Kadidiatou HAMA
Le 3 novembre
2015, le Conseil de direction du Fonds au profit des victimes a présenté à la Cour pénale internationale un document sans précédent et qui fera date : le projet de
plan de mise en œuvre des réparations accordées à titre collectif aux victimes
relevant de l'affaire portée contre Thomas Lubanga Dyilo.
L'accusé a été reconnu coupable d'avoir procédé à
l'enrôlement et à la conscription d'enfants soldats de moins de 15 ans et
de les avoir fait participer à des hostilités dans le district de l'Ituri, dans
l'est de la République démocratique du Congo (RDC), en 2002 et 2003.
Le plan du Fonds
est la première mesure tendant à répondre aux souffrances des victimes qui ont
subi des atrocités sanctionnées par le Statut de Rome. En l'espèce, il vise à
prendre en charge les besoins légitimes de milliers d'enfants soldats entraînés
dans les conflits qui ont rongé l'est de la RDC.
M. Motoo
Noguchi, président du Conseil de direction du Fonds, s'est exprimé en ces
termes : « Le dépôt de ce document marque un tournant dans l'histoire
du Fonds, particulièrement pour les membres sortants du Conseil. Je suis
convaincu qu'il apportera sa pierre à la création de mécanismes solides sur le
plan juridique et réalisables dans la pratique, afin de donner corps aux
réparations octroyées dans le cadre du Statut de Rome ».
Le document déposé
par le Fonds comprend deux grandes parties : des observations d'ordre
juridique et un plan de mise en œuvre des réparations. Les observations portent
sur les principaux défis juridiques et pratiques à relever pour traduire
l'arrêt et l'ordonnance de la Chambre d'appel en un projet de plan visant à
élaborer et exécuter les réparations accordées aux victimes.
Quant au plan de
mise en œuvre des réparations, il apporte une réponse programmatique
circonstanciée qui prendra la forme de mesures de réparation mises en œuvre à
titre collectif et de manière coordonnée sur une période de trois ans. Le plan
propose de prendre en charge et de réparer, avec une approche holistique, les
préjudices subis par d'anciens enfants soldats ainsi que par des victimes
indirectes des crimes pour lesquels Thomas Lubanga a été reconnu coupable.
La Cour a jugé que
Thomas Lubanga devait s'acquitter de réparations mais n'a pas encore fixé le
montant porté à sa charge. Si la Cour devait considérer l'accusé indigent à cet
égard, le Conseil de direction du Fonds est disposé à compléter le montant des
réparations à hauteur de un million d'euros afin d'exécuter son projet de
plan de mise en œuvre des réparations au profit des victimes vivant en Ituri.
Conformément à la règle 56 du Règlement du Fonds, ces ressources
complémentaires ont été calculées en tenant compte de la portée et de la forme
du projet de plan de mise en œuvre, des ressources dont dispose le Fonds au
titre de sa réserve aux fins de réparation, des obligations du Fonds s'agissant
de son mandat d'assistance et des procédures judiciaires en cours pouvant
déboucher sur l'octroi d'autres réparations.
Afin d'élaborer et
de préparer des observations et un projet de plan de mise en œuvre, le Fonds a
cherché et obtenu le soutien d'un large éventail d'intervenants. En mai 2015,
il a organisé une réunion au Transitional Justice Institute de l'Université Ulster
de Belfast, à laquelle des experts du monde entier ont participé. Cela a été
l'occasion d'aborder et d'analyser les différentes difficultés d'ordre
juridique et pratique que pose la mise en œuvre des réparations octroyées à
titre collectif aux victimes relevant de l'affaire Lubanga. De mai à juillet
2015, le Fonds a mené des consultations ciblées en Ituri (RDC), afin de faire
connaître l'ordonnance de réparation de la Cour auprès des communautés
affectées et des victimes pouvant éventuellement prétendre à des réparations,
et de solliciter leur avis sur les modalités qu'il convient de fixer pour
mettre en œuvre les réparations visées dans cette ordonnance.
À la demande du
Fonds, la Section de la participation des victimes et des réparations du Greffe
(CPI) a dressé la cartographie des victimes en Ituri. Cet exercice a permis
d'obtenir d'importantes informations concernant l'étendue des formes de
victimisation et les lieux où se trouvent des victimes pouvant éventuellement
prétendre à des réparations. D'autres sections du Greffe ont apporté leur aide
dans le domaine de la logistique, de la sécurité, de la sensibilisation et de
la coopération extérieure.
Le Conseil de
direction du Fonds a tenu des réunions en mars et juillet 2015, afin de suivre
les progrès accomplis et de donner des orientations au Secrétariat du Fonds
concernant la préparation des observations et du projet de plan de mise en
œuvre. Le Directeur exécutif du Fonds, M. Pieter de Baan, s'est dit
extrêmement fier des efforts considérables déployés par le personnel du
Secrétariat à La Haye et sur le terrain : « Sous la direction de
Mme Kristin Kalla, fonctionnaire hors classe chargée des programmes, et
grâce aux contributions décisives de Scott Bartell et de Katharina Peschke,
notre équipe a élaboré un plan de mise en œuvre des réparations octroyées à
titre collectif à d'anciens enfants soldats qui tient ses promesses, à savoir
réparer réellement et véritablement les préjudices qu'ils ont subis. C'est la
première fois qu'une mesure aussi concrète est prise en vue d'honorer la
promesse de justice réparatrice faite aux victimes par le Statut de Rome. Une
fois que la Cour aura approuvé le plan, le Fonds ne ménagera aucun effort pour
que sa mise en œuvre soit couronnée de succès, et ce, en consultation et en
coordination avec les victimes elles‑mêmes et avec toutes les autres personnes
qui sont concernées par la bonne exécution de l'ordonnance de
réparation ».
Source : CPI
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