution A/69/L.61
Dans cette résolution adoptée sans vote, l’Assemblée
générale salue le rôle que joue la Cour pénale internationale (CPI) dans un système
multilatéral qui a pour vocation de mettre fin à l’impunité, de renforcer
l’état de droit, de promouvoir et d’encourager le respect des droits de
l’homme, d’asseoir durablement la paix et de promouvoir le développement des
États. Elle demande aux États parties au Statut de Rome qui ne l’ont pas
encore fait de légiférer pour donner effet aux obligations découlant du Statut
et de coopérer avec la Cour à l’exécution de sa mission. Elle sait gré
aux États, parties ou non au Statut de Rome, à l’ONU et aux autres
organisations internationales et régionales du concours qu’ils ont prêté
jusqu’à présent à la Cour, et engage les États qui en ont l’obligation à faire
de même à l’avenir, en particulier en matière d’arrestation et de remise, de
communication de preuves, de protection et de réinstallation de victimes et de
témoins et d’application des peines.
L’Assemblée souligne l’importance de la coopération
avec les États non parties au Statut de Rome et rappelle que si l’acceptation
de la compétence de la Cour par un État qui n’est pas partie au Statut est
requise, cet État peut, par déclaration déposée auprès du Greffier de la Cour,
consentir à ce que la Cour exerce sa compétence à l’égard du crime dont il
s’agit. Elle demande instamment à tous les États parties de prendre en
compte les intérêts, les besoins d’assistance et le mandat de la Cour.
Elle note que l’Assemblée des États parties au
Statut de Rome a décidé, à sa treizième session, de reprendre sa session à La
Haye les 24 et 25 juin 2015 et d’y tenir également ses quatorzième et quinzième
sessions. Elle attend avec intérêt la quatorzième session, qui doit
se tenir du 18 au 26 novembre 2015.
Explications de
position
Le représentant du Kenya a
indiqué que son pays s’était joint au consensus et ce, malgré le fait que la
résolution ne soit qu’une reprise technique de la résolution précédente.
« Cette reprise technique n’est pas due à un manque d’efforts des
États membres mais parfois nous n’avons pas d’autres choix que d’adopter le
plus petit dénominateur commun. » Le représentant a comparé la CPI,
qui existe depuis 12 ans, à une « adolescente qui, comme toutes les
adolescentes, a besoin de directives ». « La Cour doit s’en
tenir au strict respect de son mandat », a-t-il insisté, avant de plaider
pour une interprétation du Statut de Rome qui soit de nature à refléter la
pluralité des réalités culturelles, sociales et politiques des États.
« Les États doivent être traités sur un pied d’égalité »,
a-t-il poursuivi, avant de dire que la distinction entre « partisans de la
Cour et sujets de la Cour » était artificielle. Le délégué du Kenya
a espéré qu’à l’avenir l’Assemblée adoptera un texte de meilleure qualité et
d’une plus grande pertinence.
Son homologue du Soudan a
indiqué que toute tentative de politiser la CPI et d’en faire un instrument au
service d’intérêts partisans n’allait pas dans le sens de la justice
internationale. « Il s’agit au contraire d’une violation de la
légalité internationale qui ne fait qu’accroître les tensions entre les
pays », a-t-il prévenu. Il s’est dit préoccupé par la tentative de
certains États de transformer l’Assemblée générale en Assemblée des États
parties au Statut de Rome. Les parrains de la résolution ont essayé
d’inclure des notions qui n’ont rien à voir avec les relations entre l’ONU et
la CPI, a-t-il poursuivi. Il a vivement regretté que la Cour soit devenue
un instrument visant exclusivement « les dirigeants et les symboles
africains ». « Que fait la Cour vis-à-vis des autres crimes commis
dans le monde? » « Pourquoi évite-t-elle de se pencher sur les
scandales qui éclatent ailleurs qu’en Afrique? » a-t-il interrogé tout
haut.
Le représentant a aussi estimé que le lien entre la
CPI et le Conseil de sécurité attestait de la politisation de la justice pénale
internationale. Ce lien n’est pas naturel, a-t-il dit, déplorant que
« certains pays, certains citoyens continuaient d’échapper à la
Cour ». Mon pays, qui n’est pas partie au Statut de Rome, n’a aucune
obligation vis-à-vis de la Cour. « Le Soudan n’est en rien concerné
par cette résolution qui n’a, à nos yeux, aucun poids ».
Le représentant de l’Afrique
du Sud, au nom d’un groupe
de 35 pays, a souligné que la coopération entre les Nations Unies et la CPI
a besoin d’être renforcée. Les directives du Secrétaire général sur les
contacts avec les personnes qui font l’objet de mandat d’arrêt et des
convocations apparaissent comme une étape dans la vraie direction. La
Cour a aussi besoin de ressources financières adéquates pour remplir ses
mandats. En tant que gardien de la paix et de la sécurité
internationales, le Conseil de sécurité a un rôle important à jouer en assurant
qu’il n’y ait pas d’impunité pour les crimes graves. Dans ses relations
avec la CPI, il devrait utiliser les saisines de la Cour de manière pertinentes
et cohérentes. Cela nécessite un suivi et un appui à la Cour pour les
opérations de paix et d’ajout d’individus dans les listes de sanctions.
Nous sommes aussi très déçus par les résultats des négociations cette
année. Nous aurions aimé voir quelque chose de positive lors de la
prochaine session de l’Assemblée générale comme résultat d’échanges
substantiels, productifs et transparents.
Le représentant du Brésil s’est
également dit frustré par les négociations de cette année. La distance
entre la résolution et les défis des relations entre les Nations Unies et la
CPI n’a pas été réduite. Nous espérons, a-t-il espéré, à son tour, qu’à
travers un dialogue transparent et inclusif, nous pourrons inverser cette
tendance à la prochaine session et adopter un texte à la hauteur de notre
objectif commun de combattre l’impunité. Le représentant a regretté
qu’une nouvelle fois, l’Assemblée générale soit bornée à « constater que
les dépenses liées aux enquêtes et poursuites engagées par la Cour, notamment
celles concernant les situations dont elle est saisie par le Conseil de
sécurité, ont été prises en charge par les seuls États parties au Statut de
Rome ». Il est regrettable que la résolution n’appelle pas les États
Membres à examiner cette question. Nous devons réfléchir à la viabilité
d’un système où la Cour fait face à une charge de travail sans précédent et où
les membres du Conseil de sécurité ne cessent de jouer avec l’idée de la saisir
de telle ou telle situation. Il faut se souvenir, s’est impatienté le
représentant, que l’Assemblée générale a la responsabilité exclusive d’examiner
et d’approuver le budget de l’ONU.
La représentante de l’Argentine a
indiqué que son pays s’était porté co-auteur de la présente résolution en
raison de son attachement à la CPI. « La CPI n’intervient qu’en
complément des juridictions nationales », a-t-elle dit, rappelant que la
Cour dépendait, pour la bonne exécution de ses tâches, de la coopération de
tous les États, et pas seulement des États parties.
Elle a tout de même déploré que la présente
résolution ne soit qu’une mise à jour technique de la résolution antérieure.
« Certains éléments n’ont pas été inclus », a-t-elle dit, avant
de dénoncer la pratique consistant à faire endosser aux États parties les coûts
découlant de la saisine de la Cour par le Conseil de sécurité. Ces coûts
devraient être pris en charge par les Nations Unies et il est « inacceptable »
que l’Assemblée ne puisse se prononcer sur cette question, car il y va de la
crédibilité de cette institution. Elle a également estimé que l’Assemblée
devait assurer le suivi des situations déférées à la Cour par le Conseil, ce
dernier n’assurant qu’un suivi « lacunaire ».
Enfin, la déléguée de l’Argentine a regretté que
l’Assemblée ne puisse pas, « pour des raisons incompréhensibles »,
faire état des progrès réalisés en vue de l’entrée en vigueur des amendements
de Kampala.
Le représentant de l’Uruguay s’est
également plaint de la conduite et des résultats des négociations. Il a
espéré que les malentendus seront dissipés et que la transparence et
l’ouverture seront au rendez-vous aux prochaines négociations.
La représentante de Costa Rica a, elle aussi, espéré un processus
transparent et exclusif pour les prochaines négociations. La politisation
de la résolution est une question qui doit être résolue immédiatement.
Elle s’est dite ravie que la France ait décidé de se joindre à la proposition
des « Small Five » sur la saisine systématique de la CPI et l’abandon du droit
de veto en cas de crimes de masse. Elle a déploré une résolution qui ne
répond pas aux engagements pris dans les relations entre les Nations Unies et
la CPI.
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